La situation ne lui plaît pas, depuis le départ. Mais elle lui plait encore moins depuis la petite réunion improvisée du Premier Ordre. Revan bouillonne, partagée entre une ravageuse colère, une envie de tout saccager et au contraire un profond dégoût. Dégout face à ceux qui ont osé trahir avec autant de facilité. Ceux qui ont osés s’opposer à l’ordre établi, même juste sur le papier. Colère aussi. Mélange de sentiments qui la tourmentent. Alors face à tout ça, le besoin d’une seule chose, ou plutôt d’une seule personne, se fait sentir. Gal’aad. Le besoin d’être avec lui, de lui poser ses questions, de lui exposer ses doutes, aussi. Elle n’a pas mille réponses à lui quémander, puisqu’elle sait parfaitement que lui même est loin de les détenir toutes. Que lui même dois en partie être aussi tourmenté qu’elle par la situation actuelle. Alors elle s’échappe de ses quartiers pour rejoindre celui du maître des Ren. Elle arpente les couloirs d’un pas léger, telle une ombre que beaucoup observent évoluer du coin de l’œil. Comme intimidés.
Elle s’invite dans la chambre de Gal’aad sans frapper. Elle s’introduit dans son monde avec une déconcertante facilité, parce qu’elle a toujours fait ainsi. Parce qu’entre eux, il n’est pas question d’une pudeur affective quelconque. Que le lien est là, palpable et fort, bien que gardé jalousement entre eux et Kylo Ren. L’infernal trio depuis bien des années. Pourtant elle sait, qu’elle n’est pas toujours la bienvenue. Qu’il suffit d’une saute d’humeur du brun pour lui barrer la route et l’empêcher d’approcher. Mais Revan ne baisse pas les bras, jamais. Certainement pas lorsqu’il s’agit de Gal’aad, pour qui elle donnerait, sans hésiter, sa propre vie.

Pourtant, à peine le seuil de la porte franchi, la jeune femme se fait dépouiller de son sabre, qui atterrit dans la main de Gal’aad. Brandis sous sa gorge, elle ne bouge plus. Ne fais aucun geste supplémentaire, pouvant sentir la légère chaleur du sabre caresser sa peau. Tout proche, face à lui et sa haute stature, elle l’observe sans un mot. Elle n’a pas peur. Elle n’a jamais peur, face à lui, parce qu’elle sait que si elle doit mourir, un jour, autant que cela soit de sa main à lui. Après un dernier regard, ou une dernière étreinte. Après une parole murmurée ou simplement offerte par la Force. « Je peux sentir ta frustration » Déclare t-elle simplement, soulignant l’évidence même. « Je le suis autant que toi, tu sais » Frustrée, elle aussi. Impuissante face à une situation qui glisse entre leur doigt comme du sable fin, impossible à retenir. Elle voudrait, elle même, contacter Kylo, contacter les autres, s’en remettre à l’autorité suprême. Condamner les traîtres dans une purge, certainement sanglante. Mais Revan n’est pas connu pour sa candeur ou sa pitié. Bien au contraire.

Gal’aad renchérit, avec une colère qui s’amplifie davantage et il ne suffit que du ton de sa voix pour faire comprendre à Revan qu’il va devenir fou, loin de tous, coupé du monde. Loin du véritable maître des Ren, surtout. Celui qu’il considère comme son frère. Celui qu’elle même, peut considérer de la sorte, bien qu’en étant un brin moins proche. « Cela va finir par s’arranger » Dit-elle simplement, tâchant d’être convaincante. Elle essaye de s’en convaincre elle même, d’ailleurs. Mais le poing rageur que Gal’aad abat dans le mur, plier un peu de métal, épousant parfaitement la forme du coup, lui fait comprendre qu’il est littéralement en train de craquer. « Je sais… » Murmure t-elle, d’une voix douce, comprenant la souffrance du manque, la peur de l’imprévisible, surtout face au côté calculateur de Thrawn.
La main de la jeune femme frôle les doigts de celle libre de Gal’aad. Puis doucement, se fraye un passage jusqu’à la poignée de son sabre. Jusqu’à la main qu’il appose dessus, brandissant la double lame. Avec une extrême lenteur, et une douceur certainement insoupçonnée, elle l’aide à abaisser sa garde. À la libérer d’une possible étreinte mortelle. « Je suis sure qu’il va bien, tu sais qu’il est débrouillard et bien plus malin qu’il aime le laisser paraître » Elle pourrait esquisser l’ombre d’un sourire, si elle en était capable. Mais le fait est qu’elle sait que Kylo aime se faire présumer moins dangereux qu’il ne l’est vraiment. Le pouvoir d’être sous-estimé est puissant.

