Avez-vous déjà eut l'impression d'étouffer sans comprendre pourquoi ? Avez-vous déjà assistée de manière impuissante à une scène horrifiante ? Si c'est le cas, vous devez exactement comprendre ce qu'il était entrain d'arriver à Azra. Impuissante, elle assistait à l'extermination de ses compagnons, de ses frères d'armes et de ses alliés. Elle ne pouvait rien faire, pourquoi ne pouvait-elle rien faire ? Parce que la peur l'avait clouée sur place ? Non. Azra n'était pas du genre à se laisser impressionner de cette manière, c'était une femme courageuse. Disons plutôt que c'était l'abattement qui l'avait cloué sur place. Elle ne savait pas quoi faire, elle ne savait pas comment renverser la situation en la faveur de la résistance. Pourtant, en temps que bonne stratège, elle aurait très bien pu renverser la situation mais là.. Même Azra savait que c'était peine perdue. Pourtant, malgré toute l'horreur de la scène, la brune avait une impression de déjà vue. Elle avait l'impression d'avoir déjà vécut tout ceci mais, à peine essayait-elle de rassembler ses souvenirs, que des tirs ennemis manquaient de la toucher de justesse. Azra n'avait pas vraiment le temps de rêvasser, elle devait se défendre et essayer de sauver un maximum d'alliés possible. La jeune femme hurla des instructions à son commando et elle observa de ses prunelles chocolats ses hommes se déployer pour tenter de reprendre du terrain sur le Premier Ordre.
Les cœurs battaient la mesure, tambours de guerre, cogneurs enragés dans des cages thoraciques soulevées par un souffle d'air vicié. C'était une cavalcade de pattes qui s'emmêlaient dans un terrain accidenté, ravagé. La face hargneuse de la bataille qui pouvait modeler de vastes étendues à son image. Combien de corps déjà plongés dans les abysses de fosses creusées par les tirs ennemis et alliés ? Beaucoup trop déjà. Pourtant les vivants continuaient d'avancer pour aller au devant de la mort.
La traque sauvage était lancée. La bête sournoise filait à travers le chaos. Dans les ténèbres, il fallait se méfier des ennemis que l'on entendait grogner et plus encore de ceux que l'on entendait plus. Doigt sur la détente, la proie venait d'échapper de justesse à son sort. Il fallait bouger sans cesse, couvrir le plus de terrain possible pour annihiler l'espoir, le donner en pâture à ceux qui n'avaient plus d'humanité pour l'écarteler sans aucune forme de pitié. Rage 3 et Rage 4 avançaient à la rencontre des résistants déployés dans ce secteur, avec pour seul ordre de les éliminer. Libre à elles d'être créatives. Ce n'était qu'une partie de chasse, le sniper rabattait les cibles pour les envoyer dans un charnier brûlant que l'experte en explosif se faisait un plaisir d'alimenter. A nouveau dans le viseur, la créature qu'elle n'avait pas encore réussi à avoir.
- Tuer… Tuer… Tuer, murmurait d'une voix planait au dessus des têtes, l'expression d'un désir, d'une folie peut-être.
Un rire dément s'éleva dans un écho puissant, la présence d'un esprit malade. Les ombres se hissaient du néants pour envelopper les vivants. Un rire qui se muait en hurlement d’effroi. La peur se faisait saisissante dans cette voix décharnée, la sensation qu'on arrachait l'âme de son corps. La joie n'avait plus sens, le bonheur un souvenir lointaine, un mensonge.
- Tu ne pourras pas les sauver, dit une voix qui s'élevait au dessus de la souffrance. Et c'est de ta faute.
Si la progression sur le champ de bataille n'était pas facile, elle se compliqua encore plus lorsque des tirs de sniper se firent entendre. Azra entendait les balles siffler dans tout les sens, c'était comme une pluie de balles. Une pluie font il valait mieux éviter les gouttes et ce n'était pas simple. Au fur et à mesure, et dans une mare de sang, les coéquipiers et alliés de la brune s'écroulaient sur le sol dans un hurlement continu. Azra plongea finalement derrière un rocher afin de prendre le temps de recharger ses armes. Tandis que, d'une main fébrile, elle cherchait à recharger son arme de poing, une voix sortie des ténèbres s'éleva. La jeune femme se figea sur place tandis que ses prunelles chocolats scrutaient la pénombre qui l'entourait.
