Ces derniers temps, en raison des circonstances actuelles, la capitale de Corellia semblait sous tension. Et le secteur Bleu ne faisait pas exception. Il ne faisait pas vraiment bon vivre ces temps-ci dans ce quartier bien connu des hors-la-loi de Coronet. Bon nombre de mercenaires profitaient de la situation actuelle pour se remplir les poches, et accepter divers contrats dangereux, mais très bien payés.

Et c'est ce qu'Abigail comptait faire, elle aussi. C'était le moment ou jamais de gagner des crédits. La demande n'avait jamais été aussi forte sur Corellia, et quitte à être piégée ici, autant en profiter. Alors afin de mettre toutes les chances de son côté, Abi avait songé qu'il était plus que temps d'accélérer les réparations sur son vaisseau.
Elle avait récupéré cette navette il y a quelques mois grâce à un bon filon qu'elle avait suivi, et ce YT-1760 ne lui avait ainsi presque rien coûté. Malheureusement, il était dans un sale état, et beaucoup de pièces étaient à changer. Même si Abi avait déjà effectué une grosse partie du travail de base, il fallait maintenant songer à s'attaquer à des parties bien plus techniques, comme l'hyperdrive, ou le bouclier. Malheureusement, même si Aldor, son mentor depuis toute petite, lui avait appris de nombreuses choses en matière de mécanique, il n'avait pas eu le temps de pousser son apprentissage à ce point.

Ainsi, pour ces questions très techniques, Abi avait décidé d'emmener sa navette dans un garage du secteur bleu, non loin de la où elle résidait. Elle était déjà venue ici plusieurs fois pour marchander avec les pilotes et mécaniciens du coin, revendre ou acheter des pièces ou glaner quelques conseils. Aujourd'hui, elle était simplement venue afin d'avoir tout le matériel à disposition, quitte à débourser quelques crédits. Avec un peu de chance, cette dépense allait lui permettre de s'enrichir beaucoup plus. Il fallait tenter le coup, car de toute façon, Abi n'avait ni le matériel ni les connaissances pour réparer sa navette à elle toute seule.

La jeune femme travaillait donc sur son gros bébé depuis plusieurs heures déjà. Elle en avait profité pour retirer un tapis de caoutchouc trop abimé de la soute, et y poser toutes les pièces qu'elle comptait changer ou dont elle voulait se débarasser. Ceci lui permit durant la journée d'en vendre quelques unes au passage, à des mécaniciens travaillant dans ce même garage à la recherche de ces pièces. Abigail appréciait particulièrement ces conditions de travail. Un outil lui manquait ? Elle pouvait l'emprunter à son voisin. Elle recherchait une pièce ? Il lui suffisait de faire le tour du garage et généralement, elle pouvait y acheter ce qu'elle voulait. Chacun s'entraidait, moyennant crédits bien sûr, mais c'était un environnement de travail agréable.

Seulement, depuis près d'une heure à présent, Abi n'avançait plus. Elle ne parvenait pas à remonter un composant sur l'un de ces moteurs subluminiques. Apparemment, le joint de la pièce, qu'elle avait pourtant achetée neuve, ne convenait pas.

« J'espère que ce fils de Hutt de marchand ne m'a pas vendu de la camelotte... » Grommela-t-elle pour elle-même.

Exaspérée, Abi laissa tomber ses bras le long de son corps, tout en lachant un soupir de découragement. Elle s'assit en tailleur sur le sol froid du petit support élévateur sur lequel elle se trouvait, la tête entre les genoux. De fatigue, tout son corps se relacha petit à petit, et la clé dynamométrique qu'elle avait à la main tomba sur le sol du garage, 2 mètres plus bas.

« Mmpff... »

Elle resta là, à contempler la clé tombée au sol. Dans l'immédiat, Abi était trop découragée et fatiguée pour bouger. Elle ferma les yeux, tentant de rassembler son courage. Elle avait encore beaucoup de boulot devant elle, et la journée était loin d'être terminée. Elle devait trouver la force de se remettre au travail rapidement...