Récupérant son sabre, elle le pose sur une petite commode contre le mur, elle sait qu’elle n’a pas besoin de s’en équiper davantage. Que même armée, Gal’aad lui opposerait une farouche résistance. Faisant un pas de plus vers lui, elle vient saisir son visage en coupe, dans ses mains, plante son regard dans le sien, d’abord dans un mot. Dans un silence qui les berce. Elle peut sentir la vitesse des battements de son cœur. Son torse se soulever sous des respirations puissantes et guidées par la colère. « Patience… Tu sais que nous devons rester lucide face à tous les potentiels ennemis qui nous avons en plus, à présent. J’ai besoin de toi Gal. J’ai besoin de toi plus que jamais »

Revan peut sentir la frustration habiter le maître des Ren. Une colère destructrice, prête à ravager chaque centimètre carré de cette pièce. Prête à lui faire du mal, à elle aussi. Mais la jeune femme ne scille pas, ne scille jamais. Pour elle, la violence fait partie de sa vie, la mort n’est qu’une finalité logique à son existence. Elle ne craint ni les blessures, ni sa propre chute. Elle ne l’attend pas non plus, elle ne tend pas la gorge face au poignard mais elle sait que tôt ou tard, son sort sera scellé. Qu’importe l’adversaire, même si elle espère avoir l’honneur de mourir en héros, en martyr, peut être. De rester, quelque part, un nom que certains murmureront. Que son sacrifice soit utile ou que simplement, celui qui lui ôtera la vie sera à la hauteur de son existence. Un ennemi qui, bien que point forcément honorable, aura la puissance d’avoir piétiné sa maigre vie. Elle ne sait si sa mort sera rapide, ou lente. Si elle souffrira ou au contraire, s’apaisera d’une dernière vision plus douce, comme les traits de Gal’aad, ou le souvenir flou de ses géniteurs et parents.

« Ta place est ici, avec nous, avec moi » Dit-elle simplement, d’un ton neutre et placide. Elle ne cherche pas à le convertir à ses idées, elle cherche simplement à lui faire comprendre. Revan n’est jamais mielleuse, n’est jamais manipulatrice. Sa franchise la caractérise, de même que sa naïveté face à bien des comportements humains qu’elle ne saisit pas. Son innocence n’est présente que parce qu’elle n’a été élevée que dans un seul but, être le monstre de violence et de sang qu’elle est aujourd’hui. Celui là même qui communie avec la noirceur de Gal’aad. Avec la sa colère et son désir de vengeance. Responsabiliser quelqu’un, ou quelque chose, pour cette situation sans pareille. Elle se cale sur sa respiration, elle se concentre sur son ressenti. Elle absorbe chacune de ses sensations comme une éponge. Elle récupère son sabre et demeure aussi droite et impérieuse qu’auparavant. Pourtant, rien d’hautain, rien de méprisant. Simplement celle qu’elle est, sur d’elle et de ses capacités, neutre et imperturbable. Elle veut être la force tranquille qui canalisera les sensations de celui, lui faisant face. De l’homme qui perd pied, du monstre, assoiffé de colère et d’agressivité, juste pour calmer ses sens. Comme un besoin dévorant d’une noirceur bien ancrée. « Rien n’est jamais juste » Elle l’a apprit, elle l’a ressenti, elle l’a vécu. La justice n’est qu’une notion vague, qui chancelle en fonction des principes de chacun. Qui varie, suivant la loyauté et la morale, pourtant, malgré son pragmatisme, elle ne peut qu’approuver les dires du maître des Ren.
Revan ne sursaute pas, lorsque la commode se brise et son sabre chute, avec elle. Elle se crispe légèrement, une fraction de seconde, prête à encaisser l’éventuelle agressivité de Gal’aad à son égard. Le besoin de passer ses nerfs sur elle. Le besoin de laisser exploser sa frustration. Mais même si là, il la saisit à la gorge, elle ne se défendra pas. Elle posera ses mains sur les siennes et soutiendra son regard. Elle sera prête à encaisser son assaut. Parce que Revan est toujours prête à affronter son destin, aussi injuste soit-il.

