Errol commençait à bien connaître Porus Vida. Ce monde était probablement le plus florissant qu'il lui ait été donné de fréquenter, berceau des plus riches citoyens libres de la galaxie. L'argent, ici, n'était un problème pour personne, et tout le monde vivait dans une démesure déconcertante. Errol y avait fait un casse, quelques mois plus tôt, dont il se souviendrait longtemps. Non qu'il fut particulièrement lucratif, il l'avait fait grandir, d'une certaine manière.
Le mécanicien avait arrêté le Ryll. C'était toujours difficile, il avait parfois du mal à le vivre, mais le soutien de certaines personnes proches lui donnait du courage. Les derniers jours avaient cependant été très compliqués à gérer, et il s'était résolu à reprendre son activité. Il ne pouvait pas ne rien faire, et retourner à son ancien métier était toujours aussi impensable. Bien sûr, son dernier gros coup lui avait valu une prime sur la tête. Il s'en sortait, jusque maintenant. Plus ou moins. C'était une leçon à retenir : préparer ses coups avec plus de minutie et ne plus jamais prendre le risque de voir son identité dévoilée. C'était pour cela qu'il était là, en ce beau soir d'été, habillé dans un costume noir bien trop chic pour lui.
Le dévolu du voleur s'était porté sur la famille Duanan, de riches aristocrates humains, soit disant descendants d'une noble lignée de Naboo. Les Duanan avaient de l'argent à ne plus savoir qu'en faire, mais au lieu de le garder simplement, ils le dépensaient en réceptions luxueuses et bals masqués, dans le but probablement de regagner une influence politique. Ou simplement pour se sentir importants. Le raisonnement du corellien était donc que leur besoin réel n'était pas si important, et qu'ils pouvaient se passer d'une somme raisonnable sans en pâtir le moins du monde. Les Duanan vivaient dans un petit château, construit sur une île verdoyante privée, en lévitation, bien entendu. L'accès et les sorties se faisaient par un seul endroit, et un système de garde avait été mis en place pour contrôler cela, système très performant. Sans doute était-ce plus pour leur image une fois encore que par besoin réel : personne de sensé n'essayerait de passer par effraction. Il avait donc attendu un moment, cherchant des solutions alambiquées et plus tordues les unes que les autres pour parvenir à ses fins, envisageant même de demander simplement cet argent aux Duanan en les présentant comme de grands bienfaiteurs, jusqu'à ce qu'un poste ne se libère, en tant que second valet du fils cadet, Orion. Il avait sauté sur l'occasion, et à force de baratin, avait obtenu le poste. De quoi étudier les opportunités de l'intérieur.
Cela ne faisait pas très longtemps qu'il habitait là bas, dans le quartier des domestiques. Les droïdes étaient peu nombreux, cela faisait tellement has-been, et on préférait les servants en chair et en os. Une gigantesque réception avait été organisée dans le but de fêter les vingt-cinq ans de leur fille année, Andra – une fort jolie demoiselle par ailleurs. Les invités étaient prestigieux et fort nombreux, et la consigne était de venir habillé en noir et blanc, et de porter un masque. Les serviteurs étaient divisés en fonction de leur espèce et de leurs capacités. Les twi'lek étaient chargées d'accueillir les hommes seuls et de leur tenir compagnie si besoin est, les humains, mirialans, zabraks, étaient chargés de s'occuper du buffet et du service pendant la première partie de la soirée. Ils avaient pour consigne d'être vêtus eux aussi en noir et blanc, mais sans porter de masque, bien entendu. Il ne fallait pas se montrer insultant.
La soirée se déroulait dans l'incroyable jardin de la Maison, entretenu au millimétré et particulièrement riche en plantes exotiques raffinées. Les buffets étaient installés un peu partout – au pied d'une fontaine très ancienne, joyau d'un temps passé, au milieu d'un grand labyrinthe, en dessous de gigantesques arbres fruitiers – et des groupes de musique déambulaient un peu partout. Ici encore, on avait de tout. Errol fut affecté dans une clairière, assez excentrée, discrète. Les dernières lumières du jour étaient filtrés par les feuilles mauves des arbres centenaires, et un parfum de menthe fraîche et de verveine traînait discrètement dans l'air. Les hôtes qui passaient par là étaient peu nombreux, et appréciaient la discrétion du lieu, chose que le voleur avait eu pour consigne de respecter coûte que coûte. Pas d'oreille qui traîne, pas de regard indiscret, et rien de ce qu'il aurait pu y avoir ou entendre ne devait sortir de là. Servir en s'inclinant, ne jamais regarder dans les lieux, ne parler que si on lui demandait quelque chose. La soirée allait être longue, mais il avait connu des choses plus déplaisantes.
