« Les enfants du sexe faibles qui naissent sous le Soleil Noir se voient imprégnées par le Mal et dans leur cœur ne prospèrent les Ténèbres. Les jeunes filles frappées par la Malédiction du Soleil Noir n’apporteront que le malheur sur leur foyer, elles feront pourrir les récoltes et mourir le bétail, elles ne seront que nuisance pour leur entourage proche et éloigné. Les Maudites ne se complairont que dans la violence et la destruction sans espoir de rédemption et de guérison. Le plus prudent, c’est de les étouffer dans le berceau, quand elles sont encore vulnérables. »




Le Soleil Noir. Sur cette planète archaïque des Mondes Inconnus, il n’y avait nul rapport avec la puissante organisation criminelle, dont les autochtones n’avaient même jamais entendu parler. Le Soleil Noir n’était qu’une simple éclipse pour les habitants du monde civilisé, mais pour ce peuple primitif, la disparition du soleil en plein jour était une véritable petite catastrophe qui ne pouvait qu’affecter ceux qui avait eu le malheur de naître lorsque l’obscurité régnait. Obscurité qui se retrouvait alors dans leur cœur et n’entraînait que désolation.

Au village, on avait vivement décrié la faiblesse des parents qui n’avaient pas tué le bébé quand elle était née. Pour autant, si Azula avait survécu à ses premières heures de vie, elle n’avait jamais été traitée comme une enfant normale. De nature déjà malicieuse et quelque peu sournoise, ses bêtises d’enfants étaient perçues comme de la malfaisance, ses facéties immatures comme des désirs de nuire. Ses frères et sœurs avaient rapidement compris qu’il était facile de pousser Azula comme leurre devant leurs parents lorsqu’ils étaient en colère, lorsque l’un d’eux avaient renversé le lait ou fauté à remplir ses tâches en temps et en heure. Ils ne pensaient pas que c’était grave, tout le monde la blâmait pour tout de toute façon. Et quand les récoltes étaient trop mauvaises et les hivers trop rudes, celle qui voyaient ses parts de nourriture diminuer le plus, c’était Azula.

Quand elle se découvrit le don de faire voler des objets, de les repousser ou les attirer à elle sous le coup de fortes émotions comme la colère, la peur, la tristesse,… Quand on la contrariait, certains juraient même avoir senti le contact de doigts invisible contre leur gorge ou être tombées de manière inexpliquée. Sorcellerie, susurrait-on dans le village du fin fond de la galaxie, là où partout ailleurs on aurait reconnu la Force.

La malédiction était-elle réelle ou la prophétie s’accomplissait-elle parce qu’il y avait des gens pour y croire et s’y conformer ? Toujours est-il que la fillette devint mauvaise, se comportant comme tout le monde attendait qu’elle se comporte. Les jeux d’enfant s’étaient teintés de méchanceté, de rancœur. Elle avait douze ans quand elle commit son dernier méfait de petite fille, certes cruel, poussée à bout par les maltraitances de ses paires. Les pointes dont elle avait fourré les petits pains sans goût qu’elle était supposer préparer pour toute la maisonnée avait eu raison de la patience de ses parents à son égard. Quand on la châtia, Azula hurlait comme une furie et sur le coup de quelque « maléfice », ses pains piégés explosèrent et blessèrent grièvement deux membres de sa fratrie. La jeune fille fut exilée, reconduite aux limites des terres viables avec une escorte, et on n’entendit plus parler d’elle…




Accompagné par un petit escadrons de soldats du Premier Ordre, le Chevalier de Ren atterrit sur la planète qu’on avait sobrement nommée DFX-38, suite de lettres et de chiffres générés aléatoirement sur un ordinateur, car la planète très rarement visitée ne présentait absolument aucun intérêt en terme de ressources en plus d’être éloignée de tout sans que sa position soit pour autant stratégique. Petite, elle se composait principalement de vastes étendues de marais putrides et de hauts plateaux rocheux balayés par des vents mordants. Ça et là se trouvaient des villages éparses peuplés d’autochtones pétris de superstitions stupides, restés à un niveau abyssal sur l’échelle de l’évolution : ils étaient encore persuadés que le travail du métal était la trouvaille la plus avancée et la plus fascinante qui soit. En outre, les vilages paysans semblaient être la cible de raid violents ; sur leur route, ils avaient croisés quelques hameaux réduits en cendres.

Lorsqu’il était arrivé avec son vaisseau et son équipement haute-technologie dans un village un peu plus grand que les autres, les avis étaient partagés : certains pensait qu’il était un dieu, d’autre un démon. Leur babillage ne semblait avoir aucune suite de toute façon. Ils n’étaient visiblement pas au fait de l’existence du reste de la galaxie et les attaques de bandits se mêlaient à des récits de monstres ; croquemitaines, sorcières, mauvaises fées,… Des foutaises d’arriérés. Le récit qui revenait le plus souvent parlait d’une créature qu’ils nommaient « Banshee », au corps totalement noir, aux yeux perçant, vêtue d’os humains et dont le cri tuait sur le coup. Mais le Chevalier n’avait cure des racontars des paysans, il était là pour un artefact et tout indiquait qu’il devait se trouver ici.