Pourtant, ce sont les larmes qui viennent souiller le visage de l’homme. Comme une complainte silencieuse qu’il ne réalise pas lui même. Elle le fixe alors, ses yeux clairs baignant dans les siens, lui offrant une tendresse qu’elle-même ne soupçonne pas. Dont elle ne se sent pas réellement capable. Qu’elle arrive pourtant à lui offrir, à lui. Elle le voit sourire et elle sait, en cet instant. Elle sait que son esprit divague vers quelques songes qu’elle ne peut percevoir. Qu’à travers sa présence, son contact de ses doigts sur sa peau, sur sa joue, elle lui a offert autre chose. Peut être est-ce seulement naïf, mais Revan a toujours agit à l’instinct avec Gal’aad.
Elle ne relève pourtant pas lorsqu’il parle d’Hux, arquant simplement un sourcil perplexe. Elle ne veut pas gâcher le peu de quiétude qu’il vient d’embrasser.

« Je touche ton corps, mais je veux toucher ton esprit » Lâche t-elle, soulignant comme une évidence. « J’ai besoin de toi dans ton entièreté » Renchérit-elle ensuite, pour renforcer ses dires. Le maître s’exprime de nouveau et le chevalier l’écoute, sagement, en maintenant pourtant ce contact qui brise la simple hiérarchie formelle entre eux. « Je connais tes ordres, oui. Et tu sais également que jamais je ne ferais un geste qui irait à l’encontre de tes directives » Ou presque. Rien contre lui, lorsque cela concerne une tierce personne, en tout cas. Leur relation à eux, est privée, est unique, est à part, des simples devoirs de chevalier et de maître. Elle sait qu’envers lui, elle se permet des gestes ou paroles qu’elle n’offrirait pas à un public. Qu’elle ne prononcerait pas en présence d’autrui. Revan le respecte autant qu’elle lui est loyale et fidèle.

Jurer fidélité, d’ailleurs, une nouvelle fois, voilà ce qu’il lui demande, alors que sa main glisse contre la joue de la jeune femme qui soutient son regard et apprécie la tendresse soudaine. « Ai-je besoin de paroles pour te faire comprendre ma dévotion ? Crois-tu réellement que plier l’échine, ici, dans cette chambre à l’abri de tous, t’offrira plus que ce que je ne t’ai déjà donné ? Que je ne te donne chaque jour, y comprit en cet instant ? » Questionne-t-elle, neutre et pourtant sincère. Sa main libre vient effleurer celle du chevalier, pendante, le long de son corps, pour finalement la saisir, délicatement. « Repose-toi sur moi, ce soir. Je suis ton poing lorsque tu triomphes mais surtout l’épaule sur laquelle t’appuyer, lorsque tu souffres, lorsque tu tombes » Et délicatement de son pouce sur sa joue, elle caresse sa peau, pour lui faire comprendre, à travers ce geste léger mais bien présent dans un but.