La nuit commençait à tomber. Les dernières lueurs de jour s'estompaient, tandis que les lucioles étaient lâchées dans le parc, virevoltant de partout. Un plateau de verres à la main, Errol passait lentement entre les quelques groupes d'invités, le visage neutre. Son regard se posa malgré lui sur une silhouette qui lui disait quelque chose. Il se détourna et revint au buffet. Ne pas chercher à en savoir plus. Se faire aussi discret que possible. Il avait besoin de sa place. Le corellien commença à arranger les mets sur le buffet, prenant tout le temps dont il aurait eu besoin, et même plus encore. Une femme qu'il connaissait ? Elle avait eu l'air jeune. Quelque soit la jeune femme en question, la croiser n'était pas bon signe. Il s'agissait probablement d'une rencontre d'un soir. Mais ça, ce n'était que probable.

La nuit mauve s'installait dans la clairière, et avec elle les chants d'argent. Debout, dos aux convives, Errol laissait promener ses mains sur les verres d'alcool à bulle, en arrangeant certains pour que le buffet reste impeccable. Il sentit une présence derrière lui. La jeune femme, il en était quasi-sûr. C'était fâcheux, cette histoire. D'une, il n'avait pas envie d'être découvert et d'être appelé par son vrai nom. Couverture oblige. De deux, il n'avait pas envie d'une crise de ménage. Les 'comment ça se fait que tu sois là, fiente de rat, toi qui t'es barré sans laisser de nouvelles ?', il les voyait venir, et s'il n'y avait pas de moment idéal pour cela, cette soirée était le pire.
Elle lui parla. Errol renversa un verre, et s'empressa de nettoyer. Meetra. Il ne s'attendait pas à la voir ici. Cela faisait un moment. Et puis, ils s'étaient croisés au hasard trois fois déjà depuis quelques mois, comme si le hasard voulait que ces deux êtres perdus se rencontrent parfois au moment où ils ne s'y attendaient pas. Il arrêta sa gestuelle le temps d'écouter ce qu'elle avait à dire, le dos toujours tourné. Du Meetra tout craché. Il ne savait pas trop comment le prendre, ni comment réagir. Alors, si en plus il devait jouer son rôle... C'était pas évident tout ça. Elle l'avait laissé en plan. Il avait été là dans une situation particulièrement atroce, il n'avait pas bronché, était allé tant bien que mal jusqu'au bout et elle l'avait planté comme un gamin. Ça ne lui aurait pas coûté cher d'être honnête dès le début et de lui dire qu'une fois arrivés au vaisseau, elle voulait être seule pour faire son deuil. Il était drogué, mais pas stupide. Alors oui, cette histoire l'avait travaillé. Celle-là, plus le traumatisme de sa mort certaine avec Dune, il avait eu du mal à les encaisser. Il avait ressassé ses démons des nuits entières. Il y avait eu le Ryll aussi, qu'il avait cessé de prendre d'un coup à cette période. Difficile. Douloureuse. Et elle était là à nouveau, par hasard, et ironisait sur le fait qu'elle lui présente des excuses à chaque fois. Il se retourna lentement, une coupe à la main, le visage inexpressif. « Tenez Mademoiselle, goûtez donc à ce Nectar de Mirial, un véritable délice. » Ses yeux se posèrent sur elle. Elle était méconnaissable. Il y avait le masque bien sûr, mais aussi la robe, chose beaucoup plus inhabituelle, et la grâce qu'elle dégageait ainsi vêtue. Qu'est ce qu'elle venait faire là. Du coin de l’œil, derrière l'épaule de la Jedi, il vit passer Erdra, qui passait avec un plateau le regard acéré, observant les valets dont elle était responsable. Errol inclina légèrement la tête en lui présentant le plateau, et le reposa ensuite sur le buffet avec délicatesse. Il fallait bouger de là.