     Toujours bloqué sur ce système qu'il maudissait jour après jours, coincé dans ce paysage sale et frustrant quel que soit sa localisation. C'était mieux que le Tonneau, mais il ne faisait pas réellement bon vivre dans les quartiers chauds de Coronet. Si seulement il avait le choix. Il était désormais considéré comme un hors-la-loi, forcé à se terrer pour éviter les forces locales. Les endroits les plus mal fréquentés étaient les seuls qu'il pouvait fréquenter, priant n'importe qui ou n'importe quoi pour que ce fichu blocus énergétique prenne fin. Passant le plus clair de son temps à noyer son temps dans les cantinas et les casses, cherchant des matériaux utiles, mais jamais plus utiles que ceux qu'il n'avait déjà. C'était une sorte de dépression, un désœuvrement des plus total. Il se rabaissait aux plus basses primes pour vivre un temps soit peu, vu qu'il avait laissé tout son patrimoine sur Nar Shaddaa. Il ne devenait plus rien.

     Lassé de boire, il errait dans les rues débordantes d'associations de malfaiteurs, unis dans la détresse mais toujours dans la vulgarité. Certains même se payaient le luxe de s'envoyer en l'air dans la rue ou de régler leur compte à la vue de tous, de manière sanglante. Un grand manque de civisme, de savoir-vivre. De délicatesse. Lui qui aimait tuer avec beauté et finesse. Il était un hors-la-loi mal habitué à vivre dans les conditions qui y étaient associées. Il se contentait donc de faire comme toujours. Passer du temps le soir dans les cantinas, à écouter les ragots et les informations utiles, et la journée fabriquer, chercher des pièces, en acheter si besoin. Obrim atteignit une place du secteur bleu, connu pour ses marchands de pièces détachés. L'endroit joignait quelques plateformes de réparations aux quatre coins. Il ne cherchait qu'un régulateur de vitesse à, après quelques modifications, ajouter au mécanisme de son réacteur dorsal pour en contrôler plus facilement la puissance. Ça faisait longtemps qu'il avait prévu de s'en charger, mais il fallait à chaque fois attendre le couac qui l’obligeait à se rattraper au grappin en pleine mission.

     Il finit par trouver ce qu'il cherchait. Le régulateur en question était prévu pour un landspeeder, donc les modifications allait être un peu plus complexes que prévues, mais rien de bien méchant. Il savait déjà quoi faire et le rangea dans le grand sac qu'il tenait sur l'épaule. Il s'apprêtait à faire demi-tour après avoir payé son dû lorsque qu'un vaisseau dans un des hangars attira son attention. Il en avait déjà vu auparavant, mais pas dans cet état. Dans un sens le cargo qu'il observait était visiblement abîmé, mais en même temps sa carlingue illustrait la propreté et l'entretien. Il se permit s'entrer en toute discrétion dans la grande alcôve, marchant en dessous de la bête. Il touchait du doigt le blindage, n’amassant aucune poussière malgré l'air presque irrespirable du quartier, entendant quelques fois une voix au passage, et marchant jusqu'à il ne savait où. Il se ferait reprendre de toute évidence, jusqu'à ce qu'une clé tombe au sol, faisant résonner le bruit métallique dans tout le garage.

