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Close your mind or lose control (Ylenia)

Devon Thek
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Close your mind or lose control.


Ylenia & Devon

Close your mind or lose control (Ylenia) AMGLYVB

Devon commençait à tourner en rond dans la carcasse métallique du destroyer. Cela faisait combien de jours qu’il n’en était pas sorti ? Il ne le savait pas, ça lui semblait être une éternité. Lors des rares instants de  temps libre dans son emploi du temps, il se plaisait à effectuer « ses petites sorties » comme il aimait les appeler. Faire la tournée des bars et tavernes, aller gambader dans les rues et les lieux publics, tout était bon pour changer d’air, penser à autre chose et surtout faire de nouvelles rencontres. Inutile de préciser qu’il entendait par là avoir des relations qui ne duraient bien souvent guère plus d’une soirée. Bon, ça durait peut-être parfois plus d’une soirée, mais le chevalier avait compris qu’il devait éviter de s’attacher trop longtemps de cette façon à une personne pour éviter que des sentiments se développent, sinon c’était le début des problèmes.

Cependant, il ne savait pas s’il avait le droit de quitter le vaisseau ou s’il devait demander une quelconque autorisation à quelqu’un. Autorisation qui serait très certainement refusée au vu des motifs qu’il avancerait. De plus, leur corps expéditionnaire était venu dans le système Corellien afin d’accomplir le dessein du Suprême Leader, d’aller au bout de la mission qu’il leur avait confié. Avec l’activation de la station Centerpoint et ces traîtres de dissidents qui osaient remettre en doute les plans de leur maître à tous, les objectifs étaient-ils toujours d’actualité ? Devaient-ils les mettre de côté afin de se concentrer sur les dissidents ? A son humble avis, les loyalistes ne devaient pas leur donner ce plaisir, ils étaient là pour accomplir les ordres de Snoke et c’est ce qu’ils devaient faire. Par leur inaction, il y avait un risque que Corellia se rallie de nouveau à la Nouvelle République et à la Résistance. Cela ne devait pas arriver !

Le jeune homme patientait, rongeant son frein en attendant que la situation se débloque un peu. Il avait tant envie de bouger, d’être utile et de servir à quelque chose. Devon voulait quitter ce cercueil spatial qui commençait à l’opprimer. Aujourd’hui et les jours précédents, il s’était adonné à un entrainement intensif, un bon moyen pour lui afin de penser à autre chose que le climat de défiance et de trahison qui s’était installé au sein des forces du Premier Ordre, une situation qui l’énervait au plus haut point. Cela lui permettait de trouver un exutoire à sa colère, qu’il s’exerçait en solitaire ou en compagnie d’un autre chevalier.  Mais surtout, le jeune homme voulait progresser, être toujours opérationnel et donc paré si on lui confiait une tâche, il ne souhaitait pas se reposer sur ses lauriers. Relâcher sa vigilance au vu des derniers événements pourrait l’amener à commettre de graves erreurs.

Enfermé dans sa cabine, Devon prit le temps de méditer afin de rechasser les événements récents pour essayer de prédire ce qui allait se produire, pour lui le conflit entre le pro-Snoke et les dissidents semblait inéluctable, il restait plus qu’à savoir quand l’affrontement prendrait place et sur qui il pourrait vraiment compter à ce moment-là. Lorsque ses yeux se rouvrirent, son esprit toujours bien actif, il ne saurait pas dire combien il était resté dans cette position, probablement plusieurs heures. Il se leva tout en faisant quelques larges mouvements afin de se détendre et échauffer ses muscles et consulta l’heure sur son holopad. Déjà ! Il n’aurait pas pensé à cela, il se faisait déjà tard et son estomac le tiraillait doucement, la faim se faisant sentir. S’il ne se dépêchait pas, il allait manquer le dernier service et serait obligé d’attendre le lendemain matin !

Saisissant son arme au passage, il quitta sa cabine et rejoignit le mess à grandes enjambées. Il ne croisa presque personne dans les couloirs, il croisait les doigts pour qu’il ne soit pas trop tard. Devon arriva à sa destination, les innombrables tables étaient vides et débarrassées , à l’exception de trois ou quatre personnes solitaires qui semblaient encore dîner. Le chevalier s’avança vers le comptoir où un droïde était encore à son poste. Ouf ! Sauvé ! Il prit ce qui restait, car en fin de service, il ne devait pas s’attendre à un mets de premier choix. Son plateau dans les mains, il se retourna, il avait l’embarras du choix pour se placer. Devon commença à s’avancer dans l’allée centrale et continua à scruter les différents individus présents dans la pièce. Il crut reconnaître un visage familier, enfin familier, c’était un grand mot, il avait croisé la jeune femme à quelques reprises, de vue uniquement. Son comportement l’intriguait, il pouvait peut-être profiter du repas pour savoir ce qu’il en était.

Oui c’était décidé, il tenterait de ne pas manger seul ce soir, puis il fallait dire qu’elle avait un joli minois, ça pourrait être divertissant. Arrivant en face d’elle, il posa son plateau sur la table et commença à s’asseoir en faisant mine de se concentrer sur son repas :« Du gratin d’eopies ! C’est loin d’être mon plat préféré, mais bon, je meurs de faim,  je vais devoir me contenter de ça… ». Sa tête se releva pour plonger son regard dans les yeux de sa voisine, il la regarda de cette manière pendant vingt secondes d’un air froid, cela pouvait presque être gênant, mais pas pour Devon. Un fin sourire illumina finalement son visage, il semblait être interloqué par quelque chose, surpris. Il jeta des coups d’œil par-dessus ses épaules, à droite et à gauche. Le chevalier posa sa main sur la table pendant qu’il posa sa main sur son torse pour ajouter du crédit à la mise en scène. :« Attends voir… Cela doit bien faire trente secondes que je suis assis devant toi et tu n’as même pas cherché à m’esquiver, à changer de table ou à fuir. Et bien dis donc ! Il y a du progrès à ce que je vois ! En vrai, c’est quoi ton problème, avec nous-autres, les chevaliers ?».

Il mettait les pieds dans le plat, espérant percer le mystère sur le comportement de la jeune femme, parfois il fallait mieux  ne pas prendre de gants pour arriver à obtenir des résultats. Les présentations n’étaient pas faites, il tendit sa main par-dessus la table pour la saluer : :« On ne se connait pas. Moi, c’est Devon. Devon Thek. Et toi ?».
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Souffrir est absurde et laid. Toute souffrance est un désordre... Mieux vaut s'accommoder des choses, ou les briser que de pleurer à la lune. ― David-Neel

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Ylenia & Devon

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Lorsque Corellia avait été en vue, elle s’était collée à la vitre, fixant avec envie l’immensité de l’espace découpée si suavement par un point vert et bleu. Corellia était de nature et de printemps, l’atmosphère accueillante et claire, si différente de sa planète d’origine. Elle aurait voulu prendre permission et sauter dans les lacs d’eau fraîche, cueillir herbe et fleurs et même s’en faire de ridicules colliers mais l’uniforme la sanglait et il y avait des protocoles et des missions. « Plus tard. » Avait-elle murmuré, les doigts fébriles tapotant l’acier du destroyer. Après. Il y avait tant de choses à faire, tant d’éléments à préparer avant. C’était une théorie populaire, si vérifiable dans le temps, que si l’on remettait à demain ce que l’on pouvait faire aujourd’hui, on finissait par ne jamais le faire. Elle pressa son nez et ses rêves un peu plus sur la fenêtre. Quand ils quitteraient ce système, il lui faudrait avoir réussi une mission, s’être plongé le corps et l’âme dans la nature ondulante de Corellia et avoir trouvé la clé, enfin, contre ceux dont les pouvoirs avaient effrayé le bureau il y a peu sous forme de vidéo.

 Ylenia fronça le nez, la douceur du métal sous les doigts. Froid. Elle pouvait presque en sentir l’odeur sur sa langue et elle jeta un coup d’œil aux alentours avant de rajuster l’épingle du bureau des renseignements sur le revers de sa veste.

 Chaque chose en son temps.

