Comme à chaque fois que je pénétrais dans un lieu public, je promenais mon regard sur la pièce. Repérant en premier lieu la sortie de secours, réflexe indispensable en tant de guerre. Chose faite, j'observais les personnes présentes. Tentant de repérer la moindre chose me paraissant anormale. Un regard un peu trop insistant, un visage connu. Une fois rassuré je m'approchais du bar. Cette auberge était on ne peut plus classique : une salle de reception où l'on pouvait manger comme boire, des chambres à l'étage. Je m'installais à une table, dans un coin où j'avais le loisir d'observer tout autour de moi. La bouteille d'eau-de-vie que j'avais commandé devant moi. Je laissais l'âcre alcool descendre dans ma gorge au fut et à mesure que le verre diminuait. Il y avait des personnes de toute race. Des voyageurs, quelques résistants. Des femmes. S'il avait été là, R4-D7 aurait bippé de toutes ses forces. J'avais depuis longtemps programmé mon fidèle astromech pour repérer les belles femmes, selon mes critères.

Mais je n'étais pas là pour cela. Pas exactement. J'attendais quelqu'un. Ti'Ilandra Arundel jeune femme que j'avais rencontré il y a quelques semaines. Et que j'ai eu l'occasion de revoir quelques fois. Je n'avais aucun engagement avec celle femme, si ce n'est un respect mutuel, une reconnaissance éternelle, et un putain de désir dès qu'elle était dans la même pièce que moi. Elle était belle Ti'Ilandra. Terriblement belle. Mon entourage me prend pour un goujat. Un sans coeur qui ne respecte pas les femmes. C'est faux. J'aime les femmes. J'aime les séduire. Les mettre dans mon lit. Mais pas les faire souffrir. Aussi malgré les oeuillades de la belle Twi'lek au bar, j'attendais la belle chanteuse. Notre rencontre avait été ... explosive. Elle m'avait sauvé la vie. Et avant même de connaître son nom j'avais posé mes lèvres sur les siennes. Et enlevé ses vêtements. Incorrigible me dirait sans doute Tuiren. Effectivement. Mais elle est consentante non ? Il n'y a pas de mal à s'amuser avec une amie.

Ti’Ilandra ne prenait pas assez de bon temps. C’était en tout cas son avis le plus objectif qui soit. Il était vrai qu’en dehors de son travail, elle ne faisait pas grand chose de sa vie. Oh, ça lui avait suffit ces dernières années, mais voilà qui commençait à devenir lassant. Elle avait besoin d’une bouffée d’air frais, de changement, de mouvement dans sa vie. Sans doute le signal qu’elle commençait à aller mieux, qu’elle commençait à faire son deuil. L’idée lui brisait le cœur, comme si elle avait cette désagréable impression de trahir Audran … Pourtant, au fond, elle savait pertinemment bien que vivre était tout ce qu’il le souhaiterait s’il le pouvait. Bon, il ne lui conseillerait peut-être pas d’être aussi imprudente qu’elle l’était ces derniers-temps, mais ça, ça avait toujours été de famille de toute façon.

En parlant d’imprudence … Elle ajusta le tissu qui reposait sur ses cheveux avant de rentrer dans l’auberge qui se dressait face à elle. Pour une fois, elle n’était pas là pour chanter, loin de là, mais pour retrouver l’une de ses pires imprudences. Tout avait commencé par un boucan infernal dans l’une des villes où elle séjournait, voici quelques semaines à présent. Sans qu’elle comprenne ce qui lui avait pris, Ti’Ilandra avait sauvé un inconnu du Premier Ordre. Elle n’avait aucune idée de qui il était quand il avait fini dans son lit. De la folie, vous dites ? Ah oui, tout à fait. Une folie qu’elle reproduisait avec plaisir dès qu’elle en avait l’occasion, comme ce soir. Du moins, là il était question de boire un verre, ce à quoi Ti’Ilandra disait rarement non. Comme tout le monde, elle avait des pêchés mignons après tout.

Une fois à l’intérieur, Andra repéra rapidement le bellâtre. Dans un coin, à boire ce qui semblait être de l’eau-de-vie. Un sourire étira ses lèvres : pour l’alcool ou pour Biggs ? Bonne question, sans doute un peu des deux. À pas de chat, elle se rapprocha de la table et se pencha pour embrasser la joue, ou plus ou moins sa joue tout du moins « Je ne t’ai pas fait trop attendre ? » Probablement que si, en fait. La ponctualité ne faisait pas partie de ses qualités, que voulez-vous ? Elle en avait bien d’autres pour se rattraper, à ne pas en douter.

Je bus une seconde gorgée d'eau de vie. Le liquide était âcre, presque brûlant. Un frisson parcouru mon corps quand mes papilles réagirent à l'alcool quasi pur. J'aimais cette sensation. Quand l'alcool parcoure mon corps, prend possession de mes cellules et m'embrume l'esprit. Pour souffler les doutes et les peurs. Elan galvanisateur, dont il ne fait pas abuser. Au risque de ne devenir qu'une ombre. Car les peurs, les doutes sont ce qui font de nous des êtres humains. Je relevais la tête, apercevant mon rendez-vous. Immédiatement, un léger sourire se dessina sur mes lèvres tandis que le suivais du regard la belle brune qui traversait la foule. Elle était extrêmement élégante, comme à son habitude. Je versais de l'eau de vie dans le verre que j'avais prévu pour elle. Tandis qu'elle arrivais en me déposant une bise sur la joue. Cet infime contact me fit tressaillir, frissonner encore plus qu'avec la morsure de l'alcool.

