Korriban. A peine l'avait-elle retrouvée qu'elle s'était enfermée dans son antre, creusée quelque part loin dans les bas-fonds de l'Académie. Il y faisait sombre, il y faisait froid, et l'air suintait d'une odeur inqualifiable, sorte de mélange de feu de bois et de cuir battu. Une odeur qu'elle appréciait, mais qui en rebutait plus d'un. Du reste, odeur ou non, rares étaient ceux qui s'y aventuraient car rares étaient ceux qui cherchaient sa compagnie. Darth Zeon, tout au plus, son ancien Maître et sans doute le seul à véritablement comprendre l'art qu'elle pratiquait. Et c'était tant mieux. La solitude lui allait bien, et elle la séparait du reste de l'Ordre ; à pousser la réflexion, elle en tirait même une sorte de plaisir. Le silence était propice à la concentration, et elle gardait un rien jalousement pour elle ses diverses expériences. Elle n'avait rien à voir avec eux, ils n'avaient rien à voir avec elle. Point. Tout au plus, ils étaient un moyen justifié par le dessein final. D'autant que la communauté des Sith était à des kilomètres de celle des Sœurs de la Nuit. Alors qu'elle gardait d'agréable souvenirs des feu de camps, où danse et magie se mêlaient au rythme de quelque instrument tribal, elle ne s'était, malgré les années, toujours pas habituées aux coutumes quotidiennes de l'Ordre. Tant et si bien qu'elle en était venue à exécrer les entrainements communs, fuir les tablées du soir mais plus que tout, surtout, vomir les discours interminables des vénérables membres du Conseil Noir. Quelle perte de temps ! Et le pire, c'est qu'il fallait s'attendre à un prochain baratin ! 

Bien avant son arrivée sur la plateforme d’atterrissage, elle avait compris que quelque chose s'était produit. Quelque chose que les Siths, et l'Ordre tout entier, n'avaient pas prévu. Elle avait ressenti un étrange ébranlement dans la Force, trop lointain et trop furtif cependant pour en tirer quoi que ce soit. Mais il n'avait pas fallu attendre bien longtemps pour connaitre le pourquoi du comment. La planète, d'ordinaire silencieuse et un rien menaçante, s'était transformée en fourmilière jacassante, ce qui lui avait arraché un rictus dédaigneux. On aurait dit des ménagères commentant le dernier potin, à des lieux des fiers et inquiétants enseignés du Côté Obscur. Comme quoi, elle ce petit voyage remettait - si besoin était, les choses en place. Pendant qu'ils picoraient dans une marre de boue que les plus téméraires appelaient "quête du pouvoir", elle s'en était allée retrouver ses racines et arracher de précieuses informations. Si précieuses qu'elle en venait même à se demander si ses acolytes méritaient qu'elle leur en fasse part. Dans le fond, elle pouvait très bien garder le déroulé des évènements pour elle, et ainsi s'éviter la honte de donner l'équivalent d'un cristal kyber à une bande de hutt en chaleur ! Quant aux nouvelles qui les mettaient en émois, c'était si risible qu'elle failli traverser l'Académie à gorge déployée de rire. Vexés. Voilà. Ils étaient vexés. Vexés de ce que le grand, le magnifique, le prisé des plus prisés - Darth Millenial - n'ait pas daigné informer ses sbires de ses projets d'utiliser la fameuse Bombe Psychique Sith sur Naboo. « Sans doute a-t-il compris que tergiverser avec les technocrates du Conseil Noir ruinerait son effet ; il a pris les devants. Il a pris le pouvoir. Point. A l'occasion, il faudrait peut-être songer à relire les préceptes du Code que certains ne semblent pas encore avoir tout à fait intégrés ! »

Retranchée dans sa tanière - à la décrire, on pouvait seulement distinguer vaguement un lit et quelques objets personnels, derrière la montagne de grimoires, d'artefacts, de potions, d'ingrédients, d'animaux mort ou vivants et les autres nécessités qui lui servaient, elle avait allumé un feu au centre de la pièce et s'était installée en siège indien devant les flammes qui commençaient doucement à prendre de l'envergure. De temps en temps, elle y jetait des espèces de graines d'un noir de jet, qui faisaient changer la couleur des braises - passant de dorée à rouge, puis vert pour prendre, enfin, une teinte légèrement violacée. Elle ferma les yeux, inspira plusieurs fois et laissa son esprit rejoindre les limbes dont elle seule maîtrisait les secrets. Le Côté Obscur. La Communion. La parfaite symbiose avec la Force... C'est alors qu'elle la sentit. Une présence aux portes de son repaire ou plutôt, derrière le mince rideau composé de fils de fer et de laine en décomposition, et qui semblait hésiter à entrer. Mes yeux toujours fermés, Wyrlok s'entendit l'interpeller, d'une voix doucereuse, presque murmurante : « Entre. Entre donc, puisque tu as fait tout le chemin. On ne t'a pas appris qu'il ne fallait pas se cacher derrière les portes ? C'est indiscret... »