 Les messages de l’holonet défilaient devant ses yeux distraits, le bruit diffus de la cantine en protection fantomatique tout autour d’elle. Elle avait appris à sélectionner ce qui semblait important, à trier les pistes à suivre dans ces palimpsestes des temps modernes mais on était ce qu’on était et Ylenia était revenu à l’annonce des nouvelles modes en vigueur sur Corellia. Pour se fondre dans la masse, il suffisait de s’adapter. Elle releva ses cheveux dans une moue perplexe, tâchant de reproduire à l’identique les coiffures corelliennes mais le dessin trop alambiqué lui fit abandonner et elle préféra croquer dans sa barre protéiné, consultant à nouveau la vidéo du combat durant le mariage des régicides mise en ligne il y a peu de temps. Il y avait une fascination terrifiante à l’illumination des sabres-lasers et de la confusion régnante sur les mouvements des mains qu’ils avaient et Ylenia ne s’aperçut pas immédiatement qu’elle serrait trop fort le reste de son repas, ni même qu’elle fronçait bien trop ses sourcils.

 « Du gratin d’eopies ! C’est loin d’être mon plat préféré, mais bon, je meurs de faim, je vais devoir me contenter de ça… » Elle réprima un sursaut, le doigt déjà sur le bouton d’alimentation de son holo-pad. L’image disparu tandis qu’elle reposa sa barre, les marques des doigts fins imprimés dans la pâte kaki.

 Ah.

 Un chevalier Ren.

 Comment osait-il venir s’installer pile devant elle ? Elle lui fit les gros yeux mais ce fut peine perdue et ne sembla même pas le faire trembler sur son siège. Un froussement de lèvres plus tard et Ylénia rangea son holopad, prête à partir.

Sauf que.

Sauf que.

(Chaque chose en son temps)

 Elle hésita. La langue vint tapoter le tranchant des dents, les informations défilant dans son esprit. Chevalier Ren. Parle bien. Loyal. Loyal c’était la partie primordiale, la plus importante. Lui et la fille au regard déterminée avaient été irréprochables il y a peu. Ils n’en demeuraient pas moins des armes chargées que l’on laissait entre des mains corrosives. Ylenia n’avait aucune confiance en les possesseurs de la Force, leurs factions trop mouvantes et leurs fidélité soumises à des liens qu’elle ne comprenait pas.
 Ils étaient trop puissants, le combat au bout des doigts si aisé et élégant, le regard trop perçant et l’habileté à s’infiltrer dans les esprits et les âmes …. De la triche, voilà ce qu’ils étaient. De gros tricheurs. Et que faisait-on quand on avait des marathoniens qui empruntaient des raccourcis ? on mettait de gros murs bien en briques pour leur couper le chemin ! C’est exactement ce qu’elle devait faire et n’ayant absolument aucune notion de comment monter des murs, il allait lui falloir du temps probablement. Un peu - pas trop - la patience n’ayant jamais été une de ses plus grandes vertus. « Balivernes. » Lui répondit-elle, le visage prenant la forme des idées moulinant dans sa petite tête. Elle avait pensé à demander après mais les opportunités ça ne se refusait pas, pas plus que les signes cosmiques.

 Son corps se détendit légèrement, d’ici il n’avait pas l’air aussi terrifiant que ceux de la video. Un leurre évidemment mais il était plus simple de se concentrer sur la façon dont sa veste lui tombait sur les épaules, sur la mèche de cheveux noirs un peu décoiffé, sur l’éclat des yeux et le sourire en coin. Tout ce qui pouvait rendre humain était le bienvenu et Ylenia inspira discrètement avant d’afficher un petit air hautain. Tout de même, il avait un sacré toupet. « Je n’ai pas de problèmes avec les chevaliers, juste avec toi. » mentit-elle éhonteusement.  Na ! Il n’avait qu’à pas se montrer trop observateur ou curieux. C’était son job à elle ça. Lui n’avait qu’à se contenter d’aller tuer des gens et revenir tout couvert de poussières et de sang. « On ne se connait pas. Moi, c’est Devon. Devon Thek. Et toi ? » Elle ouvrit la bouche avant de regarder la main. Lui aussi, il pouvait faire comme les autres… bouger des objets et des corps, s’infiltrer là où il ne fallait pas, sentir des choses auxquels elle n’avait pas accès… surement il n’était pas fait de la même manière… surement… « Devon… à une lettre prêt c’est adéquat. » L’arc des lèvres se modula en une moue amusée avant qu’elle ne tende finalement sa main à son tour, presque nerveuse à l’idée d’un contact.

 Puis rien.

 Elle cilla sans comprendre, serrant à peine à son tour la paume offerte. Les armes avaient une normalité dangereuse sous la peau et elle releva un regard clair vers celui qui venait de se présenter. « Agent Swiftlight du bureau des renseignements. » Elle réprima à peine une oeillade diablotine.« Mon prénom t’est inutile et tu n’as qu’à la trouver par toi-même, Devon. » Cette fois-ci, elle lui offrit un sourire taquin par pur plaisir d’afficher le fait qu’elle savait quelque chose sur lui que lui ne savait pas encore sur elle. C’était tout de même bien plus amusant. « Moi je serais toi, je continuerais à mourir de faim. On dit, » Elle se pencha sous un air de parfaite conspiration. « que les cuisines mélangent l’éopie avec les insectes trouvé dans la blanchisserie. Miam miam. Bon appétit ! » Elle croqua dans sa barre d’un air ravi, le mettant au défi de prendre une bonne cuillerée de son plat d’un coup d’œil mielleux. « Tu es obligé de te promener avec ton sabre-laser ? Tu n’as pas d’ennemis sur ce destroyer. Puis… vous êtes censés sentir ce genre de choses… non ? » Si la question semblait innocente à l’abri de l’écart entre eux formé par la table, elle ne l’était pas tant que ça. La Force était un concept nébuleux pour l’humaine qu’elle était, presque fait de légendes et de mythes, coulés en tout cas dans la robe d’or de leur leader suprême et les bottes noires de Kylo Ren.

Devon Thek
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Ylenia & Devon

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Malgré sa petite introduction pour réussir à s’asseoir à table sans qu’elle est le temps de broncher, il restait attentif à la gestuelle de la jeune femme et à tout signe qui pouvait trahir son comportement. Elle lui fit des gros yeux, vous savez, un peu comme le ferait un parent à un enfant venant de réaliser une bêtise, afin de lui faire comprendre qu’il avait fauté. Cela n’eut aucun effet sur Devon, bien qu’il aurait bien eu envie de rire d’elle pour le coup, comme si une telle tentative allait l’effrayer ou lui faire changer de table.  Quand il la vit ranger son holopad, il se demanda si elle allait déjà battre en retraite, il ne fallait pas grand-chose pour la contrarier celle-là. Après tout, si elle voulait partir, elle faisait ce qu’elle souhaitait. Le chevalier ne ferait rien pour la retenir. Cependant, sa première tentative pour essayer de créer une dialogue aurait été aussi la dernière, il n’aurait plus fais d’efforts. Il n’allait tout de même pas lui courir après comme un petit porg, non mais !

Il pensa un moment qu’elle allait s’en aller, mais elle n’en fit rien, ils restèrent un moment assis en face de l’autre. Les deux individus semblaient de jauger afin de savoir ce que valait l’autre. En tout cas, il sembla avoir afin retenu son attention quand elle balaya toutes ses paroles d’un seul mot avant de finalement prendre le temps de lui répondre et de se présenter. Un comportement des plus étranges. Elle était assez mystérieuse pour lui. A plusieurs reprises, il avait surpris son petit jeu. Elle changeait de couloir ou de pièce dès qu’elle croisait le chemin d’un chevalier, elle avait fais le coup à Devon quatre ou cinq fois déjà. C’est pour cela qu’il l’avait questionné sur la raison de sa façon d’agir. La jeune femme vint à lui répondre que le soucis, ce n’était pas les autres, mais tout simplement lui.

