La diplomatie n’était pas mon fort, en règle générale ce n’était pas moi que l’on envoyait quand il s’agissait de négocier ou d’apaiser les tensions. Parfois, comme aujourd’hui, il fallait pourtant bien que je m’y colle, et c’est avec une surprise soigneusement dissimulée que je vis une représentante du groupe de manifestants s’avancer vers moi. Bien, seul à seul, je serais en mesure de calmer le jeu et, si ça tournait au vinaigre, j’avais un otage tout choisi. Seule mon intuition me souffla de ne pas me reposer sur ce faux sentiment voulant me faire croire que, peut-être, les choses se passeraient bien.
Et mon intuition avait une fois de plus touché juste. Je le su quand la manifestante s’effondra à deux pas de moi, portant la main à son cou et chuta, foudroyée. Je m’agenouillais devant elle pour examiner l’impact, comprenant instantanément le piège dont l’étau se refermait. C’était une fléchette sans aucun doute empoisonnée, lancée par quelqu’un qui avait l’intention de poser le Premier Ordre comme responsable. C’était grossier, j’aurais voulu affirmer que personne ne pourrait croire à une manœuvre aussi évidente mais c’était loin d’être évident pour tout le monde. Les premiers cris d’accusation fusèrent, bientôt suivi par des tirs. Je ne me mis pas immédiatement à couvert, restant près du corps en levant le regard, je reconstituais son emplacement au moment de l’impact ainsi que l’inclinaison du projectile fiché dans la chaire, pour retrouver approximativement la position du lanceur. Mon regard suivi une trajectoire imaginaire pour s’arrêter sur un groupe de bâtiments.
- La porte-parole a reçu une fléchette empoisonnée. Dispersez-moi ces gens, employez des charges paralysantes sur les civils. Déclarais-je sur la fréquence prioritaire.
Je couvris ma retraite par quelques tirs de couvertures, une explosion retentit à quelques pas de moi seulement et je fus balayée par l’impact. Sonnée, je me traînais derrière un étal de fruits, en proie à un engourdissement général trahissant une douleur future, ainsi qu’un violent acouphène. Un peu nauséeuse, je m’assurais de ne pas être blessée : j’avais un goût de sang dans la bouche, sans doute m’étais-je mordu la langue, je crachais un petit filet de sang. Ma jambe gauche avait une belle estafilade un peu brûlée, mais rien de bien sérieux. Tant que l’adrénaline ferait son effet, je ne devais pas être trop gênée par la douleur. Mon inquiétude se porta surtout sur mon ysalamir dont je passais une main apaisante sur sa tête. Il n’était pas blessé lui, c’était le plus important. Ses yeux de reptile balayaient juste les environs d’un air affolé. Pauvre Csairiv, la quiétude de mon vaisseau aurait été préférable.
Plus loin, Xel’arak s’éloignait avec son escorte, ils semblaient efficaces et ça faisait une préoccupation de moins que de le voir bien entouré. Puis il y eut une onde, je crus d’abord à une explosion dont l’impact aurait été si fort que je n’aurais pas encore encaissé le bruit, mais je compris en voyant tout se soulever, sauf ce qui se trouvait dans mon voisinage proche, que j’étais face à une manifestation de Force. Si l’instant d’avant j’avais eu un petit regret d’avoir embarqué Csairiv dans cette histoire, tout regret était à présent aussi balayé que les manifestants.
- Présence d’un utilisateur de Force hostile ! Lançais-je de nouveau dans le comlink.
Bien entendu c’était évident pour ceux qui l’avaient vu, mais j’en informais du même coup toutes les forces du Premier Ordre de Malastare.
Au loin, j’entendis quelqu’un crier à la bombe, immédiatement suivi par la voix de Gal’aad m’appelant, ainsi que Sieana, pour nous indiquer la direction de l’agresseur. Je sortis de mon abris et me mis à courir, le blaster au poing pour écarter tout obstacle à coups de décharges paralysantes. La voix de Sieana me parvint dans ce tumulte, elle avait de l’avance sur moi et je fus bloquée par une colonne de fumée me faisant perdre quelques précieuses secondes. Je fus enfin en vue de Sieana et de l’homme responsable de la vague de Force. Soigneusement, je me tenais assez loin de Sieana pour qu’elle ne subisse pas l’influence de l’ysalamir que je portais, tout en me tenant prête à m’approcher de l’homme s’il tentait d’attaquer avec la Force. Je pouvais l’empêcher d’utiliser ses dons ou me protéger de ses attaques, mais s’il détenait d’autres armes, seules mon armure et mes réflexes me sauveraient.
Je ne pouvais pas m’approcher plus, un appel sur mon comlink m’obligea d'ailleurs à reprendre de la distance pour que mes propos ne tombent pas dans les oreilles ennemies.
- Commandant Kelso, ici le Capitaine Thrace. Dis-je en prenant l’appel, non sans rappeler au passage que les familiarités n’étaient pas à l’ordre du jour, même si nos relations pouvaient être plus courtoises que de simples collègues. Douze régiments en tout, de souvenir, deux par entrées, un en escorte d’un notable allié et le reste en patrouilles. J’avais la 22e avec moi quand l’offensive a commencé. Un groupe ou des personnes isolées et non identifié ont profité des manifestants pour mettre feu aux poudres. Une civile morte, probablement bien plus de victimes mais impossible d’estimer avec précisions. Je n’ai plus de contact avec le Sergent SC-0101 en charge de la 22e. Les attaques sont concentrées dans la zone du départ de la course mais on m’a rapporté des mouvements à l’entrée Ouest, soit c’était une diversion, soit c’est une attaque à revers. Vous êtes déjà posés, tu as pu voir ce qui se passait ? J’abandonnais un peu mon formel. Soyez prudents, j'ai un utilisateur de Force hostile ici, il y en a peut-être d'autres.
De l’autre côté de la rue, ce fut à Gal’aad de faire son entrée, ne s’encombrant pas de grands discours avant de passer à l’offensive, l’efficacité sans fioritures. Je souris avec un léger hochement de tête avant de couper la communication et armer mon blaster sur sa puissance létale. Avec cet homme, aucun risque n’était à prendre.

Résumé :