Sa voix se fit plus audible quand il reprit la parole. « Bien entendu Mademoiselle, je me ferai un plaisir de vous montrer le chemin du labyrinthe. » Il lui fit signe de la suivre en étendant le bras devant lui, et s'avança. Ils marchèrent quelques minutes avant d'arriver dans une partie des bois plus paisible encore. Là, Errol soupira et s'arrêta sous un gigantesque chêne. Il s'alluma une cigarette, les mains tremblantes. « Dis moi, dans ce que vous apprenez dans votre Ordre, on dit pas que la Force et le hasard, c'est un peu pareil ? Parce que si c'est le cas, comment tu expliques que la Force nous réunisse comme ça, aussi souvent ? » Il blaguait. A moitié. Bon. Passer à ce qu'il avait à lui dire en priorité. Le reste pouvait attendre. « Je suis sous couverture. Je m'appelle Malan, troisième valet d'Orion. Tu es probablement sous couverture aussi, alors pour moi, ce sera Mademoiselle. Ça te va bien » Bien, ça c'était fait. La suite. « Le labyrinthe est un peu plus loin sur la droite, c'est éclairé par des lampions. Qu'on ne me reproche pas de mal t'avoir renseignée si on est interrompus. » Oui, mais encore ? « Tu n'as pas à t'excuser de ça. Les circonstances pardonnent tout. Simplement, ça me ferait plaisir que tu cesses de voir en moi un être sensible et fragile. Je le suis un peu, mais je préfère la franchise. Ce n'est pas parce que j'ai pris des trucs à un moment que je ne dois pas être traité comme n'importe qui. Comme tu faisais avant. Je suis plus âgé que toi, je te rappelle. » Ça c'était une remarque enfantine. Ouais. Il marqua une pause, visiblement absorbé par sa cigarette. Puis, sans lever les yeux, continua. « Le masque te va plutôt bien. La tenue aussi. Mais avoue. En réalité, tu me cherches partout, hein ? C'est ce que tu avais marqué dans ce mot. Tu le veux vraiment, ton bisou, hein ? » Terrible moment pour de la drague. Terrible.

Ah, il avait donc raison. D'après les Jedi, la Force avait ses raisons, et ils ne se retrouvaient pas aussi souvent par pure coïncidence. Il lui faudrait de bonnes raisons, à cette Force, car sur le papier, ils n'avaient pas grand chose à faire ensemble. Elle effectuait des missions secrètes pour un Ordre mystérieux et était traquée par de méchants gens en uniforme pour ses dons, tandis qu'il passait son temps à soutirer de l'argent à ceux qui n'en avaient pas besoin pour le transférer à ceux qui en avaient besoin, et qu'il était traqué, lui aussi, même pour d'autres raisons. En somme, ils étaient deux pauvres bêtes en fuite l'un et l'autre, et leurs retrouvailles n'étaient pour l'instant jamais signe de bonne étoile. « Je n'aime pas trop ça non plus, mais si on part du principe qu'il ne s'agit pas de hasard et que tu me cherches, ça me va... A ceci près que si tu m'as trouvé ici, d'autres pourraient le faire aussi. » Vu sous cet angle, c'était tout de suite moins joyeux.
Il partit sur quelque chose de plus léger, non désireux de s'attarder plus avant sur la prime mirobolante sur sa tête. Qui sait, l'Ordre Jedi avait peut-être besoin de financement et Meetra pourrait avoir l'envie soudaine de le livrer. Ce n'était pas son genre, mais plus rien ne le surprenait vraiment ces derniers temps. Meetra éclata de rire et pencha la tête en arrière. Elle était belle quand elle riait Meetra, il avait envie de la prendre dans ses bras. Mais ce ne serait pas bienvenu. D'autant que le lieu ne s'y prêtait pas du tout. « Et c'est toi qui reparles d'un baiser. C'est peut-être toi qui n'attends que cela au final. Peut-être nous courrons-nous l'un après l'autre sans le savoir. » Errol rit doucement à son tour. Elle marquait un point. « Peut-être bien, tu as sûrement raison.Mais je ne suis pas certain que tu l'ais mérité, tu sais... J'ai bien peur que tu ne doives attendre un peu. » Avait-il envie de l'embrasser ? Oui, il en avait très envie. Mais il était aussi très conscient que la situation était beaucoup plus compliquée qu'elle ne paraissait. Pour commencer, elle était beaucoup plus jeune, et pouvait trouver de bien meilleurs partis que lui. Ensuite, ils avaient déjà du mal à se sortir de certaines situations ensemble, et additionner les dangers qu'ils couraient n'était peut-être pas l'idée du siècle. Il avait des sentiments confus pour plusieurs personnes aussi, ce n'était pas si facile, et il n'avait pas envie de lui faire le coup d'un soir, parce qu'elle méritait mieux que ça et que cela ne ferait que nuire à leur relation, qui allait de mieux en mieux depuis leurs retrouvailles sur Corsuscant. De toutes façons, la question ne se posait pas, puisqu'il perdrait immédiatement son poste si on le voyait flirter à ce point avec une invitée. Meetra l'interrompit dans ses pensées contemplatives en le remerciant à nouveau, et en lui sait qu'elle n'avait pas encore trouvé un moyen correct de le remercier mais qu'elle y travaillait. L'air dégagé, il répondit au tac au tac « Oh, je suis sûr que tu vas trouver. Fais juste un petit effort. » Han. Il avait dis ça ? Pourquoi ? Quel con.