Il fut interloqué par sa réponse, il ne s’était pas du tout attendu à ça. Si cela aurait été vrai, le chevalier se serait probablement emporté contre elle, mais il savait que ce n’était pas le cas, car il avait surpris un comportement identique envers les autres chevaliers. C’est cela qui lui permis de garder son sang-froid, dans un haussement de sourcil, il émit un rire moqueur à l’égard de sa voisine : « Si je suis le problème, alors tu peux prendre ton plateau et aller manger ailleurs… Je ne te retiens pas.». C’était lui qui était arrivé en dernier, mais voilà, il n’allait pas se laisser marcher sur les pieds par la demoiselle, elle pouvait toujours courir. Il lui fit alors remarqué : « Comme tu as adopté le même comportement pour l’ensemble des chevaliers, il reste à définir ce qui te pousse à agir ainsi. Un  préjugé par rapport aux Ren peut-être ? Ou bien est-ce les rumeurs que tu as entendu à notre sujet qui t’effraient tant ?».

Il ne comprit pas l’allusion qu’elle fit sur son prénom, il avait beau chercher, Devon ne vit pas où elle voulait en venir. Il laissa passer, ne souhaitant pas s’attarder sur ce sujet. La jeune femme vint à le saluer, il ne la lâcha pas des yeux. Elle se présenta comme l’agent Swiftflight, du bureau des renseignements du Premier Ordre. Une subalterne de la directrice Gregorya, c’est intéressant. La miss le mit au défi de trouver son prénom, elle ne devait pas savoir à qui elle parlait. Le chevalier adorait relever les défis, se donner les moyens de réussir pour décrocher la victoire. Il commenta donc, légèrement amusé à son tour : « Je finirais par le savoir, d’une manière ou d’une autre…».Même s’il devait pénétrer son esprit pour cela. Tout était bon pour l’emporter, même s’il devait user de la Force. Peut-être ne s’en rendrait-elle-même pas compte, il pourrait ainsi dérober l’information en toute impunité.

L’agent se pencha au dessus de la table, sous un air de confidence, Devon entra dans son petit jeu et l’imita. Pour résumé, elle lui conseillait de ne pas manger son plat, car selon ce qu’elle affirmait l’hygiène était loin d’être impeccable dans les cuisines. Et il se pourrait également que tous les ingrédients du gratin ne figuraient pas sur la carte, dont des insectes… Quelque peu sceptique aux propos de la jeune femme en son intérieur, il continua tout de même à rester dans son petit jeu. Pinçant les lèvres et hochant doucement la tête à plusieurs reprises, il lui fit remarquer : « Tu sais, je ne prête pas trop attention aux « On dit ». Cela reste des rumeurs, des bruits de couloir. Y prêter attention pourquoi pas, mais de là à croire tout ce que l’on peut entendre… Enfin je suppose que l’agent, si expérimenté que tu es, sait surement tout ça, n’est-ce-pas ?»Une façon plus ou moins subtile de mettre en cause ses capacités, après tout, c’était de bonne guerre, lui rendant coup pour coup les provocations qu’elle lui lançait. Elle semblait si jeune, probablement avait-elle quittée l’académie il y a peu, du moins c’était son impression. « Puis, tu sais, les insectes, c'est bourré de protéines, c'est excellent pour la santé!» avait-il ajouté pour dédramatiser un peu la situation.

Devon ne quittait jamais son sabre-laser, c’était son arme de prédilection, mais c’était bien plus que cela à ses yeux. Il constituait également un héritage, celui des Ren. Combien de personnes l’avait-il porté avant lui ? Il l’ignorait, mais il était hors de question de le perdre ou de se le faire voler. Non, c’est pour cela qu’il le portait en permanence. Un danger pouvait survenir à tout moment, baisser sa garde, c’était se mettre volontairement en péril. Il fallait qu’il reste ouvert à la Force, cette dernière pouvait le prévenir d’une menace imminente ou d’un événement. Mais ça miss Swiftflight ne pouvait pas le comprendre. « L’ennemi se cache souvent où on l’attend le moins. La réunion en est le parfait exemple. On m’a appris à ne jamais baisser ma garde et c’est ce principe qui fait que je suis toujours en vie aujourd’hui. C’est pour cela que je ne quitte jamais mon sabre-laser, ce dernier s’avère souvent une arme suffisamment dissuasive afin de calmer les esprits et leur faire oublier d’entreprendre toute action hostile sans que j’aie besoin de l’utiliser. »Elle se montrait bien curieuse, une vraie pipelette tout à coup, elle le questionna sur la Force, ce à quoi il répondit : « Il nous est possible de percevoir un danger imminent ou un événement, plus ou moins éloigné dans le temps. Je dirais que cela dépend principalement de notre faculté à  laisser notre esprit bien ouvert afin d’être en communion avec la Force.»
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Souffrir est absurde et laid. Toute souffrance est un désordre... Mieux vaut s'accommoder des choses, ou les briser que de pleurer à la lune. ― David-Neel

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Les iris brillèrent un peu sous les lumières artificielles de la pièce. « Tu as mauvais caractère. » Elle le pensa mais ne le dit pas toute entière happée par l’exubérante indifférence qu’il affichait. C’était là une de leurs caractéristiques d’ailleurs, elle l’avait remarqué déjà du coin de l’œil, l’intérêt taciturne au bout des cils : ils marchaient comme en dehors du monde, survivre leur était aisé, l’âme flottait et ne faisait qu’un, avec la Force ou peu importe la façon dont ils appelaient ça.

Il la contrariait sans s’en apercevoir et elle cilla avant d’arborer son sourire de caramel.

Sa question aussi la froissa dans son insondable vérité abrupte. Elle n’y répondit que par une moue qu’elle aurait aimé plus aiguë mais qu’elle savait encore trop tendre. Bien sur qu’elle était effrayée, qui ne le serait pas eut-elle l’air de lui dire dans une œillade circonspecte. Les pouvoirs des chevaliers de Ren ne faisaient qu’accentuer les limites de son propre corps. Même les droïdes pouvaient plus et la technologie protégeait jusqu’à un certain point seulement. C’était rageant d’être limité, de savoir que d’autres pouvaient plus avec si peu, qu’il avait la capacité de lui pénétrer l’esprit sans qu’elle ne puisse rien faire. A son corps défendant. Elle plissa légèrement ses yeux, l’or des pupilles filtrant en tempête envieuse, les lèvres closes sur le sujet. « Je finirais par le savoir, d’une manière ou d’une autre…» Tricheur. Ce fut la façon dont il le dit qui la maintint sur sa chaise, il n’y avait pas de malveillance dans sa voix, juste une ironie tranchante et délicieuse - ils jouaient dans le même camp après tout - comme une promesse de jeu qui finit par la faire sourire. Elle aimait bien les défis même ceux aux cheveux trop noirs et aux colères trop promptes.

Peut-être même qu’elle les préférait plus encore ainsi.

Devon ne goba pas son mensonge et elle lui aurait bien volontiers jeté un « pffff » sonore à la figure mais il plaisanta à propos de protéines et un rire lui échappa malgré elle. Du reste, il avait raison à propos de son arme, évidemment, elle se garda bien de le lui dire pourtant. Ylenia contempla un instant le sabre-laser éteint, sagement posé non loin du plateau. Elle n’en avait jamais vu un allumé tant ils étaient rares, seulement ceux sur l’holonet lors d’un mariage maudit qui faisait depuis la une des tabloïds des devantures cosmiques. Les doigts picotèrent de l’envie de le prendre, soupeser et découvrir mais elle repoussa momentanément l’idée. « Ah… la réunion. » Le sourcil s’arqua dans une tension secrète. Il en parlait avec naturel et Ylenia jeta un coup d’œil rapide et discrets aux alentours. Trop de naturel. Ce qui ne se savait pas encore au sein de l’armée du Premier Ordre ne pouvait pas faire de mal. « Je suis obligée de demander du coup. » Elle s’était levée, l’uniforme noir bordé d’un carmin sombre, trop sévère pour la frimousse capricieuse qui était la sienne. « Tu me perçois ? » Elle pencha son visage, la mine piquante et l’invitation coquette aux coins des lèvres. « J’aime bien l’idée d’être un danger imminent. » Le tour de la table se fit en à peine trois pas, le temps de tirer la chaise et de la mettre près de lui. Il pourra parler tout son saoul des réunions et des ennemis tapis dans l’ombre du Supremacy ainsi.