L’honneur brûle dans les veines de la jeune femme, comme une lave en ébullition. L’honneur d’être celle qu’elle est aujourd’hui. L’honneur de servir, l’honneur de croire en la force du Premier Ordre et de lui être dévoué. Revan n’est pas juste une femme de principes et de convictions, au delà de ça, c’est sa loyauté qui prime, pour les têtes pensantes du régime qu’elle soutient. Sa loyauté envers ceux qui lui sont chers, comme Gal’aad. Comme celui là même, habité par quelques démons qu’elle peut lire au fond de ses yeux. Le tourbillon d’émotions, contradictoires, parfois. Elle ne se targue pas de pouvoir le contrôler, d’avoir sur lui un pouvoir ultime. Elle n’est là qu’en soutient, qu’en renfort. Elle n’est là que parce qu’elle ressent pour lui des choses inexplicables. Des sentiments qu’elle-même, n’est pas sûre de connaître et de comprendre. Mais les sensations sont là, au fond d’elle et la guide. Elle ne suit que son instinct, quant à la façon d’agir face à l’homme. La candeur de ses gestes ou même la douceur de son timbre de voix. « Tu as raison » Avoue t-elle simplement, parce qu’elle mesure la justesse de ses paroles. Son honneur la pousse souvent à ne pas plier l’échine, pourtant, elle sait qu’ici, elle peut. Que face à lui, elle le peut. Qu’il n’y a pas de notion de domination pure ou encore d’humiliation. Qu’entre eux, jamais une telle chose ne sera de mise. Même si nombreux sont parfois les non-dits, communiquant juste par quelques sensations et une connexion invisible. Revan a beau avoir un certain orgueil, elle sait aussi, qu’elle est en apprentissage. Qu’elle sera en apprentissage toute sa vie, ou presque. Qu’elle n’est point maître mais bel et bien chevalier et que pour cela, elle se doit de faire preuve d’humilité. Reconnaître ses faiblesses, les accepter et les combattre. S’endurcir. Résister. Contrer.

« Je comprends, oui. Nos serments ne sont pas là juste pour un public et quelques apparences, ils sont véritablement importants et doivent l’être qu’importe la situation ou l’interlocuteur » Conclu t-elle, comme pour répondre à la leçon qu’il vient de lui inculquer. Comme pour avouer à haute voix qu’elle comprend son raisonnement et qu’elle l’entend. Qu’elle l’enregistre, parce que Revan a toujours écouté Gal’aad.
Le contact physique se prolonge entre eux, parce qu’aucun ne veut le rompre. Reculer et se soustraire à la brève étreinte. Les yeux de Revan sont plongés dans les prunelles azur du maître des Ren, tandis que le silence s’installe de nouveau, un instant. Des silences que certains peuvent trouver gênants mais qui, entre eux, sont monnaie courante. Ils ne sont guère bavards, ils ne parlent pas pour ne rien dire. Tout doit avoir un sens. Tout mot doit être mesuré et pensé, même si parfois, la tirade franchie les lèvres sous le coup de l’impulsivité, de la colère, ou d’un tout autre sentiment. Ils en demeurent humains, même si beaucoup ne voudraient voir en eux que des monstres vengeurs et violents. Mais ici, dans l’intimité de cette cabine, il ne fait aucun doute quant à l’humanité qui les compose.

Gal’aad semble s’apaiser. Aucun cri, aucun geste violent à l’égard de celle qui se tient face à lui. Le silence n’est brisé que par quelques bruits extérieurs et plus largement, par leurs respirations. Les mains de la jeune femme l’entourent, lorsqu’il vient se lover contre elle. Ses doigts glissent contre la chevelure sombre, tandis que son autre main se cale entre ses omoplates. Le contact est doux. Calmer la douleur, apaiser les maux. Mais finalement, l’homme se redresse et la surplombe de sa haute stature, quelques instants plus tard. Le regard se lève vers lui, tandis qu’il la domine d’une bonne dizaine de centimètres. Il recule alors davantage, pour s’asseoir au bord du lit et s’exprimer de nouveau. Son geste, explicite qu’elle doit lui servir du vin, est rapidement compris par celle qui opine du chef et se déplace d’une démarche presque féline jusqu’à une petite table où un plateau est disposé. Ouvrant la carafe, elle entreprend de lui servir un verre, tandis que son écoute lui est entièrement octroyée.