- Vous êtes qui pour prétendre à une chose pareil ? Je réussirais à les sauver. Quoi qu'il m'en coûte.
La brune claqua son charge contre le puit de chargeur de manière à pouvoir l'engager d'un coup sec puis elle sortit légèrement de sa cachette afin de tirer quelques coups de feu. Est-ce que c'était un tir à l'aveugle ? Absolument. Azra avait l'impression que les ténèbres étaient entrain de l'encercler pour l'étouffer et mettre fin à ses souffrances. La Capitaine n'était cependant pas prête à abandonner son commando, ses hommes, ses amis, si facilement. Non. Elle ne pouvait pas baisser les bras.
- Sors de ta cachette et viens te battre !
L'appel était plutôt désespéré mais c'était bien le désespoir qui était entrain de prendre le pas sur la confiance habituelle d'Azra.
Et l'étreinte de nos cœurs suffit à percer le voile de la haine.
Une silhouette indistincte se mouvait dans l'obscurité, elle était une fumée insaisissable qui fendait l'air sans se soucier de la matière invisible. Se souciait-elle seulement de quelque chose ? Des rires multiples aussi forts que des murmures s'élevaient autour de l'humaine. Ils se moquaient d'elle, de ce courage qu'elle pensait avoir alors qu'elle était gouvernée par le désespoir.
- Je suis là, chuchota une voix à l'oreille d'Azra.
Mais il n'y avait personne. Il n'y avait rien. Juste les ténèbres. Le chaos de la bataille paraissait lointain, écho d'un souvenir passé. Là alors, un visage fendit le voile, celui d'un des hommes du commando. Il regardait sa cheffe droit dans les yeux. Sur sa tempe coulait un filet de sang, à sa source, une plaie profonde à la tête.
- Je suis là, dit-il.
D'autres visages sortirent du voile. Ceux qui étaient morts encerclaient la vivante. Leurs voix décharnées répétaient inlassablement cette même phrase, à mesure elles formaient un amas de mots qui perdaient leur sens. Ils étaient en colère, en souffrance aussi. Certains hurlaient leur douleur quand d'autres suppliaient dans l'agonie.
- Sors de ta cachette… murmurait une voix suffocante. Et viens te battre. VIENS TE BATTRE !
Les voix dans l'ombre avaient beau murmurer, Azra avait l'impression d'être au milieu d'un brouhaha. Dans son regard, on pouvait lire la terreur. Les prunelles chocolats de la jeune femme allaient dans tout les sens. Elle essayait de trouver l'origine de ce murmure incessant. Soudain, elle l'entendit. Tout proche d'elle, près de son oreille. La jeune femme se retourna brusquement sans rien trouver derrière elle. Son regard continuait de chercher dans l'obscurité. C'est alors qu'elle le vit. Un homme de son commando, il se traînait sur le sol et était couvert de sang. Azra le regarda avec effrois.
- Oh non.. Non.. Non.. Pardon..
Si la jeune femme avait réussit à garder une certaine contenance depuis le début de ce cauchemar, elle commençait à perdre lentement sa façade. Des larmes de panique commençaient à envahir les yeux de la jeune femme tendit qu'elle regardait toujours avec horreur le corps de l'homme. D'autres visages vinrent se joindre au corps de l'homme et la brune mit une main devant sa bouche comme pour retenir un hurlement de terreur.
- Je.. Je suis là ! B.. Battez-vous ! Venez vous battre !
Azra s'appuya dos au rocher qui lui faisait office d'abris. Elle leva son arme devant elle comme pour se défendre face à cet ennemis invisible pour l'instant. La terreur se lisait un peu plus dans son regard mais la capitaine ne fuyait pas pour autant. Elle voulait faire face, elle voulait se battre, elle voulait en finir.
- Je veux pas mourir... j'veux pas mourir, murmurait une voix chevrotante. Pourquoi il fait froid ? J'ai tellement froid...