     Il s'avança un peu, récupérant la clé dynamométrique qui avait cesser de tinter. Il leva les yeux au ciel pour apercevoir une jeune femme, yeux fermés, assises sur un échafaudage motorisé. Elle trahissait beaucoup de frustration, de fatigue. Il ne fallut pas longtemps à Obrim pour découvrir la nature de son problème. Il alla chercher un deuxième support élévateur. A partir de cet instant, Gold resta plongé dans sa bulle. Il s’apprêtait à agir avec passion, et rien ne pourrait le stopper, pas même celle qui semblait être la propriétaire du YT, et qui une fois deux mètres plus haut se trouvait juste à côté de lui. Il démonta la partie supérieur du blindage du réacteur avec quelques coups de cutter à fusion, déposant le lourd lambeau de métal à côté de lui. Il ôta le joint qu'elle avait vraisemblablement voulu déposer, et essaya de faire un constat. Après quelques secondes, remarquant une très légère bosse sur la culasse, il chercha un arbre à cames dans son grand sac gris. Un qui pourrait remplacer celui qui avait cassé sur le vaisseau de la jeune femme. Il en sortit le bâton métallique, avec un engrenage de bonne taille. Il retira celui du vaisseau, changea le système de rotation défectueux, et le remis en place. Il fit chauffer la culasse assez chaud pour la remettre en place rapidement, utilisant ensuite un refroidisseur de métaux de fortune pour qu'elle garde une bonne forme. Il ne restait plus qu'à reposer le joint sur la culasse et y fixer le cache soupape. Néanmoins il tendit le joint à la jeune femme, ôtant son casque de l'autre main, et lui laissant un sourire enjoué, heureux d'avoir pu aider.

     -A toi de voir si ce fils de Hutt t'as vendu une camelotte ou non.

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Abigail ne réagit pas immédiatement en entendant le raffut à côté d'elle. Elle ne remarqua pas qu'un inconnu venait de ramasser l'outil qu'elle avait laissé tomber quelques secondes plus tôt.
Ce n'est que lorsqu'elle entendit juste à côté d'elle le bruit d'un second support élévateur qu'elle se rendit compte qu'elle avait de la compagnie.
Dans un petit sursaut, elle ouvrit les yeux et tourna la tête en direction de l'inconnu. Il venait de se hisser à sa hauteur et, sans même lui demander son avis ou quelconque autorisation, s'affaira à réparer la partie un peu capricieuse sur laquelle Abi s'acharnait depuis tout à l'heure. A vrai dire, il se contenta simplement de remplacer une pièce qui était apparemment défectueuse, et qu'Abi n'avait même pas remarqué. En contemplant la scène, silencieuse, la jeune femme ne put s'empêcher de se sentir un peu stupide. Il n'avait fallu que quelques minutes à cet individu pour régler un problème sur lequel elle travaillait depuis une bonne heure. Un peu béate, et ne sachant quoi dire ni que faire, elle se contenta simplement de laisser l'inconnu terminer son affaire. Elle espérait juste que ce coup de main inespéré n'allait pas lui coûter le reste de ses crédits... Après tout, dans le secteur Bleu, l'on pouvait tomber sur n'importe quel type d'individu. Celui-ci était d'ailleurs assez louche. Il portait une armure et son visage était dissimulé sous un casque, pourtant il n'était apparemment pas armé, ou s'il l'était ce n'était pas visible. Il portait donc une armure mais apparemment pas dans un but offensif. C'était décidément assez étrange.
Alors qu'Abigail observait simplement l'individu, prêtant attention au moindre de ses gestes en attendant qu'il finisse la réparation pour entamer le dialogue, elle fut surprise lorsqu'il lui tendis le joint dans le but de la laisser finir. Agréablement surprise, bien sûr. Elle le fût également lorsque l'individu ôta son casque pour dévoiler un visage plutôt agréable à regarder, au grain de peau bleu caractéristique des Chiss.

« A toi de voir si ce fils de Hutt t'as vendu une camelotte ou non. »

Elle le dévisagea une fraction de secondes, et ne put se retenir de lui rendre son sourire. Elle était véritablement soulagée qu'il lui ait apporté son aide, et il paraissait réellement être sympathique. Abi s'empressa alors de remettre le joint en place et de fixer le cache. En effet, à présent, tout semblait beaucoup mieux s'assembler. Elle n'eut plus besoin de batailler pour resserrer les derniers boulons. Un nouveau sourire éclaira le visage d'Abi lorsqu'elle effectua le dernier serrage, en poussant un soupir de soulagement. Voilà que ce problème-ci était réglé. Son vieux cargo allait redevenir comme neuf, elle en était persuadée. Elle allait s'en donner les moyens.
Abigail entreprit d'essuyer ses paumes sur ses genoux comme elle le put, avant de tendre une main amicale au Chiss.