Ombre d’un sourire qui glisse sur ses lèvres alors qu’elle se déplace jusqu’au lit de Gal’aad pour prendre place à ses côtés, après lui avoir tendu le verre rempli du précieux liquide carmin. « Je ne puis parler pour tous, mais me concernant, tu sais que je te respecte autant que je t’aime. » Déclare-t-elle comme énonçant un fait, même si la notion d’amour lui paraît abstraite, puis qu’elle ne l’a jamais réellement vécu, ou encore compris. Pourtant elle sait tenir à Gal’aad bien plus qu’à n’importe qui, alors, cela doit être ça, finalement. Bien qu’elle possède envers lui une certaine réserve, il reste le maître des Chevaliers de Ren et jamais elle ne se permettra un geste de trop, qu’il n’aura pas initié. « Bien sur que tu as des responsabilités, nous en avons tous conscience et personne ne remet en doute ton autorité. Peut être ne te juges-tu pas digne de ce poste, aujourd’hui, au milieu des doutes et des rebellions, mais tu l’es. Kylo n’aura pas pu avoir quelqu’un de plus compétent que toi. Tu sais qu’il te fait confiance autant que je peux te faire confiance. Je place ma vie entre tes mains Gal’aad » Sa main vient se poser sur celle, libre, du brun. « Une erreur peut toujours couter cher, quelle que soit la personne qui en est responsable. Un excès de témérité, une erreur de ma part, peut me couter cher aussi, alors que tu n’y seras pour rien. Je peux mourir en mission de mon propre chef, pour une mauvaise décision ou un combat perdu. Je sais ce que je risque. Nous savons tous ce que nous risquons. Nous sommes tes chevaliers, ta responsabilité mais surtout, ceux là pour t’épauler et te soutenir. En ces temps troubles, plus que jamais ».

Lui sourire. Oui, peut-être que c’est ce qui se fait, en ces instants-là. Ces attitudes humaines, pleines de compassions et de tendresses. Toute cette soit disant normalité que Revan n’a jamais vraiment appréhendée. Qu’elle n’appréhendera certainement jamais. Elle non plus, ne sourit pas. Au lieu de cela, elle vient s’asseoir à côté du maître des chevaliers.
Elle observe la coupe choir, puis se briser sur le sol. Son visage en demeure impassible, pourtant, rapidement sa tête se tourne vers Gal’aad, instinctivement. Ses gestes. Ses yeux clairs se perdent en contemplation des traits du visage de celui qui lui fait face. Ses mains demeurent devant elle, posées sur ses chevilles. Elle ferme les yeux, elle se repaît de l’instant, comme d’un baume sur son corps souvent éprouvé. Sensation hors du temps, où elle sait pouvoir se laisser aller à une forme d’abandon. Les barrières hautaines n’existent plus, ici. La carapace de fer n’est qu’une légende. Pourtant aussitôt un pied posé à l’extérieur de cette cabine, Revan sait qu’elle affublera de nouveau son masque de noirceur et d’arrogance. Simplement parce que c’est ainsi qu’elle affronte le monde.

Elle rouvre les yeux lorsqu’il appuie sur une vérité. Le fait que oui, elle ne retourne jamais les questions, ou presque. Est-ce là une forme de pudeur ? Un quelque chose passé sous silence ? Un respect de l’autorité ? Bien sur, Gal’aad demeure le maître des chevaliers, mais aussi celui qu’elle connaît depuis toujours. Celui qui aurait pu la tuer, à l’époque, mais qui l’a juste mise hors combat. Celui à qui elle se sent lié, par un attachement silencieux, presque tabou, mais bien présent. « C’est vrai » Dit-elle simplement, appuyant ses dires. L’ombre d’un sourire passe sur le visage de Revan, alors que Gal’aad avoue ne pas comprendre, si elle essaye de communiquer d’une façon ou d’une autre. « Non je crois qu’elles ne sont simplement pas présentes… » Dit-elle évasive, abaissant un instant le regard vers ses mains, jouant avec les lacets sombres de ses bottes.
Le brun se laisse tomber en arrière, dans un soupir et Revan ne relève pas la tête de suite. Lorsqu’elle le fait, c’est en écoutant les dires de l'homme à ses côtés. Le regard perdu dans le vide, devant elle, les yeux songeurs. Elle pense, Revan, elle se demande quel est son but, parfois, autre que se battre. Doit-elle se construire une vie autre que celle qu’elle dévoue à d’autres ? Au Premier Ordre. N’est-elle rien d’autre qu’un chevalier prêt à mourir au combat pour la gloire d’un empire ?