Il faisait si froid. Un souffle chaud s'éleva dans les ténèbres, il se dissipa aussi vite qu'il était apparu. Le dernier soupire avant que l'âme ne quitte le corps pour s'élever vers un monde qui ne connaissait plus les souffrances de la vie. Et si c'était ça, la mort ? Le vide absolu, la solitude éternelle après avoir vécu les affres des vivants ? Il fallait lâcher prise, accepter la défaite. Il n'y avait plus de voix pour venir torturer Azra. Elle était seule derrière son rocher.
Une paire d'oreilles duveteuses dépassaient de l'abri minéral. Un ronronnement léger s'échappait de la créature encore cachée. Les oreilles ondulaient légèrement comme porté par une brise légère. Le ronronnement faisait vibrer l'air autour d'eux.
- Tu as l'air de passer une mauvaise journée, susurra l'être inconnu. Personnellement, je viens de faire une bonne sieste et ce n'est pas l'envie de me battre qui prédomine.
Les oreilles avaient cessé de se balancer lentement, fixant leur attention sur l'humaine aux abois. Elles paraissaient étrangement expressives pour deux organes qui ne servaient qu'à capter les ondes sonores. L'une d'elle se plia, donnant un air cabot à la bête qui restait derrière la roche.
Une énième voix s'éleva dans les ténèbres pour exprimer sa souffrance. La voix avait froid, tellement froid et Azra la comprenait. Une faisait froid, oui, il faisait vraiment froid mais étrangement, et sans plus de précision, la jeune femme se doutait que ce n'était pas le même froid que la voix avait ressentit. Les prunelles chocolats de la jeune femme continuaient d'aller d'un point à un autre de manière désordonnée et paniquée. Elle ne savait pas où regarder, elle ne savait pas quoi faire, elle ne savait pas si elle devait bouger ou rester cachée derrière son rocher. Une voix s'éleva à nouveau dans les ténèbres mais cette fois-ci, Azra était capable de savoir plus ou moins d'où venait la voix. Elle se risqua même à jeter un coup d'oeil par-dessus son rocher et ses sourcils se froncèrent en voyant les deux oreilles qui dépassaient d'un rocher un peu plus loin. Qu'est-ce que c'était ? Qu'elle était cette créature qui se moquait ouvertement d'elle ? La brune déglutit avant de revenir à sa cachette. Elle ne savait pas pourquoi mais aujourd'hui, elle avait l'impression que sa peur était insurmontable.
- Qui es-tu ? Qu'est-ce que tu nous veux ?
Cette créature, Azra ne s'inquiétait pas vraiment de sa provenance, elle voulait plus savoir qu'elles étaient ses intentions. D'un air méthodique, la jeune femme porta une main à son porte-chargeurs pour vérifier combien de chargeurs il lui restait. Deux. Très bien. Deux chargeurs de 15 balles plus celui qu'elle venait de remettre dans son arme, ça lui faisait 45 balles. Elle avait 45 munitions. Ce n'était pas énorme mais une balle suffisait à abattre un ennemis.
- Nous ? Toi plutôt ? Il n'y a que toi ici ma chère… ma très chère chair, susurra la créature.
Les oreilles se baissèrent lentement pour disparaître derrière la roche. Restait un ronronnement persistant de félin. Deux yeux d'un bleu électrique perçant à la pupille fendue à la verticale apparurent dans l'obscurité pour rôder autour d'Azra. Ils semblaient flotter dans l'air avec allégresse et volupté.
- Ma chère chair, tu voudrais me tuer ? Demanda la bête. Tu m'en vois navré si je t'ai effrayé.
Là, sur le rocher apparu un felinx de taille assez imposante par rapport à ses congénères qui servaient d'animaux de compagnie décérébrés pour le commun des mortels. Il toisait l'humaine de pied en cape avant de faire ce qui semblait être une moue désapprobatrice. Il avait cessé de ronronner par la même occasion, allongé selon son aise, l'air quelque peu arrogant.
- Ils sont morts, tu le sais ça ? Dit l'animal avant de passer un coup de langue rappeuse sur l'une de ses pattes au pelage soyeux. Vous les bipèdes, toujours à porter le poids du monde sur vos épaules. Si tu voulais qu'ils restent en vie, il ne fallait pas les amener là-bas.
