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And now I'm lost in us. ✖ Diarmuid

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Délicatement, Moira enveloppe la fillette dans la couverture avant de doucement la soulever du lit sur lequel elle est en permanence depuis son arrivée en catastrophe sur la base de la Résistance. Presque dix jours se sont écoulés depuis l’incident, la toute petite brune se remet lentement mais sûrement mais elle doit encore passer le plus clair de son temps entre les murs de l’infirmerie, sur un lit. Jour après jour, Aloy parvient à rester éveillée un peu plus longtemps mais elle passe les 3/4 de son temps à dormir ou à être dans un état de semi conscience. On laisse néanmoins Moira sortir un peu la fillette, juste une petite heure à l’extérieur, à s’asseoir sur l’herbe sans la fatiguer. Les petits bras de la gamine viennent se glisser autour du cou de sa mère, sa tête se blottit contre son épaule et elle entrevue ses yeux gris avant de les refermer aussitôt. Tout en la tenant fermement, la pilote sort du centre de soins, quitte les couloirs de la base pour se diriger à l’écart de l’agitation qui règne. La paix et le calme n’ont pas leur place ici, l’endroit est une fourmilière, toujours plongée dans l’agitation, la fébrilité. Même dans l’infirmerie, il n’est pas aisé de trouver un coin où l’on ne s’agite pas ; il y a toujours quelqu’un, blessé/malade ou personnel soignant. Alors Moira veut s’en sortir un peu, mettre de la distances entre elles et ce monde qu’elle s’est toujours efforcée de tenir éloigné de son enfant. La brune s’installe sur l’herbe, la gamine sur les genoux puis vient délicatement dégager son visage pâle. Ses yeux sont encore cernés, Aloy baille, s’étire mollement avant de regarder tout autour d’elles. Elle qui est d’ordinaire si bavarde, ne parle que très peu, se contente de laisser ses yeux voguer sur son environnement. La pilote cueille les quelques fleurs blanches à côté d’elles, les glisse dans la chevelure sombre de la petite fille qui esquisse un vague sourire. Elle est bien, cette bulle, dans laquelle mère et fille sont enfermées. C'est peut-être la première fois que Moira a l’occasion de passer autant de temps seule juste avec son unique enfant, sa soeur a toujours été sur son dos, à les séparer lorsqu’elles restaient trop longtemps ensemble à son goût. Les petits doigts d’Aloy viennent saisir l’une des fleurs à ses cheveux pour la placer dans ceux de sa mère ; elle affiche un petit air satisfait avant de revenir blottir sa tête contre la poitrine de Moira. L’étreinte maternelle se raffermit un peu, quand elle pense qu’elle a bien failli la perdre pour toujours, son coeur se serre et sa gorge se noue. Non ça, son coeur n’aurait jamais réussi à le supporter ; Moira veut bien surmonter toutes les pertes mais pas celle de sa fille. Elle soupire légèrement, il est temps pour elle de rapporter la petite malade jusqu’à l’infirmerie. Pour combien de temps encore ?

Un dernier baiser sur le front de l'enfant déjà rendormie, elle la borde soigneusement puis Moira la laisse aux bons soins des médecins. Elle marche les mains dans les poches de son gilet, en direction du centre de maintenance des droïdes, afin de récupérer BB-12, lorsqu’au détour d’un couloir, elle entend des voix et des petits rires étouffés. La brune s'arrête, son dos vient se coller contre le mur et malgré elle, elle écoute. Ce n’est pourtant pas son genre, d’espionner ainsi sans raison valable. Un nom l’a retenue, un qu’elle connait bien, trop bien. Les deux filles chuchotent, mais la brune n’a aucun mal à entendre, à comprendre et serre ses poings. Elle ne peut empêcher un vif sentiment de jalousie la piquer au coeur, l’agacer. Elle a envie de la faire taire, celle qui parle alors elle sort de son coin, se plante devant les deux autres.

« Vous deux, vous n’avez pas mieux à faire que de traîner dans les couloirs ? »

Les deux jeunes femmes sursautent, regardent Moira qui affiche un air froid et sévère, un visage qu’elle n’affiche que peu souvent.

« Déguerpissez. » Son ton est sec et cassant.

Elles ne demandent pas leur reste, se dépêchent de quitter le couloir et Moira à la vive envie de se coller une gifle. Mais qu’est-ce qui lui prend, à réagir ainsi ? C’est stupide, sa réaction est puérile, n’a pas lieu d’être. Après tout, Diarmuid et elle sont juste… Oui, ils sont quoi ? Amis ? Amants ? Rien de tout cela ne devrait attiser sa jalousie. Des bips retentissent dans son dos, BB-12 est parti de lui-même du centre de maintenance et roule autour de sa propriétaire avant de s’arrêter, se rendant compte que cette dernière semble de méchante humeur.
Tout cela la travaille, elle sait qu’elle aurait beau essayer de ne pas y penser, son esprit restera focalisé sur ça. C’est insupportable. Et toujours aussi idiot. Toute cette situation est juste absurde, ça ne peut pas la toucher. Sauf si… Sauf si rien. Le droïde a été envoyer bouler, il s’en est allé bouder dans la cabine de Moira, peu content qu’on le traite ainsi. Pff, les humains, tous les mêmes ! Elle est toujours dans le même état d’agacement au moment où elle quitte encore une fois l’enceinte de la base. Elle ne devrait même pas y aller ! Oui. Qu’elle fasse demi-tour. Là. De suite. Elle ne le fait pas, pourtant, c’est ce qu’elle devrait faire. Elle a dit qu’elle y serait. Oh, elle peut bien se trouver une excuse ! Non, c’est encore plus puéril que son attitude. Les pensées fusent dans son esprit, c’est un véritable bordel, une tornade impossible à calmer. Il n’est qu’à quelques mètres de la pilote qui accélère le pas puis une fois en face de lui, sans réfléchir, attrape son bras et le force à se pencher pour venir poser ses lèvres contre les siennes. Son baiser est empli de passion, d’un peu de rage aussi. Il est tumultueux, comme les pensées de Moira qui deviennent soudainement plus claires. Elle s’écarte, le souffle un peu court, les sourcils légèrement froncés.

