L’endroit, bien que familier, donnait la chair de poule à la Sénatrice. En plus d’être une merveille d’histoire, elle était aussi remplie de souvenirs. Elle se souvenait de chacun de ses frères et sœurs, gravissant les marchés, arrivent au sommet, s’éblouir devant tant de génie architectural. Icare et Ceres étaient restés pantois, Gaïa n’avait pas daigné lever les yeux, Iris et Percy étaient comme des enfants face à un cadeau. Et Leto ? Le petit dernier n’avait rien laissé paraître, mais ce n’était pas forcément une surprise ; après tout, il n’était pas du genre à laisser paraître ses sentiments. Même Ariane avait parfois du mal à les desceller, alors qu’elle l’avait élevé comme son propre fils toute sa vie.

Néanmoins, sa rêverie fut interrompue par l’intervention d’Hayden. La jeune femme avait probablement sous estimé ses capacités. La présence des Sith, peut être même des Blackthorn, ne lui avait pas pas échappé. Un frisson parcouru l’échine d’Ariane et un malaise s’était emparé d’elle ; peut être même qu’elle était devenue pâle comme un linge. Ses veines s’étaient mises à glacer. Avait-elle fait une erreur en emmenant le Jedi ici ? S’était-elle trahie ? Sa réaction était-elle un aveu ? Mais non, Ariane, calme toi. Probablement qu’il mettrait tout cela sur le compte du choc. Voilà ; du choc. « Je ne peux pas y croire... » s’était-elle entendu répondre, de loin, comme si son esprit avait quitté son corps.

Elle avait secoué la tête, ses mèches brunes ondulant au même rythme. «  Impossible. Des Sith venir ici ? Je... Ils seraient venus... se recueillir ? Ma planète serait elle envahie ? Le risque est présent pour mon peuple ? » Elle vacillait, jouant à demi la comédie. La Sénatrice eu besoin de se retenir contre l’un des murs pour ne pas perdre l’équilibre, ses jambes ne la tenait plus. «  C’est terrible... Je... je dois sortir... Excusez moi...» Il devait se détourner de tout ça. Ils devaient partir. Maintenant. Ariane ne se sentait plus du tout maîtresse de la situation, et elle ne faisait clairement pas le poids contre Hayden. Avec tous les efforts du monde, elle réussit à faire perler des larmes au coin de ses yeux. Quelle maîtrise, belle traîtrise...

Elle avait commit une erreur. Pour la première fois depuis longtemps, elle avait commit une erreur, qui lui coûterait peut-être tout ce qu'elle avait construit. La panique l'avait envahie, et elle avait prit la fuite, chose qu'elle regrettait amèrement. Incapable de se tenir face à un seul Jedi, alors qu'elle les combattait indirectement depuis toujours... Le silence des marécages du temple eu au moins comme effet d'apaiser la jeune femme. Si ce n'était certainement pas l'environnement de rêve pour tout le monde, il était synonyme de bien plus pour la Sénatrice. Hayden l'avait rejoint ; le départ précipité d'Ariane l'avait inquiété et pour cause. Il fallait qu'elle reprenne les choses en mains, et que ces foutues larmes cessent de couler. Il n'était pas encore trop tard pour tout rattraper. Il lui faisait confiance et c'était un avantage indéniable compte tenu des préjugés qu'il pouvait nourrir en arrivant. Il se rapproche, et les voilà face à face, il tente de capter son regard et il réussit sans trop de mal. Car quelque part, il la rassure, sans vraiment savoir quel impact ont ses mots ; sa famille ne sera pas en danger à cause de lui, du moins pas immédiatement. « Je suis désolée, je ne voulais pas réagir ainsi. Je devrais me tenir plus convenablement... » Des excuses basiques qui avaient pour but de le piéger un peu plus dans cette apparence de femme fragile, désabusée. Après tout, c'était tout ce qui lui restait. « J'ai eu peur que vous m'annonciez... Je ne sais pas, qu'ils se réunissaient ici sous notre nez, que nous avions permis leur retour sans le savoir. J'ai cru que mon travail, et le travail de mes parents avant moi était parti en fumée. » Le Jedi eu un signe de réconfort, sa main venant se déposer sur son bras. C'était le premier véritable contact physique qu'ils avaient. Ariane s'attendait à ressentir quelque chose de différent, n'importe quoi, une aura spécifique peut-être, mais non. Elle vint poser la main sur la sienne. Il ne s'agissait que d'un geste de réconfort pour une femme en détresse. La Sénatrice jetait un ultime regard au temple qui s'élevait derrière eux. « Vous avez raison, il n'est pas trop tard. Je vais ordonner une mise sous surveillance permanente pendant les prochaines semaines. » Bien évidemment, ils ne trouveraient rien, mais cela permettait de garantir sa bonne foi à Hayden et surtout d'appuyer son mensonge. La jeune femme lançait alors un regard plein d'espoir au Maître Jedi : « Oui, je m'y appliquerai. J'ose imaginer que je pourrais compter sur votre aide dans cette entreprise ? »