Il n'eut pas le temps de rattraper le coup par une pirouette dont il avait l'habitude. Des silhouettes lourdement armées avaient fait apparition dans la foule, au loin. Les lucioles n'éclairaient pas assez d'aussi loin pour qu'on puisse discerner les visages, mais les silhouettes étaient bien visibles, elles. Il vit le premier valet pointer du doigt dans leur direction. Chasseurs. Ils l'avaient retrouvé. Comment ils avaient fait ? Bordel, pas bon. Déjà, cela voulait dire que sa couverture n'existait plus. Qu'il était coincé ici, au piège. Son regard se posa sur Meetra. Avait-elle vu ? « Il faut qu'on bouge. Vite. Remet ton masque ». Errol laissa tomber sa cigarette, prit par la main et l'entraîna à vive allure à l’extérieur. Ils ne couraient pas, mais leurs pas étaient assez rapides pour que le doute persiste. Au dessus de son épaule, le Corellien discerna les silhouettes qui approchaient. Deux silhouettes. Le labyrinthe n'était pas loin, ils avaient peut-être une chance de l'atteindre avant eux.
Un homme seul buvait sa coupe à l'entrée. Il les regarda, et Errol aurait parié de voir une mine interloquée si elle n'était pas masquée. Il s'approcha au plus vite, et lâcha la main de Meetra. « Bonjour, mon brave. Permettez que je vous dérange un instant. »

Pile/Face:

Errol frappa de toutes ses forces, d'un ample mouvement du bras, et sa main alla s'écraser sur la tempe de l'invité. Les jambes de se dernier se dérobèrent et il s'écrasa au sol. Le voleur s'agenouilla pour s'emparer de son masque, et aussitôt mis, entraîna Meetra dans le labyrinthe, en courant cette fois. Les chasseurs avaient commencé à courir aussi. L'adrénaline lui donnait une force incroyable, et il ne s’essoufflait pas. Ils passèrent devant plusieurs groupes de personnes jusqu'à se perdre complètement dans l'immense méandre d'allées sombres. Alors, ils ralentirent le pas. « Désolé pour ça. T'es pas la seule à avoir quelques soucis. Mais, avec ces masques, ils auront du mal à nous retrouver. Il doit y avoir plus d'une trentaine de personnes ici. Pour le moment... Pour le moment, ça devrait aller. » Il s'assit par terre, et s'adossa contre l'immense haie. « T'aurais pas une technique de méditation pour déstresser un peu ? J'serais pas contre. »

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'Pile - Face' :

Elle avait des doutes. Doutes sur le fait qu'ils puissent s'arrêter un moment, perdus dans le labyrinthe, alors que deux hommes armés étaient à leur trousse. A ses trousses, plus précisément. Il eut envie de rire mais se retint. Cela aurait fait un peu fou, compte tenu des circonstances. « L'île est un vrai fort. Je n'ai aucune chance de m'en sortir de là intact, il y a trop de contrôle à la sortie, et ma couverture est partie en fumée. J'imagine que nos bons hôtes ne sont pas ravis d'une chasse à l'homme à un tel moment, surtout si elle concerne un de leurs employés. Pour le moment cependant, on est relativement à l'abri. Les invités sont encore là, ils sont encore masqués, et nous aussi. S'ils débarquent, là maintenant, on ne sera que deux amants, je doute que ces gars là aient l'autorisation de demander à tout le monde de faire tomber le masque. » Ouais, le risque n'était pas dans l'immédiat. Mais la fête n'allait pas durer éternellement, et les invités allaient partir peu à peu, par l'unique goulot qui existait. C'était après que ça allait être compliqué. « Mais si tu te sens plus à l'aise en marchant, marchons. » L'homme se releva et s'empara du bras de la Jedi. Ils commencèrent à avancer à nouveau, tranquillement. Meetra était plutôt silencieuse. Elle voulait sûrement des explications sur la situation, et il pouvait la comprendre. En agissant de la sorte sans lui demander son avis, il la détournait peut-être de la véritable raison de sa présence. « J'ai eu quelques soucis avec un ami qui n'a pas aimé que je lui allège sa bourse. Je n'avais pas pris assez de précaution, et ma tête a été mise à prix. Un bon prix je crois, car on me persécute un peu, en fait. J'ai été traqué à plusieurs reprises déjà. J'ai failli y laisser ma tête il y a quelques semaines. » Sa voix se tut. L'épisode était douloureux, encore vivace. Dune. Il respira profondément, cherchant à éluder cette pensée de son esprit. « Mais je ne peux pas me terrer, c'est impossible, je vais devenir fou. Je dois faire quelque chose d'utile. Alors, j’admets qu'un jour où l'autre, on finira par me coincer et que personne ne sera là pour me tirer de la situation. J'accepte qu'un jour, je doive être exécuté pour avoir contrarié une mauvaise personne. Le risque en vaut la peine. » Au moins, il aurait fait quelque chose d'utile, à son échelle.