Lui et son escadrons s’étaient embourbés dans les marais qui ne semblaient jamais finir. Une partie des soldats qui l’accompagnaient avaient été emportés par les sables mouvants, les animaux sauvages ou les bandits qui rôdaient sur ces terres stériles. Néanmoins, même s’ils avaient essuyé des pertes, le chef de l’expédition les avait impitoyablement écartées de son chemin. Une perturbation dans l’onde croupie attira son attention : non loin se tenait une silhouette voûtée dont les yeux pénétrant se détachaient nettement sur sa peau d’un noir charbonneux, bien plantée sur ses deux jambes. Elle portait une coiffe et une armure faites d’ossements et ses longs cheveux tombaient en mèches crasseuses et emmêlées dans son dos. Le Chevalier de Ren esquissa un sourire amusé. Leur « Banshee » n’était donc qu’une vulgaire bonne femme des marécages. Il dégaina son sabre et l’alluma. Il allait la faire crier. Et c’est ce qu’elle fit. Elle hurla, même. Son cri projeta une violente onde de choc et le Chevalier fut expulsé en arrière, complètement sonné. Si le cri en lui-même n’était pas suffisant, le choc à la tête qu’il prit en heurtant un pan rocheux le fut. En mourant, la dernière image qu’il emporta fut celle de son adversaire qui l’approchait, suivit d’un attroupement de silhouettes boueuses émergées des eaux. Il avait eu tort de la sous-estimer, pensa-t-il, il avait baissé sa garde trop vite. La « Banshee » n’étaient pas un quelconque monstre des marais, c’était bel et bien une femme – certes fangeuse – qui avait une utilisation brute et non-conventionnelle de la Force, faute de maître probablement. Il sentit son sabre lui glisser des doigts, avant de rendre son dernier souffle.






Lorsque la jeune femme ouvrit les yeux, ce fut sur un décor froid et aseptisé bien loin des grottes et des maisons en bois et torchis qui lui étaient familières. Elle se redressa difficilement, l’air hagard. Sa peau avait été lavée du mélange de suie, de charbon et de terre noire dont elle s’enduisait – à la fois pour se prévenir des piqûres d’insectes et pour impressionner ses adversaires, révélant un tatouage représentant un soleil noir à la base de sa nuque – et sa tignasse avait été coupée et son crâne rasé. On lui avait également retiré ses guenilles et ses protection en os pour lui passer une simple blouse. Elle était sur un lit spartiate, dans une petite pièce bardée de tout un attirail technologique, sans fenêtre, seulement une porte hermétiquement fermée. Le déroulement des événements lui revenait peu à peu : quelques temps après qu’elle eut vaincu l’homme au drôle de sabre de feu, d’autres vinrent. Ils étaient deux cette fois et le combat fut de courte durée… mais à son désavantage. Elle avait rapidement été maîtrisée et assommée. Même si elle avait pu les surprendre avec son cri, ça n’avait pas été suffisant, très loin de là.

La porte s’ouvrit brutalement et la jeune femme sursauta, apparemment prête à sauter sur le nouveau venu. C’était un des deux hommes qui l’avait maîtrisée – elle reconnaissait la tenue – mais il ne portait pas son masque cette fois. Ils se dévisagèrent. L’homme devait avoir à peu près son âge et son visage était empreint d’une austère sévérité, digne et implacable. Il prit la parole le premier :

« Que dirais-tu de recommencer à zéro ? D’embrasser une nouvelle vie ? Une vie qui n’implique pas de vivre dans la boue à la tête d’une poignée de bandits de grand chemin. Je peux – nous pouvons – te garantir davantage qu’une existence vaine et triviale pourvu que tu t’en montres digne, Azula. »






Elle était loin l’enfant maudite, la sorcière des marais. C’était une nouvelle femme qui se dressait dans ses noirs atours, pleinement dédiée à la cause du Premier Ordre. Azula avait donné corps et âme pour le régime qui l’avait accueillit et qui lui avait offert l’opportunité de toute une vie, pour les Chevalier de Ren dont, sans le savoir, elle avait tué un des membres, pouvant prétendre ainsi à prendre sa place après que Kylo Ren et Gal’aad Serke aient débarqué sur sa planète et l’ait trouvée. Gal’aad lui avait trouvé du potentiel et convaincu le chef de son ordre de la ramener avec eux afin de la former si elle se montrait coopérative. Et elle l’avait été. Azula avait enduré sa formation – dure, cruelle – sans broncher, sans jamais se plaindre. Elle en voulait, Azula, elle voulait se hisser au plus haut, avide de reconnaissance et de perfection. Ce qu’elle pensait être de la magie liée à sa prétendue malédiction, son « cri de la Banshee » était en vérité une façon indisciplinée d’utiliser la Force ; Force qu’elle s’était attelée à dompter sous la tutelle avisée de ses professeurs. Elle avait appris à se battre autrement que comme une sauvageonne, ayant déjà pour elle une condition physique athlétique. Elle avait appris à se battre avec le sabre qu’elle avait dérobé avec le Chevalier de Ren qu’elle avait assassiné. Azula avait même appris à lire et écrire les rudiments basiques de la langue commune, elle qui avait grandie illettrée. Encore aujourd’hui, c’était un détail dont elle avait honte et qu’elle faisait tout pour cacher.

Elle était une Chevalier de Ren à part entière depuis quelques temps à présent. Mais une vieille rancune restait tapie dans le fond de son esprit, un désir de vengeance qui murmurait à son oreille. Cela faisait quatorze ans qu’elle avait été exilée des terres où elle était née et quatorze ans qu’elle ruminait. Son plan d’origine était de revenir le mettre à feu et à sang avec sa troupe de brigands quand elle serait assez conséquente, mais sa vie avait pris une autre tournure… Plus intéressante. Azula était toujours déterminée à détruire son village, plus spécifiquement sa famille et les quatre hommes qui l’avait menée à la frontière des terres connues, qui ne s’étaient pas juste contentée de l’exiler proprement.

Il était plus que temps pour elle de revenir à ses origines, forte de ses nouvelles aptitudes, afin de leur rendre la monnaie de leur pièce…