Le sourire creusa une fossette fantomatique et elle fixa à nouveau l’arme. « La prochaine fois que je descends à Tyrena, j’irai m’acheter un blaster. Un tout léger que l’on peut cacher sur soi. Je sais que l’armurerie pourrait m’en fournir un à l’effigie de notre Ordre mais c’est une lubie, je ne me suis jamais rien acheté toute seule. Je peux ? » Ça n’avait pas l’air si effrayant finalement comme pièce d’équipement, le poids dense entre ses mains. « Tu n’es pas choqué ? Par ton camarade ? Chevalier mmmm Caspian je crois ? Je n’ai pas la mémoire des noms. » Menteuse. Le regard était toujours sur l’arme. Wes Vassian. Classification: chevalier Ren. Dissident. Elle se souvenait très bien du grade et des mots, ses notes lestes sous le stylo biométrique lors de la dernière réunion et sans avoir la mémoire précieuse et infinie de sa supérieure, Ylenia conservait facilement les détails de ce genre. « Tu sais, je suis intriguée. Fais-le. » De loin, on aurait pu croire à une simple conversation anodine, peut-être un flirt dont Devon était si terriblement coutumier, seul l’irrégularité des battements de cœur d’Ylenia pouvait être indice de l’anormalité de l’événement. Elle inspira d’un mouvement sec, le corps un peu fébrile en contraste avec la légèreté de sa voix. « Devine mon prénom. » La main passa du sabre au bras de son possesseur. « Attends, d’abord il faut décider d’un gage. Si tu y parviens, tu auras prouvé que tu en étais capable et j’irai voir dans les cuisines si tu ne peux avoir quelque chose d’un peu plus ragoutant que ce hachis. Par contre, si tu n‘y parviens pas… » Oh cette fois-ci, le sourire se fit nettement plus diabolique, tout de dents d’ivoire et d’éclats solaire vêtus.



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Devon Thek
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Ylenia & Devon

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Les chevaliers de Ren étaient de précieux outils aux mains du Suprême Leader, totalement soumis à sa volonté et censés être fidèles, il pouvait exiger d’eux tout ce qu’il souhaitait. Devon n’avait jamais désobéi à aucun ordre, enfin il n’avait jamais reçu d’ordre direct de la part Snoke. Dans tous les cas, ce fut Kylo, et maintenant Gal’aad, qui lui délivrait ses ordres de mission. Pour la plupart, ils avaient été formés aux préceptes de la Force dès la fin de leur enfance chez les Ombres. On leur avait enseigné à la sentir transpirer entre chaque être vivant, chaque objet afin d’ensuite en faire usage de bien des façons. Devon a été la cible d’une propagande intensive dès son enlèvement sur Ondéron. On pouvait aisément dire qu’on lui avait lavé le cerveau. Pour lui, le Suprême Leader était le seul à pouvoir maintenir l’ordre sur la galaxie, il ferait tout pour que sa volonté soit respectée.

Le jeune homme avait commis des exactions et massacres afin de suivre les ordres qu’on lui avait transmis. Il n’y trouvait aucun remord, car on l’avait formé à n’en ressentir aucun. Tous les moyens étaient bons pour l’emporter, il ne fallait pas hésiter, jamais. Le chevalier avait bien du sang sur les mains. Le parfait exemple à donner pouvait être l’abordage du vaisseau sur lequel était affecté le Major Bradbury. Ce jour-là, il n’avait fais montre d’aucune pitié, massacrant les membres d’équipage et torturant les individus susceptibles de lui délivrer des informations importantes. Il n’avait pas pu aller au bout des choses ce jour-là à cause de l’efficacité et du génie de l’officier de la Résistance. Cependant ils seraient amenés à se revoir un jour ou l’autre, Devon en était persuadé, il pourrait alors achever ce qu’il avait initié.

Tout cela pour dire que la réputation des Ren n’était plus à refaire, si bien qu’ils étaient crains à la fois chez leurs ennemis, mais également parfois à l’intérieur même du Premier Ordre. Des rumeurs s’étaient mises en place dans les rangs, mais au fur et à mesure qu’elles étaient racontées, certaines personnes y rajoutaient des éléments, ce qui rendait les histoires alambiquées et bien éloignées de ce qu’était la réalité. Elle ne fit aucun retour à ses questions, mais comme disait le dicton « Qui ne dit rien, consens ». De plus, d’autres éléments pouvaient trahir le fin fond de sa pensée, il lui suffisait pour cela d’analyser sa gestuelle. Pas de réponse  également à sa provocation, elle ne faisait qu’afficher un sourire qui paraissait faux suite aux mots qui étaient sortis de sa bouche. Devon n’avait pas cherché à la blesser, il avait juste souhaité lui montrer qu’il ne laisserait rien passer, qu’on ne pouvait pas lui marcher sur les pieds sans recevoir un coup de bâton en retour.

Devon avait abordé le sujet de la réunion sans aucune gêne et sans se montrer discret, sa voisine semblait sur ses gardes quant-à elle, et elle zieuta les alentours comme pour être certaine que personne n’était en train d’écouter leur conversation. Le chevalier s’en moquait bien, il était capable d’exprimer sa pensée à voix haute sans que cela ne le dérange, et si cela pouvait choquer quelqu’un, qu’il vienne donc lui en causer. Miss Swiftflight vint à se pencher vers lui, se leva de son banc afin de venir s’asseoir à ses côtés. Elle semblait intriguée de savoir si elle représentait une quelconque menace pour lui, si la Force lui avait envoyé des signaux d’alerte. Mais il ne ressentit rien de tout cela à son égard. Il répondit donc naturellement à sa demande : « Je ne perçois rien en ce qui te concerne…du moins pour le moment.». En effet, il n’avait jamais réussi à pressentir des événements trop éloignés dans le temps, même en méditant, rien ne disait que l’agent ne serait jamais une menace pour lui.

« Attends…Je perçois quelque chose…».Sa mine se fit plus déconfite, comme s’il était intrigué. « Je sens, je sens…». Laissant une tension palpable s’installer pour qu’elle soit suspendue à ses lèvres afin de lui révéler ce que la Force lui communiquait. Oh…Je pense que j’ai juste très soif en fait.». Il lâcha un rire qui fit que les quelques personnes dans la pièce se retournèrent brièvement vers eux, avant de retourner à leur repas. Un grand sourire illuminait son visage, il s’était bien payé sa tête tout de même et était satisfait de son petit tour. Il saisit son verre au passage pour en boire deux bonnes gorgées. . Se penchant légèrement en arrière, les deux mains derrière la tête, il continuait à se délecter de l’instant et à la fixer d’un air amusé.

Elle souhaitait s’acheter une arme. Une arme personnelle, qui lui serait propre, plutôt qu’être un bien du Premier Ordre. Devon était un produit du régime, il n’avait jamais rien possédé, quelque chose qui lui appartenait vraiment. « Je dois dire que je ne comprends ton intérêt de t’acheter une arme que tu pourrais trouver à l’armurerie du destroyer. Du moins, personnellement, je n’ai jamais eu quelque chose qui m’était propre, tout ce que je possède appartient au Premier Ordre.  J’ai connu bon nombre de planètes, mais je n’ai  encore jamais foulé le sol de Corellia. Enfin je pense que je ne tarderais pas à y faire un petit tour. ».Elle semblait s’intéresser à son sabre laser depuis tout à l’heure et lui demanda sa permission de le prendre en main pour le soupeser et l’analyser. Personne ne lui avait fais une telle demande auparavant, il ne sut quoi répondre dans un premier temps. Il finit par l’y autoriser d’un hochement de tête, tout en la mettant en garde. « Si tu te blesses avec, ne comptes pas sur moi pour te trouver une excuse. Je dirais simplement que j’ai empêché que tu t’en saisisses. ». Il la regarda d’un œil observateur, scrutant chacun de ses mouvements, il interviendrait s’il jugeait qu’elle pouvait prendre un risque en manipulant l’arme. Continuant à la regarder toucher les lignes épurées de son sabre, son regard croisa un moment le sien de nouveau, mais il s’en détourna quand elle aborda un fâcheux sujet.