Ils croisèrent un groupe de nobles éméchés et Errol se tut. Il garda la tête bien droite et continua d'avancer, non sans les saluer d'un geste de la tête. Deux d'entre eux sifflèrent Meetra, et le Corellien sera les dents. Cela du se ressentir sur son emprise, car Meetra agita un peu le bras. « Pardon », chuchota-t-il. Il attendit que les intrus soient partis pour s'arrêter à nouveau. Marcher, encore, toujours, à quoi bon ? Se sentir vivant encore ? Il l'était, il n'avait pas besoin de se le prouver. Il la regarda, hésitant. Son masque n'était pas du plus confortable, il avait chaud. Mais s'il fallait jouer, il se devait de le faire bien. « J'imagine que tu n'es pas venue pour assister à la fête, simplement. Ce n'est pas ton genre.. Enfin, je ne crois pas. Tu dois avoir quelque chose à faire, toi aussi. Et pas courir aux bras d'un fugitif. Si... » C'était difficile à dire. Sa voix se rompit, et il mit quelques secondes avant de reprendre, les lèvres légèrement tremblantes. « Si on se sépare, tu pourras faire ce que tu as à faire. Ils m'ont vu avec toi, ils doivent chercher les couples, logiquement, être seuls nous donne un léger avantage. Je n'ai pas envie de te détourner de ta voie. Et j'ai pas envie de te faire courir plus de risques que ce que tu fais déjà. A chacun sa part. » Elle ne voulait pas lui faire courir de risques inutile, et lui non plus. Il avait été chanceux jusque là. Avec un peu de cran, il pouvait encore s'en sortir. Piquer le blaster d'un garde. Forcer le passage. Quitter l'île. Se faire discret un temps, puis repartir. Techniquement, c'était possible. Et puis, partir sans butin, c'était frustrant. Tant qu'il y était, il pouvait toujours tenter de s'introduire dans le château pour trouver de quoi compenser tout ces tracas. « Si la Force souhaite vraiment qu'on se croise si souvent, il faut avoir confiance, et si dire qu'on se retrouvera plus tard. Un meilleur jour. Qui sait, peut-être même qu'on l'aura prévu, qu'on aura envie de se revoir ? »

Errol écoutait les arguments de Meetra. Ils allaient de soi, bien sûr, il aurait pu parier qu'elle dirait des trucs de ce genre. Il l'avait aidé sans rien demander en retour, c'était vrai. Pour lui, ça avait été évident, il ne s'était pas posé de questions. Mais il n'attendait rien en retour, et il ne voulait pas que cela soit perçu comme cela, un du pour un du. Seulement, ce n'était probablement pas son raisonnement, il la croyait sincère. Elle était prête à aider. Il n'avait pas envie qu'elle prenne de risques... mais ses chances étaient nettement plus élevée avec son aide, c'était certain. Il aurait mal vécu de se faire rembarrer par Meetra sur Eriadu, et il ne lui avait pas laissé le choix. Elle lui laissait le choix. Bon. « C'est d'accord. Simplement, si ça tourne mal, ne tente rien de crétin, et sauve ta peau plutôt que la mienne. Ah, et c'est une belle façon de me remercier. » Mais ça ne t’exonère pas du bisou, pensa-t-il.