« Ca va ? » Dit-elle en essayant d’avoir l’air de rien.

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Il aimait les sentiments, il aimait les petites joies étranges qu'il trouvait parfois sans comprendre, par delà sa tristesse. Néanmoins, quelque chose en lui restait inaccessible malgré la présence que Diarmuid imposait aux autres. Donner mais sans recevoir, sans jamais plus recevoir... Lorsque l'on ne possédait plus rien, que pouvait-on perdre après tout?
Le général était connu pour coucher, pour ne pas s'attacher également. Elles étaient nombreuses les femmes à se vanter d'avoir été dans son lit, de profiter de cela, mais celles qu'il avait réellement tenu contre lui savaient: ce n'était que tristesse et mélancolie, ce n'était que douceur et tendresse aussi.
Surtout, ce n'était pas fait pour durer, pour rester. Car ils n'étaient que des grains de poussières emportés par la tempête, tous, car ils n'avaient plus rien auquel se raccrocher. L'ombre de la mort attendait, et parfois elle était déjà là.
Alors celles qui se vantaient réellement, beaucoup voyaient à travers le mensonge. Parce que Diarmuid ne couchait pas pour s'attacher, pas lorsque son coeur était déjà relié à une femme, à une tombe, une tombe désespérément vide car on avait jamais retrouvé assez de son corps. Que dire de plus?
Il embrassait plus qu'on ne l'embrassait. Des baisers volés, des baisers papillons, des lèvres au front, de l'âme au coeur et du coeur à lâme. Il emprisonnait pour un souffle ou quelques battements, il relâchait, et c'était comme être un oiseau entre ses mains alors, il vous lançait, il vous aimait, et du bout des ailes vous étiez capables de partir désormais.
De partir lorsque lui restait, homme de la Résistance qui ne se cherchait plus d'histoire à écrire. N'existaient que les autres.

Lorsque Moira apparut devant lui, il lui fit face. Diarmuid avait eu quelques nuits difficiles depuis le retour de leur mission, des cauchemars d'arbres, de rivières. Il se réveillait alors en sueur, incapable de combattre le début de panique, incapable de trouver le repos. L'homme s'était cru fort, redécouvrait que non. Il restait cet amas de brisures et de cicatrices, incapable de rien gérer sur le long terme. De nouveau, Diarmuid avait du faire face à une évaluation psychologique poussée, il avait des tâches à remplir, des tâches importantes, ne pouvait se permettre de défaillir.
D'arrêter.
Une nuit, moira était revenue le voir, cela l'avait aidé. Il n'avait pas pleuré, pas cette fois là, simplement réapprit à tenir la brune entre les murs d'une chambre quand il lui semblait encore entendre le murmure d'armes trop grand et le grondement d'une rivière.
Néanmoins, le Général avait été en trop mauvaise santé morale pour chercher des contacts physiques ainsi qu'il avait l'habitude de le faire. Faible encore, il savait qu'un rien le ferait s'effondrer. Et puis Moira encore, Moira toujours, avait volé un vaisseau. La jeune femme possédait des raisons,néanmoins Diarmuid était bien plus militaire qu'homme, ne pouvait supporter ce genre d'action, de comportement.
En tant que Général, il ne pouvait le valider, fusse pour sauver la vie d'une enfant car toute la base aurait pu être compromise. Dans chaque pragmatisme se cachait une part de cruauté...
Depuis, il n'avait pas ignoré la brune, il n'avait pas cherché le contact pour autant. L'un comme l'autre, chacun avait eu ses obligations. Elle était là maintenant, le regardait, le saisissait.
Et Diarmuid crut entendre les arbres et la violence, les blasters, le craquement du cou d'un homme. Il n'aurait pas du, pas dans ce baiser.
Stress Post-Traumatique, il connaissait le nom, il connaissait la définition, il savait également s'insulter lorsqu'il en ressentait les symptômes, SES symptômes, cela ne le guérissait pas.

Il ne la repoussa pas pour autant, il accepta simplement ses lèvres, sa présence. Et recevoir était dur pour lui, là, maintenant. Heureusement, Diarmuid savait encore mentir...

”Mieux que toi on dirait.... “

Ce n'était pas la petite, il l'aurait su beaucoup plus rapidement sinon. Accueillir une enfant malade, ça aussi pour le Général, une erreur. Il pensait aux risques d'épidémies, il pensait à la contagion pour ses soldats. Il pensait sans coeur... Les droïdes médicaux avaient cependant rapidement montré que la maladie de l'enfant n'avait rien de virale.

”Il te faut quelque chose?”

Pour elle, il s'inquiétait réellement. Dans sa vie, Moira possédait un poids certain, et la jeune femme, avec son regard perdu, semblait comme prête à s'effacer.
Doucement, Diarmuid la mena à un banc..
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Le calme est revenu. Cette colère que Moira trouvait idiote s’en est allée aussi vite qu’elle est arrivée. Elle passe une main sur son gilet pour le lisser, remet en place quelques mèches de ses cheveux bruns. La jalousie n’est plus là non plus, elle n’avait pas de raison d’être, de toute façon.