Aussi, elle se laisse également tomber en arrière, les genoux légèrement repliés vers elle. Elle fixe le plafond d’un gris froid et métallique. Les grands espaces lui manquent. Exploratrice, aventureuse. Revan aime découvrir, au gré des missions. Curieuse du monde et de ses mystères, adeptes de légendes et d’histoires méconnues. Elle s’abandonne à des lectures de récits passés, parfois, dans l’intimité de sa cabine, chambre, couchette, qu’importe le lieu. La chose est certainement enfantine, à l’image de cette vie innocente qu’elle n’a pas eue et n’aura jamais. Songeuse, laissant un moment de flottement, elle finit par briser le silence, tout en fixant toujours le plafond. Elle aimerait pouvoir voir les étoiles, depuis ce lit, là, maintenant. « Crois-tu que cela est notre seul rôle ? Nous battre, jusqu’à expier notre dernier souffle. Nombreux sont ceux que je remarque aimer, rêver, tenir à quelqu’un ou à quelque chose au point de remettre en question leur existence. Je ne comprends pas… » Avoue t-elle, évasive. Le visage se tourne alors légèrement vers l’homme à ses côtés. Elle ne sait pas s’il sera en mesure de lui apporter les réponses qu’elle recherche, sans même savoir à quoi s’attendre. Revan est fait de paradoxes entre une parfaite maîtrise du domaine martial, du combat et de ses méandres et une naïveté déroutante pour des choses simples de la vie, comme les sentiments, l’attachement réel, l’amour ou encore plus largement les relations humaines. « Est-ce que tenir à toi fait de moi un mauvais chevalier ? » Oui, parce que s’il y a bien une chose dont Revan est sure et certaine, c’est son attachement pour Gal’aad, qui demeure une des rares personnes dans cette galaxie, pour qui elle se mettrait en péril. Kylo en fait partie également, dans une autre mesure. Mais parfois, lorsque ses pensées divergent, elle se demande, si elle devrait laisser libre court à ses pulsions ou au contraire les refréner. Si elle se doit d’être le sabre de l’Ordre au point d’en oublier l’humanité qu’il lui reste, ou si au contraire, elle peut embrasser autre chose que la violence pure et simple de sa vie.

Il regarda Revan, chercha la douleur en elle, la douleur qu'il lui causait mais sembla ne rien trouver. Quelque chose en Gal'aad était satisfait, apaisé, car la question de la jeune femme était soudain comme un nouveau serment d'allégeance. Un serment qu'il acceptait encore, et Revan n'avait qu'un seul maître: lui. De telles pensées n'étaient pas bien, sauf que l'ombre de Snoke ne pouvait les atteindre, pas ici. Gal'aad restait seul et unique maître des chevaliers, bien qu'il ne donnât que trop peu d'ordres au fond.

”Si tu tiens à moi en tant que chef, alors ceci est une bonne chose car tu ne remettras en question ni mes actes, ni mes mots, si tu tiens à moi autrement, je ne sais pas? “

Pourtant, Revan était ainsi qu'il avait voulu qu'elle soit : lorsque changements en elle il y avait, lorsque changements en elle, elle autorisait, ceux-ci demeuraient subtils, ne changeaient en rien sa nature profonde. Revan, pilier sombre et calme de vérité....

”Que suis-je, Revan, si je ne suis pas ton maître, suis-je ton coeur de guerrier? Si quelqu'un m'arrache à toi, cela sera comme une blessure béante et mortelle en toi, alors que pourtant tu survivras?”

L'éclat d'un rêve se dessina sur le contour de ses lèvres à lui, ses yeux étaient brumes un peu, parfois un double soleil y dansait, un crépuscule avant la nuit ou bien les dernières braises d'un incendie. Il respirait calmement, Gal'aad, une respiration sourde et puissante, pareille à celle d'un animal apaisé.

”Nous ne nous découvrons que par nos blessures, nos manières de saigner.... Tant que tu ne souffriras pas de moi, de mon absence ou de ma perte, des blessures que moi-même je peux avoir, alors tu ne sauras pas si cette affection fait de toi un bon ou un mauvais chevalier. C'est la réponse à ta question, et le plus ironique est que cette réponse tu me l'as toi-même apporté quelques instants plus tôt car si tu es mon chevalier, je reste celui de Kylo....”