Elle lui signala que des personnes pas forcément sympathiques se dirigeaient sur eux. Pas bon. Il n'était pas armé et ignorait si elle l'était, mais aller à une confrontation probable était du suicide. Seulement, maintenant qu'ils étaient dans le labyrinthe, ils avaient toutes les chances de mettre du temps à sortir, et toutes les chances de tomber sur eux. Seulement, encore une fois, il devait leur être impossible de les distinguer des autres invités s'ils jouaient le feu. Ce serait plus compliqué pour descendre de l'île. D'après la Jedi, ils n'étaient pas très loin, et il avait toutes les raisons de lui faire confiance. Il s'approcha un peu d'elle, et hésita un instant, ses yeux posés sur sa silhouette que la nuit recouvrait peu à peu. « Tu permets ? » demanda-t-il à peine plus fort qu'un murmure. Sa main se posa doucement sur la hanche droite de la jeune femme. Quitte à se faire passer pour des amants égarés, autant être crédibles. La situation ne lui déplaisait pas, mais il n'était pas tout à fait confortable non plus, comme si le flou qui s'était installé sur leurs intentions quant à leur relation rendait le geste plus bizarre. Et il la sentait proche, très proche, la tentation était grande de s'y perdre. Si toutefois elle le laissait faire et ne le soulevait pas par les épaules.
Ils se remirent en route à la recherche d'une sortie. Comme Meetra l'avait prédit -elle faisait comment, sérieusement ? Elle sentait le vent ou quoi ? - ils ne tardèrent pas à croiser une homme et une femme lourdement armés. Errol inclina la tête, sourire aux lèvres, et les salua d'un bonsoir joyeux. Il sentait la frustration émaner de chaque cellule de leurs corps. « Mes braves, pouvez vous nous indiquer la sortie ? Mon amie et moi nous sommes quelque peu égarés.... » L'homme lui barra la route. « Excusez moi Monsieur, contrôle de routine. On cherche un fugitif. Qui se balade avec une femme. Ça ne vous dit rien ? » Son ton était sec, mais sarcastique aussi. C'était plutôt mal parti. Errol sentit son sang bouillonner. C'était bon quoi, s'ils le soupçonnaient, qu'ils sortent leurs armes et qu'ils en finissent. Il n'avait pas envie de courber l'échine, regarder ses chaussures et attendre de voir. Il n'avait pas envie que Meetra ne prenne les choses en mains, car si les choses se transformaient en autre baiser volé, la confusion entre eux ne seraient que plus grande encore. Errol répondit, tout aussi sarcastique, sur un léger air de défi « Ah oui, bien sûr, les fugitifs. Ils font la fête au buffet. Vous devriez aller voir. » L'homme fit un pas vers eux. Il était particulièrement imposant, Errol avait peu de chances de le coucher avec un coup sur la tempe. Errol pivota vivement et pointa le chemin derrière eux. « C'est par là. Vous pouvez pas vous louper. Maintenant, veuillez cesser de nous importuner avec vos questions stupides. Vous croyez vraiment que je suis un fugitif ? Je suis Garen Hytraci, le gérant des entreprises GFVI, sur Corsuscant. Mon bureau est au 165eme étage, couloir est. Je suis né en 0 ABY. Et je vous garantie que je peux vous attirer de gros ennuis si vous ne nous laisser pas partir ! » Toutes ses informations étaient vraies, il était du genre à se renseigner avant de tenter des plans stupides. La chasseuse semblait vérifier ses dires au fur et à mesure qu'il parlait, et elle hocha la tête. « C'est bien lui. Et il est sur la liste des invités. » L'homme sembla se décomposer sur place, et il marmonna des excuses, non sans leur avoir indiqué la sortie. Errol entraîna Meetra d'un pas vif vers la sortie, ô combien fier de lui.
Et voilà. Ils étaient sortis. Le parc s'étendait autour d'eux, la pénombre ponctuée par ses lueurs éparses/. Vers le château, des ombres virevoltaient au son d'une douce mélodie. Le bal avait commencé. « Il serait suspect de partir si tôt. Maintenant que nous sommes innocentés, m'accorderez-vous une danse, Mademoiselle ? » Sourire aux lèvres, il s'était agenouillé sous la lumière d'un groupe de lucioles. Vivre chaque jour comme le dernier, c'est ce qu'ils disaient tous.