« Vassian. Il s’agit du chevalier Vassian. Tu ne connaîtras pas ma pensée sur ce qu’il a pu dire lors de la réunion, j’ai des ordres. ». Gal’aad avait déclaré que Wes restait un de ses chevaliers, alors il ne se permettrait pas de parler sur son dos. Les chevaliers avaient pu paraître suffisamment divisés lors de la réunion, et donc faibles. Devon ne souhaitait pas ajouter davantage de spéculations sur les dissensions à l’intérieur  des Ren. Cependant, il n’avait pas besoin d’en dire plus pour qu’on comprenne ce qu’il pouvait penser du chevalier dissident. Sa main posée sur la table s’était refermée en un poing qui semblait vouloir s’abattre sur quelque chose pour déchaîner sa colère. Il ressentait de la frustration, celle de comprendre que tous les chevaliers n’étaient pas aussi fidèles à Snoke qu’il ne l’avait pensé. Le chevalier ne vit pas de suite où elle voulait en venir avec sa demande, arquant ses sourcils, il la regarda avec un air perplexe. Qu’attendait-elle de lui ? Il ne comprenait pas, elle dut exprimer clairement son souhait. Son prénom, Devon lui avait dis qu’il réussirait à l’obtenir, d’une manière ou d’une autre. Et maintenant, elle le mettait au défi.

La jeune femme semblait vraiment vouloir  qu’il rentre dans son jeu, qu’il s’exécute. Devait-il le faire ? Il ne le pensait pas, même s’il en ressentait l’envie. Elle lui proposa  d'instaurer un système de gage, s’il réussissait, elle tenterait de lui dénicher un plat plus ragoûtant que son gratin d’eopies. Il ne bougea pas son bras où la main de l’agent était posée, il se contenta de finir sa phrase : « Je ne le ferais pas. Quel est donc mon gage ? ».Devon ne semblait même pas  avoir réfléchi et lui avait répondu instinctivement. Il détourna son visage d’elle un instant, comme s’il s’en désintéressait, comme si leur petit jeu était déjà fini. De son bras libre, il saisit à nouveau son verre pour en vider intégralement le contenu et conclut par un « haa » de plaisir, ça faisait du bien dis donc. Devon reposa le verre sur son plateau et sans lui laisser le temps de réagir, il tendit sa main vers le visage de miss Swiftflight et ses yeux se fermèrent. Se concentrant sur ses pensées, sur ses émotions, sur ses envies, il franchit le pas et pénétra à l’intérieur de son esprit.

Quand ses yeux se rouvrirent, ils étaient debout, l’un en face de l’autre, ils semblaient plonger dans le noir. Ils étaient entourés de portes qui laissaient passer un peu de luminosité par les crans qui était suffisante pour les éclairer tous les deux. S’il l’avait souhaité, Devon aurait pu prendre l’information qu’il souhaitait sans la faire assister à tout ceci. Ce genre de mise en scène, il la réservait quand il avait le temps d’interroger un résistant par exemple, qu’il se savait suffisamment en sécurité pour se permettre ce genre de moment qu’il savourait à chaque fois d’une façon malsaine.  Le chevalier aimait se plonger dans l’esprit de résistant, connaître tout de leur vie pour en ressortir les informations qui l’intéressaient vraiment, les torturant au passage.  Il claqua dans ses mains, comme pour attirer l’attention de la miss et les frotta l’une contre l’autre. « J’ai une préférence pour un bon steak de bantha ! Saignant si possible, il n’en sera que plus savoureux ! ».

Se mettant de profil, il lui indiqua la porte en face d’elle avec sa main et l'invita à passer devant:  « Si mademoiselle veut bien s'en donner la peine… ».  
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Souffrir est absurde et laid. Toute souffrance est un désordre... Mieux vaut s'accommoder des choses, ou les briser que de pleurer à la lune. ― David-Neel

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« Je sens, je sens… » Elle eut un mouvement léger du visage, le menton se relevant dans une mine délicatement hautaine, levant les yeux au ciel de façon exagéré et tachant surtout de ne pas montrer qu’il la faisait plus rire qu’elle ne l’aurait cru possible, le coin des lèvres se relevant malgré elle dans un rire amusé. N’étaient-ils pas tous censés être ternes et monochromes ? Lui avait-on mentit ? Elle en doutait, mais Devon cassait légèrement la lentille qui plongeait tous les chevaliers dans la même lumière opaque et grise dans son esprit. Ils étaient des armes ni plus ni moins, des corps plongés dans des utilités guerrières qui échappaient au reste de l’humanité, c’était là ce qu’on lui avait enseigné mais il semblait finalement que certains d’entre eux avaient su conserver une personnalité propre.

Sa bonne humeur glissa dans une aisance languide sous la découverte tandis qu’un regard en coin perla vers lui. « Tu ne comprends pas ? » Fit-elle en réponse sur son projet d’achat de blaster. Il était orphelin se souvint-elle, un peu mal à l’aise. Ils l’étaient tous chez les Ren. L’incongruité d’une quelconque empathie la prit au dépourvu durant quelques secondes, le sentiment presque étrange au fond de sa poitrine. Des récits sur ces enfants recueillis puis formés lui semblait à mille lieux de la réalité qu’elle avait elle-même vécue. Les doigts se crispèrent un bref instant sur le métal froid de l’arme. « Et bien… c’est quelque chose à toi. C’est différent. Tu n’as pas envie de quelque chose ? » Ils devaient apprendre à maitriser leurs désirs supposait-elle. La philosophie des Ren ou de tout possesseur de la Force lui semblait surtout propice à les condamner au malheur.  « Même n’importe quoi. Juste à toi. » La pointe malicieuse se perdit dans la curiosité. Tout le monde voulait toujours ou peut-être qu’elle voulait plus que la moyenne.

Le sabre-laser emplissait ses paumes, l’alliage froid et la conception si particulière. « Vassian. Il s’agit du chevalier Vassian. Tu ne connaîtras pas ma pensée sur ce qu’il a pu dire lors de la réunion, j’ai des ordres. » Elle cilla, laissant les mots résonner entre eux. Il disait beaucoup en ne disant rien. Les ordres provenaient nécessairement des Chevaliers ou plutôt de ses maîtres et discussion il y avait donc bien eu. Loyal. Elle eut un sourire sage, mille questions au bord des cils. On connaissait la valeur de la discipline et de l’obéissance, la hiérarchie en sacerdoce inattaquable, lui peut être encore plus qu’elle. « Je vois. » Fit-elle en posant ses iris dorées sur le poing fermé. La tentation de le recouvrir de sa propre main l’effleura. « C’est une des leçons du bureau des Renseignements : tout a l’air plus beau lorsqu’incomplet, sauf les vaisseaux évidemment. Incomplet et scouic! » Percer les secrets avait son revers et savoir que son frère d’arme trahissait leurs idéaux s’avéraient sans doute plus douloureux que prévu. « Vous autres chevaliers, vous pouvez être finalement plein de surprises. » Elle n’était pas sûre que ce soit un compliment adéquat, ne désirait pas creuser l’aveu le recouvrant d’un air légèrement contrit.

Sa proposition visant à découvrir son prénom allégea l’espace, le soulagement palpable en le voyant considérer l’option.

Sauf que monsieur refusait.