« Non, répond la pilote en secouant la tête, je vais bien. Je vais toujours bien. »

Toujours bien. Personne ne va toujours bien, certainement pas Moira mais elle a cette habitude de taire ce qui la ronge, qui l’angoisse, de ne laisser rien paraître. Silencieuse, elle observe le visage de Diarmuid, ses expressions et se mord légèrement les lèvres. Lui par contre, n’a pas l’air d’aller bien. La dernière fois qu’ils se sont vus, les esprits se sont échauffés et Diarmuid le Général n’avait pas oublié de mettre Moira sur les rails après sa petite « escapade ». En gros, il l’avait engueulée. Ca, la brune l’avait mal pris. Elle avait déjà eu droit à un tribunal devant ses supérieurs, devant l’Amiral. N’aurait-il pas pu, pour une fois, juste une seule, laisser les autres le faire et ne pas venir en rajouter une couche ? Elle n’avait pas eu besoin d’une autre engueulade, juste d’un ami et des bras réconfortants. Mais ça, ce n’est pas de lui que c’était venu, lui et son foutu sens des responsabilités beaucoup trop poussé. Il avait lui aussi eu droit à sa colère, à ses mots durs qu’elle a vite regrettés. Moira préfère la froideur, l’éloignement et se renfermer plutôt que de laisser éclater sa colère, pas cette fois. Trop de pression, un sujet bien trop sensible et un niveau de stress à faire exploser tous les quotas.

« T’en fais pas, tout va bien. » Redit-elle à nouveau.

Docile, elle le suit jusqu’au banc sur lequel elle s’assied. Elle ramène ses jambes contre sa poitrine, les entoure de ses bras puis pose son menton contre son genou. La fleur encore à ses cheveux glisse, vient s’échouer sur le banc, entre eux. Les pétales sont légèrement flétris, et la brunette essuie en vitesse ses yeux qui, il lui semble, se sont un peu embués. Moira est fatiguée, fatiguée de voir sans arrêt le visage malade de sa fille, de ne pas être capable de penser à quoi que ce soit d’autre lorsqu’elle n’est pas avec elle. Son état ne change que trop lentement à son goût, elle aurait aimé que sa mère ait paniqué pour rien, cette nuit-là, qu’elle ait cru au pire alors que ce n’était qu’une bête petite grippe. Moira soupire, chasser l’image de son esprit est difficile ; elle ferme ses paupières, prend une grande inspiration et repousse tout ça. Elle tourne la tête afin de regarder Diarmuid, sûrement aurait-elle dû essayer de le revoir plus tôt au lieu de l’éviter pour ne pas avoir droit à une hypothétique nouvelle leçon sur ses responsabilités. Ca aussi, c’était idiot.

« Tu m’as manqué. »

Elle se redresse, sort de sa position prostrée. C’est tout simple mais c’est vrai. Ils sont amis depuis de nombreuses années, Diarmuid a simplement agi comme il le devait, il a joué son rôle là où Moira a préféré tout envoyer chier. Ils sont différents sur bien des points sauf que cela n’a finalement pas trop d’importance. Et oui, oui, il lui a manqué. Ne serait-ce que ne plus le croiser dans un couloir, échanger un sourire ou un regard.

« Je suis désolée de t’avoir plus ou moins consciemment évité, ces derniers jours. Elle baisse la tête. C’était une attitude puérile et je m’excuse. »

Son regard reste rivé sur ses pieds qui volent au-dessus du sol. Le banc a beau ne pas être très haut, une fois assise au fond, Moira se retrouve toujours avec ses deux jambes qui pendent. Cela fait toujours rire les coéquipiers de son escadron qui ne manquent jamais de lui lancer une petite pique sur sa taille minuscule. La pilote se concentre à nouveau sur son ami, sur son visage aux traits tirés. Leur mission ne l’a pas épargné et si tous les deux en ont des plaies physiques, il est celui qui en garde des plaies psychologiques. Son coeur se serre, elle n’aime pas le voir dans cet état.

« C’est quand la dernière fois que tu as eu une vraie nuit de sommeil, mmmmh ? Lui demande doucement Moira avec une moue un peu inquiète. Si moi j’ai une tête à faire peur, tu n’es pas beaucoup mieux. »

Ses doigts viennent effleurer ceux de Diarmuid, elle lui esquisse un petit sourire.

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Le simple fait d'entendre la jeune femme parler de dormir fit bailler le brun avec force. La question était intéressante cependant, sa dernière nuit de sommeil? Il y réfléchit un peu, eut le souvenir de larmes, de beaucoup de larmes et – n'y pense pas, n'y pense pas- encore cette odeur de vert et de mort, lasers, ozone, bruit de speeders... Il avait bien dormir pourtant dans la petite tente cachée des regards, du moins un peu.

”La dernière fois qu'on a fait l'amour, je crois bien”

Depuis, ne restait que les cauchemars. Il y avait eu ce rêve dans le vaisseau, celui de Shirakz, désormais Diarmuid chassait la silhouette de sa femme dans chacune des quelques heures de sommeil qu'il grapillait parfois. Il n'arrivait plus à la retrouver cependant, se réveillait des larmes plein le visage, le coeur vide mais le coeur lourd aussi.
Ne plus y penser, encore une fois, ne plus y penser...
L'homme tourna la tête, regarda Moira. Elle l'avait évité? A vrai dire, Diarmuid n'était pas le meilleur pour remarquer ce genre de choses. Il avait l'habitude de secouer après tout, pas forcément de décevoir mais d'au moins bousculer. Pour les autres, cela impliquait des colères, de la distance, des réactions parfois amicales, parfois passionnées ou bien proches de la haine également.
Il serra la main de la jeune pilote, qu'elle n' s'inquiète pas. Comme sa phrase venait de le prouver, il l'associait à un souvenir heureux, pas à des mots troubles, des disputes.

Parfois j'aimerai bien m'allonger dans l'herbe simplement et fermer les yeux... Mais ça me terrifie. Lorsque je suis à terre c'est pour ramper, m'échapper. Être sur le dos, regarder le ciel et fermer les yeux, ce serait quoi, mourir? Le sommeil reviendra un jour, mais je ne pense pas que ce soit à condition que je me détende comme n'importe qui.”

Son coeur portait trop de choses...

”Et tant mieux si je fais peur, cela me donne un peu de crédibilité sur les recrues et les cadets.”