Et qu'était Revan sinon une fleur qu'il jetait au bûcher? Peu importe les épines, peu importe le parfum ou le poison, les flammes gagnaient, gagneraient toujours.
Parfois, avant le sommeil profond, quand ne restaient que quelques secondes trop courtes, Gal'aad s'étouffait sur des pensées étrange, et son ombre ne différait point alors de celle de Kylo Ren : je ne marche pas à travers le ciel, je l'empoisonne.
Parce qu'ils étaient allés d'un bout à l'autre de l'univers déjà, parce que marcher encore serait fuir et qu'eux, ils ne fuyaient pas.

”Nos passions peuvent exister, doivent exister mais ne doivent nous déséquilibrer. Regarde-nous, Revan, nous ne sommes pas les monstres sans coeur que l'on décrit, toi et moi. Nos coeurs sont différents bien sûr, mais nous aimons, nous ne connaissons juste pas le mot exact pour le dire, ni même le sentiment. Nous ne voulons que peu de choses de la chair aussi, je suppose que c'est également pour cela que nous ne sommes pas des sadiques, pourtant une caresse peut nous satisfaire, ou bien une ombre simplement, l'imaginer, comme tu es heureuse d'imaginer mes sourires pour savoir que je suis satisfait.”

Les doigts s'entrelaçaient, ceux de l'homme, ceux de la femme, il y avait la chair, il y avait le métal aussi, et puis le songe d'une douleur, car ce qu'ils éprouvaient allaient toujours au delà des simples passions, et que les passions n'étaient rien d'autres que des souffrances.

”Nous “aimons” d'une bien étrange manière, je suppose cependant que nos sentiments nous trahissent autrement que pour tous les autres: nous ne tombons pas dans les mêmes pièges, les mêmes travers, en cela nous sommes dangereux pour nous mêmes car nous ne pouvons nous fier à quiconque....”

Et, Gal'aad comprit alors qu'il pouvait avoir le coeur arraché sans même le savoir ou le comprendre. Parce que ce qui le reliait à Sihaya était un chaos, non une affection véritable. L'affection ne pouvait venir comme cela, de manière naturelle, pas avec lui. Quelque chose naîtrait de ce chaos, des regards durs et des yeux tristes, des gestes condamnés aussi, et ils pouvaient mourir de cela avant même de comprendre qu'ils avaient aimé et comment ils avaient aimé. Avec douleur, Gal'aad se pencha alors, embrassa la tempe de la femme à ses côtés, comme une soeur de plus. Puisque personne ne pouvait prétendre à une véritable amitié à ses côtés, puisqu'il ne pouvait y avoir que des frères et des soeurs, parfois qu'il aimait, parfois qu'il haïssait....

”Ne dis à personne que tu aimes, Revan, pas même à moi et surtout pas à ce coeur que tu as dans ta poitrine. Cela fait trop mal et je ne sais si le prix à payer peut nous satisfaire....”

La question est sincère, les réflexions intenses. Pourtant, Revan demeure toujours imperturbable. Seules quelques colères viennent parfois flamber dans ses yeux, attisant le brasier de sa flamme guerrière. Les relents belliqueux qui transperce sa placidité. Bien sur que tenir à Gal’aad en temps que chef, respecter son autorité et ses décisions est une bonne chose. C’est ce qui fédère les chevaliers entre eux. Qui forge l’unité de groupe et la fiabilité d’une telle élite au sein du Premier Ordre. Aussi, la jeune femme ne réplique rien, elle observe le plafond, perdu dans ses songes, le regard dans le vide. Pourtant, elle écoute chaque parole de Gal’aad, avec une attention particulière. Elle analyse chacune de ses réponses, notamment celles qui font naître en elle de nouvelles réflexions. Oui, est-ce que si quelqu’un fait réellement du mal à Gal’aad, de nouveau, ou pire, de manière définitive, en sera-t-elle affligée ? Son premier instinct l’incite à répondre oui. Oui, cela chamboulerai son être, son âme aussi, certainement, pourtant, la barrière qui demeure l’empêcherait d’expliciter outre mesure ce ressenti là. Une certaine pudeur chez Revan pour tout ce qui résulte des sentiments. Comme si déjà, elle sait qu’elle doit se protéger de ceux qui se jetterai sur ses faiblesses comme des loups affamés. Nombreux sont les ennemis, mais rares sont les véritables alliés. Les Ren ont beau ne pas être en simple compétition, chaque jour, comme ce qu’elle a pu vivre en tant qu’Ombre de Snoke, elle sait qu’elle n’en est pas non plus protéger, sereine, au milieu de ses frères et sœurs d’armes. Que les traitres sont partout, surtout depuis les divergences grondant au sein du Premier Ordre.