Le choc s’inscrivit en un hoquet outré et un froncement de sourcils sur le visage de l’espionne. « Pardon ? » Non ? Et pire, il lui offrait son profil maintenant ? Elle allait lui mettre la tête dans son gratin. Et forcément il ferait joujou avec son sabre-laser ou avec ses doigts et ça allait mal finir pour eux deux. Pour elle. Chut. « Tu n’as pas le droit et ton gage c’est de me complaire, justement. » Le son du verre sur la table la gonfla de colère. Il était si agaçant ! L’inspiration sèche, elle le fusilla du regard, des blasters à la place des yeux. « Oh tu ne veux pas que je te dise quel gage je vais te préparer et sache que je n’apprécie pas du tout tes manières, typique d’un cheva… mais… » Le contact des doigts la fit sursauter, le visage se figeant dans une expression de lapin figé devant la lumière. Elle s’accrocha sans s’en rendre compte à la chaise, reculant un peu son buste comme pour s’éloigner de l’emprise trop intime, les doigts de sa main droite venant se refermer sur le poignet du chevalier.

**

Ils semblent être dans un de ces couloirs en forme d’étoile, des portes à chaque tournant.

(Pendant un moment, elle est persuadée qu’elle a suivit un fantôme au sein du destroyer. Peut-être qu’elle s’est endormie ? Non. Elle le voit, sourire étincelant de satisfaction et saphir de minuit dans les yeux. Il n’a rien à faire ici.)

« J’ai une préférence pour un bon steak de bantha ! Saignant si possible, il n’en sera que plus savoureux ! » Elle secoue la tête sans comprendre. « Tu m’as prise par surprise ! » Tricheur. Tricheur. Tricheur. D’un pas décidé, elle vient jusqu’à lui et lance un coup de pied, droit sur le tibia, si terriblement vexée de s’être faite avoir qu’elle est certaine de rougir, même ici. Les battements du cœur sont flous et elle sent la panique se nicher au coin de la gorge comme un chat qui prend ses aises. Elle l’a invité. Il ne sert à rien de résister ou de lui hurler de partir maintenant. C’est juste qu’il n’a rien à faire ici et toute son âme rejette la présence inconnue malgré elle.

Tout se passera bien.

« Juste cette fois, chevalier. » Prévient-elle avant de frousser ses lèvres, le regard perdu sur les portes d’argent. Elle sait déjà qu’elle se trompe, qu’il viendra encore. « Ça va être plus difficile que tu ne le crois tu sais… »  Le murmure transpire à peine sous la nervosité. Reculer est inutile, il n’y verrait là qu’une faiblesse d’enfant qui joue mais qui ne tient pas la cadence. Elle est solide se répète-t-elle, les mots s’inscrivant en lettres cryptés sur les murs qu’ils traversent. Ils s’effondrent comme brume et vapeur, laissant place à la vision charmante d’un appartement tapis de larges baies vitrés donnant au loin sur des usines grises et crasseuses. Il n’est pas dur de reconnaître la petite fille qui sautille à travers la villa aux marbres brillants et aux bibelots onéreux.

Ylenia a presque envie de se réfugier quelque part, de lui tirer sa veste en arrière. Viens, partons. La petite fille les regarde un moment avant de reprendre sa course suivie de près par un droïde couleur mauve, le design un peu dépassé et les bras mécaniques au nombre de six. « C’était mon droïde, » souffle-t-elle. Elle glisse sa main dans celle de Devon mais il n’y a rien de romantique dans le geste et c’est plus afin de le guider dans les méandres des souvenirs, là où elle le désire uniquement. « Elle n’a pas tenu… ma faute vraiment, je voulais tester des choses et… enfin, elle était très douée pour m’attraper. » Elle, comme si le droïde est devenu humain.

Était-ce sa faute, vraiment, si elle était fille unique et que les journées s’avéraient parfois longues dans la villa ?

« Nous allons prendre le thé et consommer des gâteaux aux meilooruns. » La voix de la gamine les attire, la robe différente et le même droïde bipant à qui mieux mieux, les bras se pliant de dépliant au gré de la dînette de porcelaine sur la toute petite table. « Tu ne parles pas beaucoup mais ne t’en fais pas, j’ai vu mère faire et je ferais la conversation pour deux ! » La petite fille a un large sourire édenté, et Ylenia serre un peu la main de Devon. « Ah, ne te moque pas, j’avais juste perdu mes dents de lait. Je t’avais dit que ça allait être dur de trouver mon prénom. J’étais très dégourdie, tu ne trouves pas ? Admets ta défaite et sortons d’ici. » La main entraîne cette fois-ci avant que le décor ne change. « Arrête ça. » Elle est sérieuse, elle n’a aucune idée d’où il farfouille ni même comment.

« Ylenia !!!!! » Le cri la fait sursauter et elle se retourne oubliant Devon.

On oublie toujours un peu combien les parents vous manquent.

Ylenia est si excitée qu’elle se mord la lèvre joyeusement. « Ah, père ! »

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Il la surveilla avec attention lorsqu’elle touchait son sabre laser. Un mauvais geste, un moment d’inattention et la situation pouvait devenir dramatique. Même si Devon lui avait déclaré qu’elle ne devait pas compter sur lui, qu’il ne ferait rien pour l’empêcher de se blesser, il n’en était rien. Il prenait garde que la jeune femme ne l’active pas par erreur, c’était si vite arrivé pour une personne n’en ayant jamais tenu un en main. Il ne souhaitait pas à avoir à s’expliquer auprès de son maître ou d’une quelconque instance supérieure du Premier Ordre du pourquoi elle avait un tel objet en sa possession au moment de l’accident. Il voulait éviter une telle situation, celle d’avoir à rendre des comptes. Le chevalier scruta donc chacun de ses mouvements dans la manipulation de son arme et l’arrêterait à l’instant opportun s’il pressentait qu’il y avait un risque pour elle…Mais également pour lui.

L’achat de son blaster, il ne semblait pas comprendre pourquoi c’était si important pour elle. Comment le pourrait-il ? Il n’avait jamais rien eu, jamais un bien ne lui avait appartenu réellement tout du moins. Tous les objets dans ses appartements, ses tenues, tout était la propriété du Premier Ordre. Même son sabre laser, héritage des chevaliers de Ren, il ignorait combien d’utilisateurs avaient pu le manier avant lui, en même temps il n’avait pas cherché à le savoir. Lui-même était un « bien » du régime, enlevé sur Onderon pour être ensuite envoyé dans un centre avec des enfants de son âge afin d’être soumis à une propagande pour en faire un fidèle défenseur du régime. Puis pour finir, entraîné chez les Ombres lorsqu’on découvrit sa sensibilité où il fut soumis à un endoctrinement encore plus intensif.

Il était ce qu’il était, et surtout il aimait cela. Ses kidnappeurs avaient fait de lui un outil pouvant permettre d’instaurer un nouvel ordre dans la Galaxie, cette dernière connaîtrait la sécurité et l’ordre, quel que soit le prix à payer pour cela. Sa volonté se retrouvait donc être celle de régime, ayant les mêmes souhaits que ceux du Suprême Leader, complètement asservi à sa volonté. « Je ne sais pas. J’ai toujours tout fais pour accomplir ce que l’on attendait de moi, pour ne pas être une déception et pour montrer que j’étais digne d’appartenir au rang de cette élite que sont les Ren. Je n’y donc jamais réfléchi, s’attacher à un objet ou à une personne, c’est développer une certaine affection, une faiblesse. C’est ce que l’on m’a toujours enseigné. »avoua-t-il dans un soupir.

En refusant d’entrer dans son petit jeu, il l'avait contrarié et pas qu’un peu. Même si on aurait dis qu’il ne l’écoutait plus et qu’il la snobait totalement, il n’en était rien. Il restait tout ouï à ses propos. L’agent n’aimait pas qu’on lui refuse quelque chose apparemment, que l’on lui impose un « non » sans autre forme de procès. Miss Swiftflight commençait à sortir de ses gons, à être hors d’elle. Devon aurait pu pousser le vice un peu plus en répétant la négation qui l’avait plongé dans cet état ou bien en faisant bouger ses lèvres comme s’il l’imitait pendant qu’elle parlait, histoire de se payer un peu sa tête, mais il n’alla pas jusque là.  Prenant le pas de son esprit, coupé du monde, ils se retrouvèrent l’un face à l’autre, c’est elle qui l’avait incité à le faire, à deviner son prénom. Elle l’avait invité ici et semblait assez contrarié par la méthode utilisée, elle lui donna un coup de pied au niveau du tibia, le chevalier y répondit simplement par un léger gémissement, provoqué par la surprise de l’action. Il n’y avait pas de douleur, pas en ce monde. « Crois-tu que les autres te demanderont la permission ? »

Devon combattait rarement à la loyale, tous les moyens étaient bons pour l’emporter après tout, non ? De plus, la surprise lui avait permis de ne rencontrer aucune résistance, cela demandait donc au chevalier beaucoup moins d’efforts pour faire ce qu’il avait à faire. « Nous verrons, miss Swiftflight, nous verrons… » Il souhaitait juste connaître son prénom, cependant il ne pouvait pas affirmer qu’il ne reviendrait plus se plonger dans son esprit, un jour, il ne fallait jamais dire jamais.