Il émit un feulement semblable à un soupire d'exaspération. Décidément, il n'avait pas l'air de comprendre ce que les créatures à deux pattes trouvaient d'intelligent à se faire la guerre, et après venir pleurer sur leur sort parce que des gens étaient morts. La guerre, par définition, n'était ni plus ni moins qu'un massacre avec des règles plus ou moins respectées. Et moins que plu d'ailleurs.
Azra restait caché derrière son bout de roche. Elle avait le souffle court mais essayait de se faire discrète. Cependant, plus elle essayait de contrôler sa respiration, plus elle avait l'impression de manquer d'air et de ne pas réussir à reprendre son souffle. Elle avait l'impression de suffoquer, l'impression qu'elle allait manquer d'air et qu'elle allait s'étouffer là, sans que personne ne s'en rende comte. C'est alors qu'elle les vit. Les deux yeux du félin. La brune manqua de laissé échapper un cri d'exclamation mais les mots de la bête l'en empêchèrent. Comment ça elle était toute seule ? Ses camarades, ils étaient là, elle avait pu les entendre encore quelques minutes auparavant. Cependant, lorsqu'Azra tendit l'oreille pour essayer d'entendre les bruits de la bataille, elle se heurta à un silence morbide.
- N.. Non. Non. Mes camarades sont là. Ils sont là, je le sais.
Elle suivit du regard le félin qui se décida finalement à s'allonger comme il l'entendait sur le rocher. Azra le regarda faire, silencieuse et l'air interdite. Le chat semblait avoir décidé que c'était l'heure de faire sa toilette ? Il avait l'air d'être le maître ici et c'était assez étrange lorsqu'on savait que de nombreuses personnes possédaient un chat comme animal de compagnie. Azra avait toujours son arme entre ses mains tremblantes et elle secoua négativement la tête lorsque le chat affirma que ses compagnons étaient morts.
- I.. Ils ne peuvent pas être morts. Ils sont sous mon commandement. Je.. Je ne leur ai pas donné l'autorisation de mourir.
La capitaine essayait de garder la face mais, clairement, elle ne savait pas quoi penser de tout ça. Est-ce qu'ils étaient tous morts ? A cause d'elle ? Evidemment que c'était à cause d'elle si ils étaient morts. Le chat avait raison, si elle avait voulut les préserver de la mort, elle ne les aurait pas amené ici. Azra déglutit.
- Parce que je suis toi, répondit la boule de poils en étirant ses pattes avant et bailla pour découvrir ses dents effilées.
Le felinx secoua la tête, faisant bouger en saccade ses grandes oreilles duveteuse. Ses grands yeux bleus plongeaient dans le regard de l'humaine. Un sourire étrange et carnassier s'étirait sur sa gueule, continuant de découvrir cette dentition affûtée. A croire qu'il se délectait à observer la brune se noyer dans ses émotions, ses doutes, ses peurs...
- Je sais que c'est de ta faute s'ils sont morts, poursuivit la bête après un moment de silence. Mais tu sais de qui d'autre c'est la faute ? D'elle...
Oui elle, l’œil perçant qui avait abattu les résistants sans plus de ménagement. Chaque tir avait trouvé sa cible, exécutant ceux qui n'étaient pas mort sur le coup d'un tir en pleine tête. Elle qui n'avait laissé aucune chance, aucun espoir pour les agonisants. Elle... Cette créature de mort qui avait foulé le champ de bataille, emportant dans son sillage les frères d'armes de l'humaine que le felinx avait sous les yeux.
- Ça t'obsède n'est-ce pas ? demanda l'animal. Tu la hais, parce qu'elle ta pris leurs vies et ta jambe aussi.
L'animal sauta du rocher pour se retrouver au côté d'Azra, flairant la blessure infligée par l'un des tirs du commando Rage. Le sniper ne l'avait pas raté, mais la brune ne devait sa survit qu'à un rocher. Un simple et unique rocher. Si elle bougeait, elle serait de nouveau une cible et elle irait rejoindre ses camarades tombés au combat. Autant mourir maintenant ? Après tout, ici ou ailleurs, son corps finirait par retourner à la terre...