« Oui, tes blessures sont les miennes. J’ai ressenti ta douleur, pour ton bras. J’ai ressenti ta peine, ton affliction. J’ai embrassé cette douleur comme étant la mienne. Je voulais comprendre, je voulais partager ton fardeau. Je voulais être là. J’ai compris à quel point tu étais important pour moi, à quel point tu l’es encore, aujourd’hui. » Avoue-t-elle, sans pudeur. Oui, elle avait crié de douleur, en comprenant l’ampleur de la perturbation dans la force. La violence du coup de sabre et le membre amputé. Elle en avait tremblé, presque chancelé, en pleine mission dans un désert éloigné. Mais cette douleur là, au lieu de la repousser, elle l’avait embrassé à pleine bouche, parce qu’elle était celle de Gal’aad. Et qu’elle voulait le comprendre autant dans les pires que les meilleurs moments. Et elle avait été là, même s’il l’avait rejeté, plusieurs fois, au départ. Par fierté, par colère, par honneur, aussi. Mais Revan ne laisse en aucun cas les comportements des uns et des autres lui barrer la route. Ou encore la saboter. Elle surmonte, elle se relève, la tête haute, la fierté au fond des yeux. Honneur inébranlable.

Elle tourne le regard vers l’homme à ses côtés, alors que les doigts s’entrelacent doucement. Elle apprécie ce contact, la chaleur de la peau, la fraicheur du métal. Mais ressentir le pouls ou le sang circuler ne fait pas tout. Elle ne cherche pas l’humanité de la chair, mais bel et bien la force du lien. « Le prix à payer sera trop lourd de toute façon. Je ne peux aller à l’encontre de mes sentiments, de mon ressenti, mais je saurai ne pas en faire une faiblesse. » Dit-elle pour acquiescer ses paroles. « Je sais que jamais je n’aurais le degré de normalité que beaucoup attendent, mais qu’importe. Je ne sais pas moi même à quoi m’attendre. Je n’ai pas d’espérances. La perspective d’un geste inconnu… Me plaira t-il ? Ou au contraire, me fera t-il fuir ? » La chair, ses plaisirs, dont Gal’aad évoque le fait qu’ils ne veulent que peu de cela. Revan partage également cet avis, simplement parce que là où la plupart des gens y voient un plaisir évident, elle, ne se tient droite que face à l’inconnu. À des notions qui lui échappe. Pourtant, le baiser sur sa tempe, la chaleur se dégageant de Gal’aad et la douceur du geste, cela lui parle. Fait écho à ses envies, au fond de ses trippes. Elle relève les yeux vers lui. « Je n’ai qu’une seule certitude, je ne mettrais pas en péril mon honneur ou ma loyauté pour quelques sentiments inexplicables, ou encore pour l’envie viscérale d’une étreinte. » Profonde sincérité au creux de sa gorge. Revan sait que sa vie se destine à une certaine solitude et à de multiples déceptions. Que la vie à deux, ou encore la perspective d’une famille ne sera jamais sienne. Elle n’en est pas malheureuse. Elle n’en est pas anéanti. Elle en est indifférente. Simplement parce qu’elle sait que c’est une chose sur laquelle elle n’aura jamais d’influence. Que ses choix de vie ne lui appartiennent plus et qu’elle a embrassé une destinée faite de chaos. « Mais pour renchérir sur tes paroles précédentes, il est vrai que j’aime imaginer tes sourires… » Dit-elle, plus évasive, plus légère, alors que ses doigts viennent effleurer la joue de Gal’aad alors que ses lippes esquissent l’ombre d’un sourire. Oui, elle est forcé de reconnaître qu’au delà de son éternel stoïcisme, il demeure une affection profonde pour le maître des Ren. Une affection au delà du respect de la hiérarchie. Un quelque chose dont elle ne veut pas se défaire, parce que parfois, au milieu du noir, tâché du carmin des combats, elle voit en ses yeux, l’étincelle d’une force qu’elle a toujours admiré.