Ils t’ont vu comme le chiot apeuré, la pauvre bête que l’on a arraché à ses parents de la plus horrible des manières, que l’on a traumatisé sans prendre en compte les risques, sans se douter qu’elle serait un jour une véritable menace. T’as aboyé et mordillé, seuls moyens de défense que tu avais à ta disposition à cette époque, toi qui n’avait jusqu’alors connu que joie et allégresse, extirpé de ton monde d’opulence pour finir dans les recoins d’une cage, traité comme la petite créature malléable qu’ils voulaient que tu sois. Bien sûr, tu as répliqué et tes crocs ont parfois entaillé la chair de tes ravisseurs, indomptable et sauvage malgré ton jeune âge. Tu ne voulais pas te laisser faire, ne pas baisser les bras… Mais ils ont quand même su détruire l’innocence de ton enfance, briser ta naïveté à grands coups de fouet pour faire de toi quelqu’un d’autre, quelque chose d’autre…

Tu es devenu un chien en cage, celui qu’on maintient par les chaînes et dont on attise la haine et la rage dans le seul but de la voir s’exprimer entre les quatre murs d’une arène. Malgré tes tendances rebelles, tu n’en restais pas moins contraint d’obéir à tes maîtres, cédant à leurs caprices lorsqu’ils levaient les grilles de ta prison d’acier pour te faire tuer des inconnus au nom du divertissement des élites amorales. Ta survie à ces rixes, tu la dois seulement à la fougue de ta jeunesse et l’insatiable soif de sang qu’ils avaient fait naître en toi, un peu trop impétueux et impulsif pour ne pas récolter des coups mais suffisamment talentueux pour prendre la vie de l’adversaire avant qu’il n’ait le temps d’en finir avec toi. Autant animal féroce qu’instrument de leurs désirs les plus fous, tu devins vite un véritable gladiateur des temps modernes, avec les talents pour la barbarie et l’amour de la violence crade dont tu t’enivrais régulièrement. Tu n’étais qu’une bête farouche luttant pour sa survie, suivant tes instincts en lesquels tu avais une confiance totale afin de voir le jour se lever une nouvelle fois…

Puis tu as fini par comprendre que tu valais mieux que ça, que le cabot pouvait devenir un prédateur s’il apprenait de ses erreurs, s’il réfléchissait avant d’agir. Avec le temps, tu as appris la discipline et l’astuce, à ne plus foncer tête baissée et à planifier tes actions. Les combats avaient endurci ton corps et il avait été temps pour toi d’aguerrir ton esprit. Tu ne voulais plus être un objet et cela s’est ressenti dans tes actes, dans ta façon de procéder. Tu t’es même surpris à rêver de liberté et d’indépendance, deux valeurs primordiales à tes yeux, deux moteurs qui ont su te propulser vers un avenir meilleur malgré qu’elles aient été mises à rudes épreuves. De cela a résulté un déferlement de frustration et de colère, armes qui aiguisèrent tes crocs, ceux-là même qui avaient déjà blessé tes maîtres et avec lesquels ne fis plus seulement que blesser. Dans tes yeux se mit à brûler une détermination nouvelle, celle de devenir quelqu’un…

… Et tu as fini par trouver ton rôle, un prolongement naturel de ton vécu quand on y pense. Troquant la peau du canidé pour la fourrure du loup solitaire, tu t’es forgé un caractère insoupçonné. Ta découverte de l’univers t’a redonné goût à la vie et tu n’existes aujourd’hui que pour te faire porter par les flots de l’existence. Ton cynisme naissant s’est affuté au fil des rencontres, ton amour pour l’argent au fil des contrats. Du guerrier il ne reste qu’un chasseur, du gamin naïf il ne reste qu’un homme pragmatique. Mais sous ton armure marquée par les coups, tu gardes cette rancœur et ce besoin de vengeance qui t’as toujours animé, ceux-là même que tu cherches désespérément à assouvir en neutralisant les nuisibles d’un coup de blaster ou de tes coups de poing…

Que pensiez-vous de la Nouvelle République avant sa destruction par le Premier Ordre ? Comment avez-vous réagi à sa destruction ? La Nouvelle République n’était qu’une illusion de stabilité et une pâle copie d’un régime qui s’était pourtant déjà montré défaillant. Aussi, elle était destinée à s’effondrer un jour ou l’autre, que ce soit à cause d’une super-arme destructrice ou des politiciens véreux qui auraient fini par la gangréner au fil des années. Sa destruction montre sa faiblesse et sa fragilité, son incapacité à avoir anticipé une telle catastrophe prouve qu’elle n’était pas une solution viable pour la pérennité de l’ordre dans l’univers… Elle ne me manquera pas après sa chute, surtout qu’elle n’a jamais rien représenté d’important à mes yeux durant son apogée.

Pour vous, que représente le Premier Ordre ? Mon père avait l’habitude de me raconter que l’Empire était à la fois l’une des pires choses qui soit arrivé à l’univers mais également la seule entité qui ait pu y apporter de l’ordre et de la discipline : un mal pour un bien ! Aujourd’hui, le Premier Ordre tente de marcher dans les traces de l’Empereur et s’ils espèrent récupérer l’héritage de Palpatine, je ne crois absolument pas en leur croisade ni leur réussite. Au mieux, ils subsisteront un temps avant de s’éteindre comme leur prédécesseur. Au pire, ils comprendront bien vite qu’ils ne sont qu’une piètre imitation du véritable Empire et disparaîtront aussi vite qu’ils sont apparus…

Connaissiez-vous le Général Han Solo, si oui, que pensiez-vous de ce dernier ? Difficile d’oublier l’une des figures les plus emblématiques de ces trente dernières années, surtout lorsque l’on vient d’un milieu comme le mien. Plus qu’un général dans une rébellion chanceuse qui l’a mis sur le devant de la scène, il est avant tout l’un des contrebandiers les plus célèbres et le plus recherchés des temps modernes. Je ne compte plus le nombre de fois où mon père m’a raconté les rencontres qu’il avait eu avec ce vaurien et moi-même ait eu l’opportunité de me frotter à lui, très brièvement dans ma carrière. Est-ce qu’il était à la hauteur de sa réputation ? Oui. Est-ce que sa disparition changera la face de l’univers ? Sans doute pas…

D'après vous, qu'adviendra-t-il de la galaxie après ces récents événements ? La galaxie restera fidèle à elle-même, le théâtre éternel d’une lutte pour un pouvoir éphémère, la succession de régime tentant de dompter l’indomptable. Ces conflits, ces guerres sans fin ne sont qu’une occupation pour quelques puissants egos suffisamment influents pour faire croire à une poignée de débiles que leur idéologie est la meilleure. Ils n’ont pas compris que l’on ne peut rien imposer sans que quelqu’un s’y oppose, ils ne savent pas que le pouvoir ne passe pas forcément par le contrôle absolu. L’histoire est un cycle mais la galaxie perdure, toujours… Tout comme le Soleil Noir.