« Merci beaucoup. Pour être honnête, je ne sais pas si j'aurai pu trouver le problème toute seule. »

Elle se sentit un peu bête de tendre la main à un inconnu pour le remercier. C'était une chose qu'elle n'avait jamais faite. Mais sur l'instant, cela lui avait semblé être la seule chose à faire.

« J'm'appelle Abigail, au fait. » Conclut-elle en affichant de nouveau un sourire amical sur son visage parsemé de tâches de cambouis.

     Abigail attrapa le joint que lui tendait Obrim. Légèrement graissé, pas trop, une taille adéquat. A vue d’œil, l'ensemble allait tenir, mais ils n'étaient pas à l'abri d'un imprévu encore imperceptible. Elle termina sa réparation, et Obrim lui donna un coup de main de reposer le lourd blindage sur le chassie, sans manquer de renforcer un peu la soudure, juste au cas où. Elle posa les derniers boulons, serré autant qu'elle le pouvait, et poussa un soupir de soulagement. Elle essuya ses mains, évacuant les saletés collantes et grasses d'entre ses doigts, en le remerciant jusqu'à lui en tendre une. Le Chiss n'avait pas vraiment l'habitude de ce genre de réaction. Une poignée de main s'associait la plupart du temps à un contexte plus professionnel, qui donnait suite à une tête coupée ou bien simplement trouée en son centre. Néanmoins son sourire en disait long, et Obrim associa vite l'acte à une réaction amicale, ou du moins cordiale. Il n'était pas bien habitué à cette situation, et laissant un léger blanc le temps de savoir que faire, il dégagea un rire nerveux mais enjoué et rendit son salut à Abigail, prennant soin de ne pas la brusquer. Obrim avait une bonne poigne. La poigne était le second témoin de la prestance d'un homme, après ce que son apparence dégage comme effet. Il s'efforçait de paraître dur, mais cette fois-ci c'était apaisé qu'il rendit aussi son sourire à la jeune femme.

     -Merci beaucoup. Pour être honnête, je ne sais pas si j'aurai pu trouver le problème toute seule. J'm'appelle Abigail, au fait.

     Obrim regarda sa main qui venait de serrer celle d'Abigail. Il se prit d'une certaine gêne en réalisant qu'il n'avait lui pas même rincé son gant, empoignant une main plus tôt "lavée" pour la resalir. Il n'en fit cependant pas part. Il posa l'autre sur la carlingue toute propre du cargo, qui devait probablement habiter d'autres réparations nécessaires. Il donnerait un coup de main s'il le faut. Si elle en avait besoin. Il n'avait pas connu grand monde hors du cadre de la chasse depuis Draxler, son père adoptif et professeur. Il n'y avait pourtant rien de bien compliqué, de bien étonnant, mais il se sentait dépassé.

     -Tu peux m'appeler Obrim.

     Il n'y avait pas beaucoup de personne qui connaissait le véritable nom d'Obrim, puisque tout le monde l'appelait par le pseudonyme qu'il s'était lui-même choisi, et qui lui servait de nom de famille, famille qu'il n'avait pas connu dans ses souvenirs. De toute manière le nom d'Obrim n'était probablement pas son vrai nom, celui avec lequel il était né. Mais cela n'avait pas vraiment d'importance. Elle ne lui donnait pas l'envie de s'identifier comme tel. Le nom de Gold n'était peut-être pas tellement connu dans le système de Corellia, mais dans d'autres systèmes, c'était une autre histoire. Autant ne pas tout de suite avouer qu'il gagnait sa vie en meurtrier.