Il sourit, ne laissa pas au silence le temps de les distraire, préférant enlacer d'une main l'épaule de Moira. Elle était là, chair tendre, pleine de vie, les yeux curieux, les yeux sérieux, elle était là dans son monde d'illusions à lui. Plus que jamais, alors qu'il se sentait de nouveau au bord du gouffre, Diarmuid savait avoir besoin d'elle.

”Tu veux passer, ce soir?”

Il donnait peu d'invitations aux femmes, préférait attendre qu'elles viennent d'elle-même. Il en donnait aux amis cependant, et Moira devait se souvenir de soirées étranges, recevant un message de son général pour qu'elle le retrouve lui et ses démons, et ne le console avec son propre coeur en miettes.
Sans qu'ils ne se touchent.
Cela n'était venu qu'après.
Cela existait-il réellement?

Et Diarmuid ne lui demanda pas pour le baiser, la jeune femme avait ses raisons et lui acceptait d'être embrassé, cela suffisait.
Pour le moment...
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Il baille, ce qui arrache un petit sourire amusé à Moira. L’évocation de leur dernière nuit ensemble colla un air presque mélancolique sur le visage de la brune alors que celle-ci ne remontait pas à si loin. Mais là-bas, dans cette petite tente et en haut des arbres, elle avait eu l’impression qu’ils étaient enfermés à l’intérieur d’une bulle, coupés de la réalité dure et froide. Elle y était bien, aurait aimé pouvoir y rester plus longtemps car la vie qui les attend en dehors n’a rien d’idéale ou de simple. Moira ne préfère pas y penser, à cette vie incroyablement dangereuse et dépourvue d’un avenir clair. Ses parents détestent ça, sa mère a pleuré des jours entiers en apprenant le choix insensé de sa fille : comment peut-on vouloir vivre une telle existence plutôt qu’une gentille petite vie rangée avec sa famille ? Il n’est pas rare qu’elle le lui rapproche un peu, Abigaïl, à chaque fois que la pilote vient en permission. Et c’est dur, dur de savoir que ses parents vivent avec la peur au ventre de ne plus jamais la revoir, de n’avoir aucun corps à enterrer comme pour Gavin. Alors cette nuit, une bulle d’oxygène, qu’importe si le sommeil n’a été que très court, il l’est toujours de toute façon.
La grande main de Diarmuid serre la sienne, bien plus petite comparée à l’autre. Moira les regarde quelques instants avant de finalement reposer ses yeux sur le visage de son ami. Il y a cette souffrance au fond de ses yeux bleus, une blessure si profonde qu’elle semble impossible à refermer. La brune l’a déjà vu au fin fond du gouffre, a essayé tant bien que de mal, à apaiser son âme torturée alors même que la sienne était encore à l’agonie. Peu importe, Moira a toujours eu le don de faire passer les autres avant elle, avant son bien-être ou sa propre vie. Surtout ceux auxquels elle tient.

« Je sais, répond Moira en toute simplicité, rien que l’idée de dormir est étouffante. Cela viendra lorsque tu réussiras à avoir le coeur et l’âme en paix. »

Faire la paix avec son coeur n’a jamais soulagé les nuits agitées de Moira. Elle est juste comme ça, depuis qu’elle est toute petite, à se réveiller toutes les nuits ou presque en hurlant et pleurant. Il n’y a pas d’explications, les choses sont ainsi faites et elles ne changeront jamais pour elle mais pas pour Diarmuid. Son sommeil finira par être moins agité, ses cauchemars partiront bien un jour. C’est tout ce qu’elle espère pour lui.

« Ne les effraies pas trop non plus. Puis comme si tu manquais sérieusement de crédibilité. Toi. Avec ta taille de géant, et non je n’exagère pas, ton dos droit et ton regard sérieux. Tu me faisais déjà peur quand j’avais dix-neuf ans, aujourd’hui ça va un peu mieux. » Rit-elle.

Dix ans. Moira peine parfois à imaginer que cela fait dix années qu’elle a rejoint la Résistance. A l’époque, elle était une jeune pilote avec de belles idées plein la tête, optimiste et naïve. C’est étrange de se dire qu’elle a été cette personne-là… C’était une autre époque, pas plus heureuse ou moins compliquée, juste différente. Il lui arrive d’être nostalgique, le soir, seule dans sa chambre mais elle fait en sorte de n’être que peu habitée par ce sentiment qui pourrait la conduire à la tristesse, au rappel du deuil qui a été si difficile à faire. Diarmuid sourit, un sourire que partage la pilote. Elle le préfère ainsi, elle ne pourra jamais s’habituer à le voir mal en point, physiquement comme moralement. Si Moira en avait le pouvoir, elle ferait disparaître tous les nuages qui viennent trop souvent obscurcir son regard si clair.
Sa tête vient s’échouer contre l’épaule du brun, ses paupières se ferment et le temps semble se figer. Son esprit est complètement vide, aucune pensée négative ne lui passe par la tête ; chose extrêmement reposante. C’est qu’elle pourrait presque s’endormir, ainsi contre lui mais la voix de son ami lui fait rouvrir les yeux, elle lève la tête pour le regarder.

« Oui, bien sûr. Cela me changera des murs déprimants de l’infirmerie. »

Toutes ses nuits, elle les passe à l’infirmerie, installée sur une chaise inconfortable à veiller. Moira serait bien incapable de rester enfermée dans sa cabine, ses pensées n’en seraient que plus noires, sans parler des cauchemars. De ce fait, elle reste près du lit de sa fille, somnolant la tête posée contre le matelas. Cela ne la dérange pas, c’est toujours préférable à la solitude de sa chambre. Sa main se pose contre la joue du brun. Tendrement, ses doigts caressent les traits fatigués de son visage, effleurent l’arrête de son nez, les cernes sous les yeux. Doucement, Moira embrasse la tempe de Diarmuid avant de revenir poser sa tête contre son épaule.

« Est-ce que… Est-ce que tu voudrais rencontrer ma fille, lorsqu’elle ira un peu mieux ? » Demande Moira, d’une voix presque timide et hésitante.