Ariane reculait d'un pas, cessant le contact physique entre eux. Elle fit mine d'essuyer ses joues qui portaient encore les stigmates de ses larmes presque feintes. « Nous devrions retourner dans le centre-ville. Je vais mettre en place les surveillances immédiatement. Nous devrions avoir cela en place d'ici une petite heure. » Un silence. « Je ne peux vous proposer un hôtel après tout cela. Vous êtes maintenant considéré comme un invité de marque. » Elle vint épousseter sa veste. Ce temple n'était vraiment pas tout neuf. « Je possède une résidence secondaire dans les quartiers touristiques de la ville. Elle est souvent inhabitée, mais le cadre est plus agréable, et les chambres sont confortables. Vous pourriez y rester le temps de mettre cette histoire au clair, ou au moins pour la nuit. Je vous y invite. » Sans aucun doute un véritable coup de maître, afin de le garder à l'oeil pendant ces quelques étapes sensibles.

Le retour en ville se fit en trombes, Ariane devant jouer son rôle à la perfection. Elle était dans une situation qui nécessitait un entretien avec un Seigneur, mais elle devait également préserver son secret. L'arrivée d'un Sith de Korriban prendrait du temps, et elle n'était absolument pas en mesure d'affronter un Jedi toute seule. Alors, pour le moment, elle se ferait passer pour une jeune femme profondément secouée par les événements, perdue, hagarde, comme si le combat de toute sa vie s'effondrait. Hayden semblait prendre à cœur cette histoire, tentant de la rassurer comme il le pouvait. Il était à l'image de ce qu'il souhaitait renvoyer : prévoyant et prévenant. Il ne lui cachait pas la vérité, sans l'édulcorer. C'était mieux ainsi. En arrivant de le bâtiment, le Jedi ne tarissait pas en éloges. « Oh je n'y suis pour rien. Mes ancêtres aimaient faire les choses en grand. Ma résidence principale est du même acabit, mais de nombreuses pièces sont à l'abandon. Je me contente du minimum. J'estime que je ne devrais pas avoir plus de privilèges que mon peuple. » M'enfin, certains avantages font du bien, lorsqu'il s'agit d'élever seule une demi douzaine d'enfants... Ariane demandait à deux valets de bien vouloir terminer les préparatifs de la chambre pour leur invité. « Je me dois de repasser par chez moi, j'ai quelques affaires à résoudre, c'est à quelques minutes d'ici. Je repasserai néanmoins, pour m'assurer que tout se passe bien. » Elle réfléchit quelques instants. « J'oserais même vous demander si dîner avec moi ne vous poserait pas de problème. Je suis très curieuse d'en connaître un peu plus sur vous. Oh, et sur les Jedi. J'avoue être curieuse. Peut-être que vous ne pourrez pas me dire grand chose, je voulais simplement en savoir plus... Connaître un peu mieux nos alliés, si tant est que vous seriez nos alliés dans un nouveau conflit contre les Sith... » Habilement, comme un serpent, Ariane s'insinuait doucement dans toute les failles, tentant de grappiller petit à petit des informations, du savoir supplémentaire. L'information, c'est le nerf de la guerre... Et même si Hayden n'a aucune idée qu'elle se déroule ici même, à l'instant précis, elle fait déjà des ravages. Ariane sourit. « Pardonnez moi si je me montre trop enthousiaste. Vous êtes le premier que je rencontre... » Elle fit un pas en arrière. « Ne vous en faites pas, je ne pense pas qu'en matière de politesse et de civilité, vous ayez quelque chose à apprendre. Deux valets sont présents ici pour répondre à vos besoins en cas de problème. » Et vous surveiller, pensait-elle. La Sénatrice prit alors son temps pour enfiler de nouveau son châle, s'engageant dans une attitude de séduction, mais surtout de manipulation. « Vous n'êtes pas obligé de me répondre tout de suite pour le dîner. Faites parvenir votre réponse lorsque vous serez en pleine forme. Je laisse l'un des valets vous accompagner jusqu'à votre chambre... Faites moi signe si vous avez besoin. » Puis, d'un signe de tête qui se veut respectueux, elle se dirigeait vers la sortie. Avant de partir, elle intimait aux valets l'ordre d'espionner le Jedi, et de lui rapporter toute ses paroles. Il ne serait pas dupe, et prendrait ses précautions, mais sait-on jamais... Rien ne se fond mieux dans le décor qu'un serviteur.