Nous nous connaissions depuis peu. Quelques semaines à peine. Pourtant, outre la reconnaissance éternelle que j'éprouve à son sujet, j'ai été irrémédiablement attiré par elle. Par comme pour une histoire d'amour. Ni une histoire uniquement basée sur le sexe. Quelque chose entre les deux. Sans sentiments mais sans être tout à fait détaché. Quelque chose d'unique en somme. Et de formidablement plaisant. Je la laissais s'assoir, sans la quitter du regard. Profitant de l'instant présent, bien que je l'aurais bien fait monter dans la chambre immédiatement. « Ne t'inquiète pas. Ca valait le coups d'attendre. » Je lui adressais un clin d'oeil, accompagné d'un autre sourire. « Cela m'a donné l'occasion d'observer les alentours. Je t'avoue avoir regardé s'il n'y avait pas une femme qui pourrait me convenir si tu ne venais pas ... » Je marquais une pause. Malicieux. « Mais aucune n'était à ta hauteur, j'en suis désolé. » Je poussais son verre vers elle, levant le mien. « A nous donc. »

Ti'Ilandra aurait été bien incapable d'expliquer ce qu'il y avait exactement entre elle et Biggs. Ce n'était pas qu'une histoire charnelle, si ça avait été le cas elle aurait plutôt jeté son dévolu sur une personne qui n'était pas recherchée. Pourtant, elle était irrémédiablement attirée par le beau brun, sans pouvoir véritablement l'expliquer. Oh, bien sûr, il était séduisant, suffisamment que pour se perdre dans ses bras une nuit durant. Mais il y avait quelque chose, une pointe d'adrénaline, un soupçon d'interdit, qui faisait battre le coeur de Ti'Ilandra plus rapidement dès qu'ils se trouvaient dans la même pièce. Rien de sentimental cependant, Andra n'était pas de ces filles mièvres et naïves. En fait, elle n'avait aucune idée de ce que cela faisait d'être amoureuse, et n'était pas certaine de le découvrir un jour. Elle préférait aux sentiments niais la passion d'un soir. Pourtant, d'une certaine façon, elle s'était attaché au bandit. Elle l'appréciait en tout cas suffisamment que pour pouvoir passer un moment à boire à ses côtés.

Andra ne put s'empêcher de rire légèrement aux remarques de Biggs. Tentait-il de la rendre jalouse ? Elle n'en savait rien, et s'en moquait royalement. Elle avait suffisamment confiance en elle que pour se dire qu'il ne l'aurait pas simplement plantée là. C'était bien le seul genre de situation qui la mettait en confiance d'ailleurs. « Et à la chance que j'ai d'être arrivée à temps. » Trinqua-t-elle à son tour. Ainsi, un sourire amusé sur les lèvres, elle porta le verre d'eau de vie à ses lèvres, retenant une grimace lorsque le liquide âcre se répandit dans son corps. Une sensation grisante, à laquelle elle devrait s'adonner plus souvent. « Ceci dit » reprit-elle en faisant une légère moue « Tu m'aurais vraiment abandonnée à mon propre sort si tu t'étais trouvé une jolie demoiselle pour la nuit ? » Était-il nécessaire de préciser qu'il n'avait pas intérêt à répondre par la positive ? C'est qu'elle pouvait vite se vexer la Ti'Ilandra, mais elle faisait confiance au beau-parleur en face d'elle que pour savoir s'y prendre avec les mots. « Déjà que je prolonge mon séjour uniquement pour toi » ajouta-t-elle en insistant sur le uniquement. C'est qu'il était privilégié le bougre. Mais il était vrai également qu'elle avait tendance à passer plus de temps dans le noyau, voire même sur sa planète natale, Anaxes, quand elle avait le temps plutôt que de traîner sur des planètes où elle n'avait aucune attache, comme Seltos. Alors, il pouvait bien être gentil avec elle, non ?

Elle était belle. Si belle. Mes yeux ne pouvaient s'empêcher de la dévorer. Sa peau dorée. Sa longue chevelure sombre. Ses yeux cachant mille maux, mais dont l'intensité me faisait frémir. Et bien sûr, les courbes gracieuses de son corps que je devinais sous ses vêtements. Que plusieurs fois senti sous mes mains habiles. Lesquelles trépignaient d'impatience de suivre le contour de ce corps du bout des doigts. De sentir sa peau animée de frissons. Mais ce n'était pas pour tout de suite. Pour l'instant nous profitions de ce moment. Entre séduction et sentiments. Relation sur laquelle nous ne mettions nom. Pas d'amour mais pas d'ignorance. Pas que du sexe mais pas tout à fait plus. Quelque chose d'unique, de particulier. Je l'écoutais parler en souriant. Ce même sourire qui, je le sais, laisse apparaitre la cicatrice de ma joue. Les filles adorent les cicatrices. « A ton avis, t'aurais-je vraiment laissé ? »

Je laissais mon regard parcourir de nouveau la cantina. Se promenant sur les nombreuses courbes féminines qui s'y trouvaient. Evitant par habitude les prostituées. J'aimais les femmes, c'était de notoriété publique. Mais jamais ne ne m'étais offert les services de prostituées. La femme devait avoir le choix, pas être contrainte par la force ou l'argent. C'est ce qui rendait ces moments exceptionnels. Evidemment donc que je n'aurais pas laissé Ti'Ilandra à son sort. Je la respectais bien trop pour cela. J'haussais un sourire à sa dernière phrase. « Je suis donc un privilégié. Cela me touche beaucoup. » Sur ses mots, ma main alla doucement effleurer sa cuisse. « J'ai bien l'intention que tu te ne regrettes pas ce choix. » Je bus de nouveau une gorgée d'alcool. « Tu sais que cette eau de vie est à base d'oranges de mandalore ? » Je marquais une pause. Ma main ne quittant pas sa cuisse. « Il parait qu'elles sont aphrodisiaques. »