Elle pousse un petit soupir, baisse les yeux pour regarder l’herbe au-dessus de laquelle flottent ses pieds.

« Ils ne savent pas combien de temps cela prendra pour qu’elle se remette et si elle ne risque pas de replonger. Elle se mordille les lèvres. Peut-être bien que nos coeurs peuvent supporter les pires douleurs mais pas celle-ci… »

La brune passe une main sur son visage avec un nouveau soupir et un pincement au coeur. La voilà qui se remet à penser à l’éventualité d’une rechute, d’une mort probable. Elle ravale les larmes, veut essayer de faire bonne figure mais son corps la trahit pour elle en tremblant légèrement, en se recroquevillant un peu. Il y a des craintes qui sont impossibles à camoufler.

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Il repensa à des fleurs de pommiers lorsqu'elles tombaient drues en cascades sur les cheveux des femmes.
Il repensa à sa propre mauvaise humeur aussi, celle d'il y a dix ans, celle d'un chef égoïste, égocentrique, et les grands yeux noirs de Shirakz qui le regardaient parfois, effrayés. Les fleurs se prenaient, s'accrochaient à ses mèches sombres, quand d'autres hommes posaient les yeux sur elle .
Il y avait eu Moira déjà il y a dix ans, son dédain cynique à lui alors que les épreuves l'épargnaient encore. Leurs disputes, d'autres gens aussi, beaucoup étaient morts désormais.
D'autres avaient survécu, s'embrassaient peut-être, se haïssaient.
Et lorsque Moira posa la tête sur son épaule, ce fut aussi doucement qu'une fleur de pommier glissant des cheveux d'une femme.
Son bras l'enlaça un peu plus fort, et Diarmuid songea à la nuit à venir. Il ne dormirait pas, ils ne dormiraient pas.Dix ans avaient passé, Shirakz devenait un souvenir, une ombre, un conte presque. Celui de la femme que le général fou aimait encore malgré toutes celles qui allaient et venaient dans son lit.
Et lui, au fond, que pouvait-il encore donner aux vivants ? Il y avait une petite fille dans l'infirmerie, Diarmuid n'avait pas encore pris le temps de la voir. Faire face à un enfant, un enfant réel qui pouvait vous sourire, vous toucher, vous parler, n'était-ce pas un peu trop pour eux, la vie qu'ils s'étaient choisis ?

 « Ca dépend, tu veux qu'elle fasse des cauchemars ? »

Mais déjà l'ambiance redevenait grave. Un enfant savait faire beaucoup de choses, y compris mourir. Pouvait-on faire chose plus contre-nature que cela, perdre ainsi le futur que lon avait créé ? Parfois, Diarmuid songeait à tous les enfants qu'ils n'avaient pu avoir et, en pensées, leur demandait pardon, les suppliait, les aimat, eux qui n'existaient pas et n'existeraient jamais.

 « Nos médecins et droïdes ici sont des médecins de guerre, ne l'oublie pas. Ils ont du matériel, ils ont des compétences, mais ne sont pas spécialisés dans les enfants et se doivent d'être alarmistes et de penser dans l'urgence. En tant de guerre, seule la rpidité peut sauver des malades et des blessés, prévenir les épidémies les gangrènes et autres... »

Est-ce que l'état de la petite fille était donc moins grave qu'il n'y paraissait ? Non, cependant le personnel médical avait été formé à tenir un certain genre de discours, puisque la guerre laissait peu de place à l'espoir.
Le matériel, et de nouveau Diarmuid se surpris à penser en soldat, combien est-ce que l'enfant coûtait en médicaments, en structures ? Elle n'avait pas sa place ici, ils n'avaient rien pour les civils ils ne voulaient PAS de civils.

 « Emmène-moi la voir tout de suite si tu veux, oui »

Ainsi, Diarmuid se rendrait compte par lui-même de la situation à l'infirmerie d'une part, de l'autre, se forcerait à s'humaniser. Il avait des décisions à prendre, des responsabilités à porter, cependant celles-ci étaient sur le point de le mettre à genoux à présent.
A genoux quand il ne pouvait plus se relever.
L'homme tendit le bras à Moira, ainsi qu'il l'aurait fait pour la mener à la table d'un bon restaurant. Au moins, le contact humain, il savait toujours faire.
Ensemble ils avancèrent, quelques soldats croisés les saluèrent, parfis on arrêtait Diar le temps de poser une question, de demander un renseignement, à chaque fois l'homme devait prendre le temps de répondre également.
Et dans ces instants précis, un observateur extérieur comprenait alors que l'homme, corps et âme, appartenait à la résistance jusque dans la plus petite de ses volontés.
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Aller la voir, de suite. La petite brune hésite un peu alors que son ami est déjà debout, à lui tendre son bras. Est-ce bien raisonnable ? Il est fort à parier que la petite sera profondément endormie à cause du traitement lourd qui l’assomme en permanence ou de la fièvre qui joue au yo-yo. Mais elle a ce besoin viscéral de retourner près d’elle, d’être là à ses côtés pour veiller sur elle. Qui sait combien de temps elle pourra encore passer avec sa fille ? Il lui faudra bien, lorsqu’elle ira mieux, qu’Aloy retourne vivre sur Yavin IV, auprès du restant de sa famille. L’idée de la séparation lui est déjà insupportable. Le regard de la pilote reste rivé sur ce bras pendant encore quelques instants avant qu’elle ne finisse par hocher de la tête et se lever afin de prendre son bras. Elle le tient tandis qu’ils marchent, elle a envie de presser le pas comme elle a envie de le ralentir. Voir son unique enfant malade est une vision douloureuse qu’elle préférerait s’éviter. Moira regarde à peine les personnes qui les accostent, qui arrêtent Diarmuid. Bien sûr qu’il va leur répondre, il ne vit que pour son rang de Général, pour la Résistance et rien d’autre. Elle aimerait le tirer maintenant qu’ils se rapprochent de l’infirmerie, le forcer à aller plus vite, à mettre sur pause ce qu’il doit faire mais ce serait se heurter à un mur. Alors qu’ils sont juste devant la porte de l’infirmerie et qu’on les arrête encore, Moira lâche le bras pour pénétrer la première dans le centre de soins. Il saura bien les rejoindre ! De là où elle est, la brunette peut entendre BB-12 qui bip joyeusement, quand la mère n’est pas là, c’est le petit droïde qui prend le relais en surveillant Aloy, prêt à alerter sa maitresse au moindre souci.