     Il aurait pu en rester là, retourner à ses occupation, récupérer un autre arbre, vu qu'il avait donné le sien à une étrangère, mais sans savoir pourquoi, il préféra rester un peu. La jeune femme lui inspirait de l'ambition, dans une sensibilité évidente dans l'apparence. Et puis les mécanos aussi agréables à regarder, ça ne courrait pas les rues, surtout pas celles du quartier bleu. Il rangea les affaires qu'il avait sorti dans son sac en peau brun, rengainant de même son cutter dans l'avant-bras armuré. Son regard de porta une nouvelle fois sur le cargo.

     -Qu'est-ce que tu fais avec cette grosse bête? De l'import-export ?

     Si tel était le cas, et de manière légale, elle n'aurait surement pas mis les pieds dans ce trou à rat womp. Mais il préférait faire comme s'ils n'auraient rien à se reprocher. Après tout, il ne se considérait lui-même pas comme hors-la-loi, alors qu'il ôtait la vie pour gagner la sienne.

Il est vrai qu’Abigail fut un peu surprise par la ténacité de la poigne du Chiss. Elle sentit cependant sa retenue dans son geste, et l’apprécia. Il avait sûrement pour habitude de serrer des mains bien plus volumineuses que celles de la jeune contrebandière.
Malheureusement, la seconde suivante, l’inconnu, dans un geste détaché, vint poser son gant encore sale contre l’acier fraîchement nettoyé de son vaisseau. Abi ne put retenir une légère grimace à la vue de ce geste. Elle secoua alors la tête pour se remettre les idées en place et tenter d’effacer sa moue. Après tout, le pauvre ne pouvait pas savoir qu’Abi avait passé quasiment toute la matinée à briquer son nouveau joujou adoré.
Il lui indiqua alors que son nom était Obrim, ou que tout du moins, elle pouvait l’appeler ainsi. Les présentations étaient donc faites. Passé ce moment de courtoisie, la jeune femme laissa s’échapper une remarque tout en essayant d’adoucir le ton de sa voix pour ne pas paraître trop abrupte :

« Obrim. Ok. Euh… Enchantée. Mais… Dis, ça t’embêterai d’enlever ta main de là ? »

Elle désigna de la tête la main du Chiss appuyée contre le vaisseau. Aussi douce et innocente qu’elle pouvait paraître, il arrivait souvent à Abi de passer pour une sale gosse asociale, tant elle pouvait être dure dans ses paroles. Elle n’attendit même pas de réaction, sa remarque était un simple avertissement qu’elle n’avait pu retenir. Bon, au moins, ce monsieur était prévenu d’emblée : Abigail n’était pas qu’une jolie jeune femme sans caractère. Elle avait du mordant, bien caché sous son air enfantin.
Elle reprit cependant la suite de la conversation sur un ton parfaitement normal. Elle appréciait d’ailleurs la façon dont Obrim s’intéressait à son vaisseau, et ne put s’empêcher de ressentir une pointe de fierté.

« De l’import-export ? Ahah, oui, plus ou moins ! » C’était sûrement le terme le plus "légal" qu’on pouvait employer pour désigner ses activités.

« En fait, j’effectue toutes sortes de livraisons. Disons que je me fournis où je peux, et que je livre n’importe qui du moment qu’on me paye. Je suis pas regardante sur le client, quoi. »

Enchaîna-t-elle avec un sourire en coin. Le sous-entendu était clair, et pourtant il ne dévoilait en rien la réelle nature de ses activités. Après tout, elle ne savait pas vraiment à qui elle avait à faire. Cet individu pouvait parfaitement être un espion au service d’on ne sait qui. Aussi préféra-t-elle ne pas en dévoiler plus.

« Et toi, je peux te demander ce que tu fais dans le coin ? Je dois dire que je ne m’attendais pas à un coup de main gratuit. »

Même si celui-ci avait été plus que bienvenu. Cependant, elle regretta presque aussitôt ces paroles, de peur que cela ne donne l’idée au Chiss de lui demander quelconque paiement en contrepartie de son aide. Non pas qu’elle ne pouvait pas payer, seulement si elle avait eu le choix, elle aurait préféré garder son argent et se débrouiller seule.

