Coruscant, la belle Coruscant ... depuis qu'elle était arrivée, Kara ne s'en lassait pas. Il fallait dire qu'elle avait tout pour être heureuse, ici. Ses larcins lui avaient permis de se payer un petit appartement en plein centre ville. Un deux pièce, pas bien luxueux, mais suffisant pour y dormir. De toute façon, la plupart du temps, elle arpentait les rues, en quête de personnes à arnaquer, ou bien à fréquenter. Il fallait bien gagner sa vie, après tout ... Et elle n'était pas prête à se ranger, à se contenter d'une petite vie bien rangée. Elle aurait certainement pu, pourtant. Coruscant n'avait que très peu de liens avec le Premier Ordre, il n'y avait peu voire pas de risques qu'on reconnaisse Oona Fallon ici. Oui, elle aurait sans doute pu se trouver un petit boulot en tant que serveuse dans une cantina, mais c'était tout de même bien moins grisant que de vivre pleinement sa vie de hors-la-loi, non ? De toute façon, Kara n'avait jamais été tentée par un quotidien calme et paisible. Elle aimait l'imprévu, l'aventure, l'action. Elle évitait le danger si possible, mais il était une composante non-négligeable de sa vie, bien malgré elle. Au moins, elle se sentait vivre, et craignait qu'un jour cette sensation ne la quitte, comme elle avait pu la quitter autrefois.

Toujours était-il qu'après trois jours de dur labeur, Kara avait estimé qu'elle avait le droit de se prélasser dans son appartement sans rien devoir à personne. Un congé improvisé, l'avantage de ne pas devoir rendre des comptes. Elle avait donc fermé sa porte, et avait pour ainsi dire dormi toute la journée. Il fallait dire que l'alcool avait coulé à flot la veille, et qu'elle n'y était pas pour rien. Ajoutez à cela la fatigue, vous obtenez une belle gueule de bois. Autant dire qu'elle chérissait cette congé de pause pas volée, et qu'elle égorgerait le moindre intrus qui viendrait déranger sa paix sereine. Bon, c'était peut-être un brin exagéré, mais vous voyez l'idée. Disons en tout cas que si elle aimait ce genre de journée où elle ne faisait strictement rien, elle n'était pas pour autant de bonne humeur.

Le soir allait tomber, et Kara avait réussi à éviter tout contact humain, et allait pouvoir finir sa journée comme elle l'avait commencée ... seule. Enfin, ça c'était sans compter sur les trois grands coups sur ta porte qui relancèrent sa migraine. Dans une longue plainte, elle se releva de son lit, attrapant son blaster juste au cas où il ne s'agirait pas d'une visite de courtoisie. Kara avait beau être une mauvaise tireuse, à bout portant elle s'en sortait pas trop mal. Elle ouvrit ainsi sa porte, l'arme derrière son dos, prête à toute éventualité, lorsque ... « Gahyic ? » Il foutait quoi lui là ? Pourquoi il était là ? Il avait pas reçu le message de l'univers qui disait de pas emmerder Kara aujourd'hui ? Visiblement pas, et elle eut pour le coup beaucoup de mal à se montrer agréable avec le chasseur de prime. Au pire, il y avait écrit "gueule de bois" sur son front, il allait peut-être se montrer compatissant ? « Je peux faire quelque chose pour toi ? »  

Si seulement il avait s’agit de quelqu’un que Kara appréciait. Fawn, par exemple. Bon, d’accord, la liste était vraiment très courte, les possibilités très minces, étant donné que dans cette nouvelle vie qu’elle s’était façonnée, Kara n’avait plus beaucoup d’amis. Il fallait dire qu’elle n’était pas non plus la plus sympathique des personnes. Et ses victimes, celles qui lui prodiguaient crédits, cadeaux, et informations, n’avaient aucune idée d’où elle habitait. Encore heureux d’ailleurs, le contraire aurait été plutôt préoccupant. Mais Gahyic … pourquoi Gahyic ? Pourquoi pas un petit bandit inoffensif qui serait venu lui chercher des noises et qu’elle aurait remis à sa place d’une gifle bien placée ? Ou encore mieux ! Un généreux donateur qui aurait voulu se débarrasser d’une valise pleine de crédits … ah, ça, ça aurait fait sa journée ! Mais non, il avait fallu qu’elle tombe sur l’un des gars les plus violents de la galaxie. À croire qu’elle attirait ce genre d’individus. Bon, heureusement elle était à peu près persuadée que le chasseur de primes n’en n’avait pas après elle. Après tout, la seule prime qu’elle avait sur sa tête spécifiait qu’elle devait rester en vie. Pas le genre de corvée dont s’embarassait le bandit. Aussi, elle laissa ses épaules s’affaisser, et lâcha un simple « Entre. » avant de s’effacer pour le laisser passer. La réflexion suivante bien sûr ne manqua pas de lui arracher un claquement de langue. Il était plutôt agaçant le bougre. « On sait jamais tu sais, y a des gars pas très fréquentable dehors. » L’hôpital qui se fout de la charité, tout ça.

Kara alla néanmoins poser son blaster sur un meuble tout proche. De toute façon, si Gahyic avait eu dans l’idée de l’abattre, elle n’aurait pas pu y faire grand chose. Comment voudriez-vous que la faible demoiselle qu’elle était lutte contre le gaillard qu’était Gahyic. Sa force à elle, elle résidait dans les mots. Elle se retrouvait relativement dépourvue une fois le masque tombé. C’était sans doute pour cela qu’elle maintenait en place un jeu des apparences avec le chasseur de prime : elle aurait sans doute pu lui fermer la porte au nez, l’envoyer paître comme elle aurait tant aimé le faire, mais il valait mieux le garder de son côté. Premièrement car s’en faire un ennemi lui paraissait assez risqué, et ensuite parce qu’il était le genre de fréquentation qui pouvait toujours servir. Les apparences étaient simplement un peu plus dures à maintenir avec une horrible gueule de bois « T’excuseras l’accueil et le bordel, je n’attendais pas vraiment d’invités » jugea-t-elle ainsi bon d’ajouter. Il était vrai que l’appartement était tellement sans dessus-dessous qu’un voleur n’oserait pas s’y risquer. Il était loin le temps où elle était une parfaite maîtresse de maison. Envolé, abandonné dans les couloirs du premier ordre. Et puis, elle l’aimait, son bordel. Quelque part, cela lui rappelait qu’il n’y avait personne pour lui hurler dessus parce qu’elle avait oublié de ranger un verre. En parlant de verre … il n’y avait pas un dicton qui disait qu’il fallait combattre le mal par le mal ?

Deux verres, et une bouteille de Nectarwine, elle alla s’installer à sa table basse, dégageant le canapé des vêtements qui le recouvraient. « Je te sers un verre ? » Demanda-t-elle sans vraiment attendre la réponse pour servir. Au pire, elle boirait les deux verres. Elle releva alors le regard vers le bandit, portant le breuvage à ses lèvres, le laissant faire effet durant quelque chose, avant de reprendre, nonchalante « Je suppose que t’es pas sur Coruscant pour faire du tourisme, tu comptes rester combien de temps ? »