Moira écarte le petit rideau du box dans lequel se trouve sa fille. Cette dernière est réveillée, elle regarde avec attention les hologrammes que lui montre BB. C’est vrai que la ressemblance avec sa mère est frappante, toutes deux ont la même forme du visage, un petit nez en trompette et un sourire malicieux. Ses cheveux sont néanmoins un peu plus sombres que ceux de Moira et ses yeux sont ceux de son père : grands et gris, bordés de longs cils, lui donnant une allure de poupée. Mais là, son visage est d’une pâleur à faire peur, ses yeux sont cernés, parfois un peu hagards à cause de la fière. Pourtant, il semble à Moira qu’elle va mieux que quelques heures plus tôt, semble plus réactive et plus elle-même. Pour combien de temps ? Cela fait trois jours qu’elle passe d’un état à peu près normal à un état amorphe. Aloy tourne la tête en direction des rideaux entrouverts, regarde sa mère avant de poser son regard un peu plus haut, sur la silhouette bien plus grande que sa mère. L’enfant se recroqueville un peu sous le drap, craignant de voir venir un autre médecin.

« Hey, on s’amuse bien, à ce que je vois. Fait doucement Moira en s’avançant dans le box et jusqu’au lit pour s’asseoir sur le rebord.
-Voui… BB me montre de jolies images. »

Moira dépose un baiser sur le front chaud de l’enfant qui se redresse, se penche pour regarder Diarmuid avec des yeux maintenant curieux. La brune se retourne afin de faire comme sa fille, fait un mouvement de tête au brun pour qu’il entre lui aussi. L’homme ne portant pas de tenue médicale, la petite fille s’est apaisée et la curiosité a repris le dessus sur la crainte d’une nouvelle injection.

« Je te présente Diarmuid, un de mes amis. Diarmuid, je te présente Aloy. »

Aloy fait de grands yeux ronds, sonde du regard le brun.

« Haaan. T’es encore plus grand que grand-père et il est très très très grand, grand-père. Dit Aloy en cherchant l’approbation de Moira.
-Si tu veux mon avis, il est trop grand. »

La gamine pouffe un peu de rire avant de se mettre à tousser en grimaçant à cause de la douleur qui irradie sa cage thoracique. La brune passe une main dans les cheveux bouclés de la petite qui reprend son souffle pour recommencer à parler :

« Toi aussi, t’es pilote ? Moi quand je serai grande, je serai une pilote, comme maman. »

Ca lui fait bizarre, que le « maman » lui soit adressé. Pendant six années, elle n’était que « tante Moira » et le changement, bien qu’il la rende heureuse, l’angoisse un peu. Abygaïl n’a pas respecté sa volonté après la naissance d’Aloy et s’est bien gardée d’en parler à sa fille, faisant comprendre à sa petite-fille que celle qu’elle appelait « maman » ne l’était pas. Moira aura besoin d’une sérieuse conversation avec sa mère, un autre jour. La toute petite malade tend son bras, montre du doigts les plaques de Grades sur le blouson de Diarmuid.

« C’est quoi, ça ? T’en as beaucoup beaucoup beaucoup. »

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Diarmuid reste immobile près du lit de l'enfant, quand Moira le lui autorise, il s'approche mais ses mouvements restent discrets, le général dessinant come une frontière entre lui, la fillette et sa mère. Une frontière à ne pas dépasser pour mieux les protéger. Il acquiesce et sourit un peu : c'est vrai qu'il est grand, qui plus est là où d'autres subissaient leurs propres tailles, leurs silhouettes, Diarmuid avançait toujours les épaules dégagés, le port de tête fier.
Sa taille fait partie de lui, de son identité, elle va avec son rang, avec sa vie, avec ses épreuves. Une de ses recrues le lui avait dit un jour après l'amour : « on ne t'imagine pas autrement que grand », et ils en avaient rit tous les deux avant de recommencer leur étreinte. Diarmuid songe avec amertume que cette femme est morte aujourd'hui, décédée dès la première mission. Et cela fait mal...

 « Je ne suis pas pilote, je suis général...C'est ce que mes décorations indiquent. »

Il écoute la gamine tousser, entend sa difficulté à respirer, sa faiblesse. Yavin IV est un monde humide, poisseux, ici l'air semble beaucoup plus sec et les poumons d'Aloy doivent souffrir de ce changement d'air. Il regarde Moira, lui indique d'un léger signe de tête de prendre le haricot en fer blanc et sasseoir près de la fillette. Les médecins n'ont le temps de rien ici, quant aux droïdes, ils ne pouvaient remplacer les humains sur tous les points. Diarmuid ne sait pas soigne, cependant il a appris des gestes de survie pour s'occuper de ses hommes lorsqu'aucune autre aide n'était disponible. Des gestes qui signifiaient peu mais pouvaient avoir un impact singulier...