« Je te déconseille de me lancer ce genre de défi... » lui répondit-il sur un ton grave et qui semblait presque menaçant, avant de tout de suite enchaîner. « Surtout que j’aime ceux n’ayant pas de prénom et aux jolis yeux noisette. » lança-t’il à son égard, de façon plus légère, finissant sa phrase avec un fringant clin d’œil. Oui, oui, une tentative de flirt, c’était surtout pour dédramatiser un peu la situation, mais ça avait un tout autre intérêt à ses yeux. En effet, Devon n’était pas aussi doué dans les jeux d’esprit que pouvaient l’être Gal’aad ou encore Revan. Le jeune homme avait encore bien des progrès à faire dans ce domaine, il y travaillait encore à vrai dire. Si elle cherchait à lui résister, il commencerait à éprouver de la difficulté à dicter les règles ; alors que s’il cherchait à détourner son attention sur un autre sujet, il aurait tout le champ libre pour rechercher l’information qu’il souhaitait.

Ils quittèrent l’obscurité de leur lieu d’arrivée pour la luminosité d’un appartement, chic, classe. Les murs étaient ornés de divers tapisseries et tableaux, un cadre luxueux qui le laissa deviner qu’elle devait appartenir à une classe sociale assez aisée. Par les baies vitrées, on pouvait observer des usines se dresser à l’horizon éjectant des volutes de fumées grisâtres dans le ciel. Une petite fille était au centre du souvenir, un souvenir d’enfance. Devon tressaillit lorsqu’elle lui prit la main, il ne s’était pas attendu à ce geste. Il la jaugea un moment avant de reporter son attention sur la scène. Les contours de la pièce se déformèrent légèrement afin de se stabiliser, ils venaient de changer de souvenir. Ils n’avaient pas quitté la pièce, pourtant ils avaient bien avancés dans le temps.

Le chevalier continuait à fixer la gamine qui jouait avec le droïde, lui n’avait aucun souvenir d’enfance dans le genre. Ceux, dont il se remémorait, n’avaient rien de joyeux. Non, ils avaient bel et bien eu deux vies totalement différentes, ils ne se ressemblaient pas. La jeune femme lui demanda de ne faire aucune réflexion sur le physique de l’enfant qu’elle avait été. Trouvant une opportunité de ne pas penser à sa propre enfance, il la toisa, un sourire charmeur se dessina sur son visage :  « Je ne me permettrais pas, voyons. Et puis, je n’ai aucun mal à apercevoir les évolutions qui se sont opérées pour laisser place à la femme qui se tient à mes côtés aujourd’hui, de belles évolutions pour sûr.  » Il n'y avait aucun mal à le lui faire remarquer, c'était une très belle femme après tout. Elle pensait pouvoir dicter les règles à leur jeu, elle l’avait initié, mais il avait lancé le coup d’envoi. C’était lui qui était aux commandes de tout ceci, pas elle. « Je ne pense pas non...  »Il refusa d’avancer lorsqu’elle tenta de le tirer, il allait avoir ce qu’il voulait.

Ils changèrent à nouveau de souvenir et il comprit de suite que celui-ci fut le bon lorsqu’une voix masculine s’éleva pour crier le prénom d’une fille « Ylenia ». Devon allait fanfaronner quelque peu, se glorifiant d’avoir  trouvé comment elle s’appellait. Mais lorsqu’il la vit, il se dit que le moment n’était pas opportun, cette vision semblait la ravir et il la laissa donc savourer un peu l’instant. L’individu était rentré dans l’appartement, une paire de bottes à la main. La petite fille…Non elle n’était plus petite, elle devait avoir une douzaine d’années, le début de l’adolescence. L’adolescente accourut en sautillant vers son père, un grand sourire barrait son visage de long en large. Le père offrit un cadeau à son enfant et celle-ci réussit à se plaindre de ne pas avoir eu une jolie robe. « Ha…Je comprends maintenant pourquoi tu n’aimes pas que l’on te refuse quelque chose.  » commenta-t-il sur un ton amusé.

Père et fille s’échangèrent des gestes d’affection, Devon détourna le regard. Son père était mort depuis bien longtemps maintenant, il n’avait plus en mémoire de tels moments passés en sa compagnie, c’était les souvenirs de la miss, non les siens. Pour ne plus y penser, il se détourna d’Ylenia, lâchant sa main et se dirigea vers les baies vitrés pour scruter le paysage. Il souhaitait la laisser profiter de ce moment, c’était sa vie, non la sienne, il aurait été égoïste de gâcher son bonheur. La notion du temps n’était pas la même ici, il semblait défiler différemment,  lorsqu’elle vint lui donner une tape sur l’épaule, il se retourna pour lui faire face. «  Souvenirs d’enfance enrichissants que voilà. Ylenia. J’en ai appris bien plus que je ne l’aurais espéré. Tu semblais être choyée comme une princesse par tes parents… ».Il se stoppa net dans sa phrase, réfléchissant un instant avant d’afficher une moue malicieuse. «  Je viens de te trouver un joli surnom, princesse… »Il mima son dernier mot en effectuant une révérence complètement exagérée qu’il termina en se raillant un peu d’elle. Une nouvelle pique pour chasser les rares souvenirs de son enfance qui pouvaient le tourmenter, il voulait penser à autre chose.
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Il fallait bien avouer que c’était un peu le paradis que de flirter avec l’enfer.

Elle avait répondu d’un sourire suave, le petit nez se relevant légèrement dans une attitude hautaine, mais en vérité l’attention lui plaisait.  « Ha…Je comprends maintenant pourquoi tu n’aimes pas que l’on te refuse quelque chose. » Ylenia ne put s’empêcher de lui décocher un regard faussement noir, la joie apparente dans l’éclat des yeux. Tout le monde aimait les cadeaux et les friandises et elle avait appris à mesurer l’appréciation d’autrui de cette manière. Ses parents n’avaient pas toujours eu tout le temps du monde à lui consacrer mais ils l’avaient choyé et elle avait eu tout ce qu’une enfant des bordures de galaxie pouvait rêver d’avoir.

Aussi sentimentale que cela puisse paraitre, sa famille lui manquait. Les années passées au sein de l’Académie lui avaient forgés une armure pour son échine souple mais elle devait le gros de son caractère à la patience d’un père charmant et à la rigidité d’une mère plus intelligente que sa position ne laissait filtrer. Cette dernière avait toujours su engager sa fille dans un chemin d’ambition contrôlé, l’intimant de ne pas se laisser aller à de puérils échanges inutiles. Les amitiés devaient être calibrés autant pour le plaisir que pour leurs utilités et il fallait toujours savoir tirer quelque chose de n’importe quelle situation. Madame Swifltflight avait été d’une précieuse aide lorsqu’il avait fallu choisir sa voie, mettant en avant que tout véritablement talent commençait dans l’observation.