     Dans cette situation méconnu, une simple discussion entre deux adultes juste entrain de faire connaissance, Obrim semblait perdre un peu son tact et sa dureté. Il était bien plus alaise dans les contextes plus brutaux. Dans le cadre d'une chasse ou d'un contrat à la prime, évidemment. Il pensait au fait de n'avoir jamais véritablement eu de mentor dans ce domaine pourtant si naturel. Il n'était pas naturel, cela devait se ressentir. Mais plus que tout il se voulait juste et droit. Cette femme avait juste besoin d'un coup de main, et il pouvait juste reprendre sa route après le lui avoir donné. Et en parlant de main, il réalisa trop tard, après la remarque d'Abigail, qu'il était entrain de la voir glisser sur la carlingue. Le gant plein de graisse tenait mal en stabilité et laissait une traînée collante et poisseuse.

     -Ah, oui, excuse moi. J'ai pas fais gaffe...

     Il ôta ses gants pour les ranger à la va vite dans sa grande sacoche, révélant ses main toute bleues mais bien propres. Ne pas se salir les mains. Drôle de principe pour un tueur à gage qui exécutait des contrats sans prendre la peine de se demander si la cible est la bonne ou la mauvaise personne dans l'histoire avec tous les morceaux. Avant de refermer le sac, il en sorti un genre de chiffon des vieilles années, en tissu blanc grisé, et nettoya un peu les traces qu'il avait laissé. Il n'avait pas tout son matériel sur lui, donc de toute évidence, elle repasserait un coup dessus. Il la regarda d'un air gêné, et croisa ses bras pour ne rien toucher de plus, et l'écoutant sur ses activités.

     -En fait, j’effectue toutes sortes de livraisons. Disons que je me fournis où je peux, et que je livre n’importe qui du moment qu’on me paye. Je suis pas regardante sur le client, quoi.

     Même si selon de telles dires Agibail passait pour une commerçante parfaitement droite dans ses bottes, sa situation ici laissait penser que cela n'avait rien d'aussi simple. Elle était probablement contrebandière, et d'un côté c'est ce que préféra croire le Chiss. Le coin était tout sauf tranquille, et procéder à un commerce légal dans ce quartier aurait fini de toute manière une pure arnaque et pas dans son sens. Elle savait très certainement se défendre, un minimum, et habituée à traiter avec des pirates et des mercenaires peu recommandables. Elle lui retourna d'ailleurs sa question.

     -Je ne suis pas censé être ici. Je me suis retrouvé là juste avant que le blocus autour de la planète n'apparaisse. Pour ce qui est du reste, disons que je gagne ma vie en résolvant les problèmes des gens. Et ça paye pas très bien ici,
pour tout t'avouer. Mon vaisseau à moi est bloqué sur un autre système. Et de rien pour le coup de main. Entre gens civilisés,
faut se serrer les coudes!

     Il ne revint pas sur le terme de gratuité. Elle l'avait mentionné et même si cela apportait un genre de notion de service dans le sens professionnel du terme, il préférait voir cela comme un coup de main pour quelqu'un qui en avait besoin. Si avait voulu être rémunéré pour son geste, il aurait fait savoir dès le départ et lui aurait tendu une fiche de contrat. Non, c'était même un plaisir pour lui que partager un peu de son savoir-faire, une manière de montrer à son mentor baigné dans la force qu'il ne garderait pas ses techniques enfouies dans son seul être. Un geste, ni plus ni moins.

     Après il fallait quand même être sûr que ça fonctionne. Il adressa un sourire presque patriarcal à Abigail et ajouta une note avant d'envisager de la laisser tranquille.

     -Eh, c'est pas tout mais faudrait vérifier que ton moteur fonctionne normalement, on fait un petit tour?

     Il se fit glisser de son élévateur et retomba genoux pliés un peu en dessous du vaisseau, sur le sol poussiéreux du hangar. Il tira l'élévateur pour laisser de la place et revint vers elle, tendant une main pour qu'elle descende à son tour, sans se risquer à passer pour une vielle avec les commandes de l’échafaud.