 « Reste assise et penche-toi un peu ? Je ne vais pas te faire de piqûre, c'est promis.... »

Il lui remonte la chemise de nuit conte son dos, palpe la colonne vertébrale bien formée, constate que des courbtures existent ainsi que plusieurs nœuds et commence à masser. De temps en temps, la petite geint, il est parfois obligé d'être brutal, de remettre. Il ne masse que le dos, à hauteur de poumons, encore une fois ses gestes se font durs, précis. Aussitôt Aloy tousse, a des hauts le cœur, des nausées. Diarmuid fait signe à Moira d'approcher le haricot, la fillette ne vomit pas cependant.
Elle crache.
Elle crache fort, vilemment, cette muqueuse qui s'installait dans ses poumons et provoquait la toux qui ne l'affablissait que trop. Bien sûr l'effort ne la rend que plus faible, mais elle a un peu de rose aux joues avec ses yeux qui brillent, et sa respition redevient calme soudain.
Cela ne soigne pas la fièvre, cela apaise juste un peu, lui permettra de se fatiguer moins vite peut-être. Quand respirer ne redevient plus un fardeau.
Avec douceur, Diarmuid rhabille la fillette et lui fait boire un verre deau sans se départir de son autorité naturelle. Il touche les oreillers, les sent trempés de sueur. Alors il se lève juste, va prende des taies propres dans l'armoire non loin, les change, les remet en place et aide Aloy à s'allonger finalement.

 « Tu est courageuse, c'est bien... Quand tu iras mieux tu auras droit à ta décoration toi aussi. »

Il regarde Moira, sent sa peur, ses inquiétudes. Il n'a pas forcément les mots pour elle, pour l'aider, et la brune n'en demande pas non plus, néanmoins Diarmuid lui donne sa présence à lui face aux épreuves. Cela a toujours été ainsi, leur relation...

 « N'hésite pas à la masser régulièrement...Son système immunitaire est affaibli, son corps a besoin d'être stimulé. Elle dormira mieux ce soir je pense. Enfin, quand elle aura mangé ? Je parie qu'elle meurt de faim maintenant.... »
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La petite Aloy zieute encore un moment les décorations de Diarmuid, visiblement fortement intéressée. Si elle a déjà vu celles de sa mère, il n’y a pas à dire, l’homme en a beaucoup plus. Ses yeux deviennent songeurs quelques instants, probablement qu’elle s’imagine porter la même chose, sur sa petite poitrine et se pavaner devant ses cousins et cousines pour les impressionner. Elle fronce ses sourcils, regarde sa mère puis à nouveau le brun avec une moue perplexe, le jargon militaire, l’enfant ne le connait pas ; Moira a toujours fait en sorte de la tenir la plus éloignée possible.

« Euh c’est quoi un général ? Demande-t-elle à sa mère.
-C’est celui qui donne les ordres à tout le monde, répond Moira, un petit sourire malicieux sur les lèvres.
-Oh ! Comme grand-mère, grand-mère c’est le général à la maison. » Rit doucement la petite brune.

Rire ne l’aide pas, elle est de nouveau prise d’une quinte de toux qui fait trembler tout son petit corps. Une vague d’inquiétude submerge la pilote, ce n’est pas la première fois qu’elle voit sa fille malade, mais jamais à ce point. Dire que sa soeur ne voulait pas qu’elle la ramène avec elle… Si Moira avait laissé faire Hinda, Aloy serait déjà enterrée dans le cimetière familial, sur Yavin IV et la brune en serait morte de chagrin. Diarmuid bouge de l’autre côté du lit, elle redresse la tête pour le voir lui indiquer de récupérer un objet juste derrière elle. Sans poser de questions, la brunette s’exécute avant de reprendre sa place sur le lit, près d’Aloy qui regarde maintenant le brun avec de grands yeux peu rassurés. Elle cherche le regard de sa mère, tremblante et quand cette dernière hoche de la tête avec un petit sourire rassurant, la gamine s’exécute non sans serrer de toutes ses forces ses petits poings. La mère caresse tendrement les boucles sombres de l’enfant, vient prendre ses mains dans les siennes afin de les serrer tendrement. Il ne l’a pas encore touchée mais Aloy est nerveuse, ne se sent pas encore en confiance et ça, Moira peut le sentir aisément.

« Ssshhh, je lui fais confiance alors tu peux toi aussi, d’accord ? » Murmure la pilote.

La gamine hoche de la tête sans pour autant cesser de trembler légèrement mais elle semble un peu plus apaisée. Si sa mère dit qu’elle n’a rien à craindre alors elle la croit, c’est aussi simple que cela. Les yeux de Moira vont de Diarmuid à sa fille, elle observe ses gestes tout en restant attentive à l’état de son enfant. Elle serre les dents, sait que la petite brune n’aime pas la situation, a probablement mal mais elle ne dit rien, comme elle l’a déjà dit un peu plus tôt : elle fait confiance à Diarmuid. L’enfant pousse quelques plaintes de douleur mais ne dit rien, se laisse faire gentiment et en ayant grandement hâte que la torture s’achève. Ses poumons qui étaient encombrés le sont moins, elle respire mieux, reprend quelques couleurs mais à ses yeux perlent quelques larmes que Moira essuie délicatement. Aloy est comme sa mère, ne se plaint jamais, supporte en essayant de faire bonne figure. Son regard la trahit également ; ces deux billes grises qui brillent de larmes à cet instant précis. A nouveau, la pilote observe les gestes du Général, même dans sa douceur, il y a toujours une empreinte de fermeté ; le militaire n’est jamais très loin… Diarmuid l’a à peine rallongée qu’un sourire vient étirer ses petites lèvres à la pensée de la décoration. La voilà qui se redresse brusquement, se penche vers sa table de chevet dans le but de récupérer l’une des fleurs blanches qui ornaient ses cheveux un peu plus tôt. Une en main, elle la tend vers Diarmuid avec un petit sourire.

« Tiens, c’est pour toi. C’est une décoration aussi. Elle brille pas comme les autres mais euh… Elle est jolie et elle sent bon ! »

Aloy dépose la fleur dans la grande main de Diarmuid puis vient écarter les pans du gilet de sa mère pour venir se blottir contre elle. Moira enveloppe la petite qui a fourré son pouce dans sa bouche, sa tête posée contre la poitrine maternelle et qui ferme maintenant ses paupières. La jeune femme relève ses yeux, les pose sur le brun pour lui offrir un sourire tendre.

« N’hésite pas à la masser régulièrement… Son système immunitaire est affaibli, son corps a besoin d’être stimulé.
-Merci… »

Alors que Diarmuid parle de « manger », la petite Aloy redresse vivement sa tête, visiblement très intéressée.

« J’ai tout le temps faim ! Grand-mère dit que je suis un esmo… Un tesmo…
-Estomac. Corrige la mère.
-Ah oui. Un estomac sur pattes. Acquiesce la fillette. Allez, on sort d’ici, hein ? »

Ses yeux vont de sa mère à Diarmuid. C’est lui qui est censé donner les ordres, sa mère l’a dit mais est-ce que c’est que pour les soldats ou pour elle aussi ? Elle prend la même moue pensive que sa mère, plisse ses paupières. La petite brune a l’autorisation de sortir de l’infirmerie, elle n’est pas contagieuse, se fatigue juste ; mais c’est bien la première fois qu’elle est aussi éveillée depuis qu’elle est arrivée sur la base. Aloy n’aura pas à marcher, juste se laisser porter par sa mère qui se lève, récupère une paire de chaussettes gentiment prêtée par Gwen qu’elle fait enfiler à la petite. Les chaussettes sont grandes, recouvrent une partie des petites jambes de la brunette mais elles ont l’avantage d’être chaudes. Moira retire ensuite son gilet, en habille Aloy qui trépigne sur son lit à l’idée de pouvoir sortir un peu ; elle n’est pas la seule, car au pied du lit, BB-12 roule dans tous les sens, lui aussi content de voir la petite humaine ainsi. La gamine récupère sa poupée, une vieille poupée que la pilote reconnait aisément, c’était la sienne lorsqu’elle avait le même âge que sa fille. Le tissu a perdu de sa couleur, le jouet n’est plus aussi beau qu’il l’a été mais ça ne dérange pas Aloy qui trimballe la poupée partout. L’enfant est soulevée du lit, portée par sa mère ; elle enserre ses hanches de ses petites jambes, passer ses bras autour de son cou et tourne la tête vers Diarmuid.

« Tu viens avec nous, hein ? » chuchote la petite.

C’est au tour de Moira de se tourner vers le Général. Oui, il vient avec elles, hein ? Ou bien a-t-il d’autres obligations ? Rien n’est jamais moins sûr avec lui. La pilote fait un pas vers lui et voilà que les deux brunes doivent lever le nez pour pouvoir le regarder. Aloy approche sa petite main du torse de Diarmuid, ses doigts viennent très délicatement et avec beaucoup de précaution, effleurer les décorations. Moira n’a pas envie qu’il s’en aille pourtant elle comprendra, parce qu’elle le connait.

« Sauf si tes obligations t’appellent ailleurs… »

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Il avait encore une tonne de choses à faire : des papiers à remplir, d'autres à vérifier, quelques inspections aussi, des compte-rendus, et puis bien sûr toute la journée de demain à préparer. Entre autres. Il avait une tonne de choses à faire mais, depuis sa fatigue et sa tristesse, Diarmuid n'avait pas envie tout simplement.
Depuis combien de temps prenait-il ses reponsabilités ainsi, combien d'heures à se tuer au travail pour que d'autres n'aient pas à le faire, hein ? Il couchait, il couchait beaucoup, trop d'après certains et jamais assez selon lui. Mais lorsqu'il le faisait, c'était sur son temps de repos, toujours. Sur le sommeil qu'il ne prenait pas vraiment.
Diarmuid regarda la mère et la fillette, eut envie d'être quelqu'un d'autre, d'être ailleurs, tout cela à la fois.
Ce n'était plus possible...

 « Je viens... »

Pour une fois, rien que pour une fois les autres sauraient se débrouiller sans lui, non ? Et Diarmuid songea à Leia, à la fatigue qu'elle portait en elle, à l'amour fou qu'ils lui onnaient tous, lui adjurant de faire attention. Il doutait qu'on l'aime, lui, ou même qu'on lui donne quelque affection, néamoins il avait le droit à tout autant de repos.
Une fois, juste une fois.
De son pas cadencé, militaire, l'homme conduisit Moira et Aloy jusqu'au mess, là où la gamine pourrait avoir de quoi manger. Un potage peut-être, quelque chose capable de tenir au corps... Diarmuid repensa à certaines planètes traversées alors qu'il n'était qu'un tout jeune soldat au service de la République bien qu'il n'en portat jamais le nom, et qu'il avait à chasser les ombres de l'Empire. C'était avant l'amour, avant Shirakz, une éternité d'étoiles et de blessures... Certaines de ces planètes subissaient des famines sévères, on nourrissait les soldats car ils combattaient pour la liberté, on ne donnait rien aux enfants, à peine u gruau clair, une eau dans laquelle avait trempé une feuille de légume vite retirée pour être donnée à de plus méritants.
C'était cela aussi la guerre, sans le Premier Ordre, ans l'Empire, c'était leurs cœurs cruels à eux tous tout simplement.

Un droïde apporta vite un plateau : bouillon effectivement, légumes et pâtes dedans, et belle miche de pain encore chaude, Aloy n'aurait aucun mal à manger tout cela. En attendant, Diarmuid glissa la fleur donnée à sa propre boutonnière et se prit à rêvasser un peu sans but aucun. Sous ses yeux, les cernes étaient noirs, profondes, il avait maigri un peu depuis la mission, mangeait sans doutes aussi mal qu'il dormait et...non à vrai dire le général ne se rappelait même plus manger, tout simplement.

 « Prenez votre temps... »

Il ne voulait pas hausser la voix, murmurait juste. Un jeune soldat parcouru alors la salle pour le trouver, lui poser une question, encore une foutue question, et Diarmuid explosa, le visage entre les mains soudain, les yeux fermés.

 « VA T EN ! »

Qu'on le laisse, oh pitié qu'on le laisse !
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