Ylenia tourna son visage vers Devon, abandonnant un temps l’image nacrée de la petite fille aux joues rebondies. Les mots prononcés un peu auparavant ricochaient dans son esprit. Il avait parlé d’élite et elle s’était retenue de ne pas l’informer que les Ren n’étaient pas ainsi perçus par la majorité de l’armée du Premier Ordre. Peur. C’était ce qu’ils inspiraient en premier lieu, l’incompréhension latente quand aux pouvoirs qui irradiaient de leurs personnes. Certains se laissaient happer par les soleils sombres qu’ils étaient et Ylenia comprenait parfaitement pourquoi. L’attraction était presque vénéneuse, l’envie de tendre les bras vers, de se mettre contre, d’aider en paroles et gestes les carences si évidentes dans des vies faites de souffrance. Tout homme rêvait de donner humanité aux machines et c’est ce qu’ils étaient en soi : des entités construites dans les larmes et le sang jusqu’à ce que les mécaniques soient parfaites.

(Quand il lui avait dit de ne pas lancer de défi, elle avait  sentit le frisson d'un danger presque imminent.

Méfiance.)

Elle s’approcha de la silhouette guerrière dans un léger froncement de sourcils : n’aurait-il pas pu faire l’effort d’être désagréable au moins ? Les sourires furtifs teintés d’ironie et même l’impromptue politesse dont il venait de faire preuve étaient sources d’autant de confusion.  « Te voilà bien pudique pour quelqu’un qui est entré par effraction dans ma tête. » Elle pencha son visage, la mèche menaçant de glisser le long de la joue, le regard perplexe délaissant le souvenir familial pour venir enflammer le soldat. Elle l’y avait invité mais peu importait. « Souvenirs d’enfance enrichissants que voilà. Ylenia. J’en ai appris bien plus que je ne l’aurais espéré. Tu semblais être choyée comme une princesse par tes parents… » Elle cilla, prise au dépourvu, incapable de percevoir s’il s’agissait d’une moquerie ou d’une pointe d’envie. « Je viens de te trouver un joli surnom, princesse… » Elle sentit la fragilité un instant apparente dans la roseur de ses propres joues avant de faire claquer sa langue sur son palais en une désapprobation totale afin de masquer son embarras. Il était trop doué pour flatter et complaire, le miel des mots perlant au coin des lèvres.

Ça n’enlevait pas la dureté qu’elle pouvait voir en fantômes dans ces iris.

( Elle céda presque aux paroles de velours, l’attention se hasardant sur la bouche le temps battement de cœur. Le désir d'un peu plus en apesanteur, elle ne le fit pas. Évidemment. Mais elle y avait pensé durant une fraction de secondes et c’était déjà bien assez.)

« Et bien, les chevaliers s’agenouillent devant les princesses, non ? » Voilà de quoi l’adoucir. Elle froussa les lèvres devant le sourire de contentement qui menaçait d’ores et déjà de pointer. « Allez. » Trépigna-t-elle en tapant des mains comme si cela pouvait accélérer le processus. « Oh tu sais, j’y parviendrais tout comme je réussirais à ce que tu ne puisses plus du tout venir ici. Viens, partons. Tu as eu presque tout ce que tu voulais et j’ai quelque chose de très important à te demander. » Le fait qu’elle ait à attendre son bon vouloir la fit pester mais rapidement les murs s’effritèrent et elle vola in-extremis un dernier coup d’œil à son souvenir heureux.

**

La lumière et le brouhaha de la cantine la déstabilisèrent et elle inspira sèchement avant de se rendre compte qu’elle tenait toujours le poignet du chevalier. « Oh. » Toute l’expérience avait été surréaliste et elle détourna le regard se levant pour faire quelques pas, les sens à l’envers et l’esprit quelque peu brouillon. « C’est... »  Il l’avait prévenu et il fallait se rendre à l’évidence, les autres ne lui demanderaient pas la permission. Ce serait pire. On disait que miss Gregorya savait monter ses défenses contre ce genre d’intrusion mais tout ceci tenait presque de la légende au sein du Bureau et Devon était entré en elle comme couteau dans une motte de beurre synthétique. « Nous ne devons jamais nous faire prendre vivant au sein de mon département mais je pense qu’on est d’accord pour dire que je suis trop adorable pour risquer de mourir de ma propre main aussi est-il de ton devoir de m’enseigner à… résister à ce genre de méthodes. Pour le bien du Premier Ordre. » Elle pivota sur elle-même d’un coup avant de se mordiller les lèvres, la décision prise. Quelques mouvements et elle s’installa à ses côtés, les fesses sur la table lui exposant tout les plans qu’elle venait de cordialement faire. Un picotement perdurait sur la nuque, la marque de la force exercée sur elle sans doute mais elle ignora la courte douleur, laissant simplement courir ses doigts sous la masse miel de cheveux. « Demain soir, je viens dans tes quartiers… attends non, tout ce sait sur ce vaisseau je suis bien placée pour le savoir… » Elle tapota sur ses lèvres consciente que l’important ici était de tout garder absolument secret. « Ah ! Tu vas m’inviter à Coronet. Je trouverai un hôtel, il nous faut un endroit où nous ne serons pas embêtés. » On avait la solution pour tout. Ils iraient sous un nom d’emprunt, les faux papiers n’étaient pas compliqués à forger après tout, ça aussi elle était bien placée pour le savoir.
Ylenia arqua un sourcil taquin. « Au moins, pour une fois, tu seras accompagnée par une jeune femme de qualité. Ça te changera un peu. » Fit-elle la mine innocente. Elle fronça son nez. Tout soldat faisant trop d'allers et venues sans missions directes étaient appelés à être surveillé mais elle pourrait sans doute tâcher de voir éventuellement avec miss Gregorya si jamais cela arrivait. Ce n'était qu'une solution temporaire après tout. « Eeeeeeeeeet….il y aura surement de bons steaks. » Ce n’était pas ça l’adage ? Qu’on pouvait attraper n’importe qui en le tenant par son ventre ? Elle n'était pas certaine que cela fonctionne avec Devon, il avait la tête dure de toute évidence et un caractère tout aussi bougon quand il s'y mettait. « Puis, tu n’as rien à craindre, je suis loin d’être une faiblesse. » Elle s’était penchée un peu vers lui, le mystère plein l’espace restreint entre eux deux, un petit air de défi fantomatique.

Il lui avait dit de ne pas en lancer mais la tentation était si délicieuse. « Les chevaliers ont des holonet ? »  

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Ylenia & Devon

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Le regard perdu dans le lointain, il ne faisait plus vraiment attention à ce qui pouvait l’entourer. Il avait souhaité laisser la jeune fille à ses souvenirs d’enfance, peut-être que ces derniers s’étaient perdus au fin fond de son esprit, submergés par tous les autres événements qui étaient venus animés sa vie. Si elle ne les avait plus en mémoire, cela lui avait permis de les revivre, même si c’était pendant un bref instant. Cela semblait être une scène qui lui tenait à cœur, elle était complètement émerveillée dans l’appartement, il la laissa donc contempler, ne souhaitant pas cacher son plaisir. En tout cas, c’était assez satisfaisant de voir un sourire illuminé son visage, cela la rendait d’autant plus attirante. Du moins, c’était son avis. S’il n’avait pas souhaité en voir davantage, c’était également pour ne pas penser à sa propre enfance. Devon n’en avait gardé que de rares souvenirs, mais ces derniers arrivaient tout même à le hanter lors de son sommeil et durant ses méditations. Il espérait que son petit passage dans l’esprit de l’agent ne viendra pas perturber sa nuit, il souhaitait dormir à poings fermés, cela faisait tellement longtemps que ça ne s’était pas produit.

Ses yeux étaient fixés sur les fumées au loin, son esprit essaya de percevoir naïvement les ouvriers qui pouvaient y travailler. Mais il n’y parvint pas. C’était peine perdue et il aurait dû le savoir. C’était les souvenirs d’Ylenia, dans cette « réalité », il ne pouvait agir que sur le subconscient de la belle aux cheveux clairs.  Ses pensées étant ailleurs, et n’étant plus assez attentif à la présence de la propriétaire des « lieux », il se fit surprendre, lorsqu’elle lui fit remarquer qu’il était bien discret, alors qu’il avait engendré tout ceci, il se contenta de répondre dans un haussement d’épaules. «  J’ai obtenu ce que je rechercherais. Il aurait été égoïste de saper le bonheur que tu semblais ressentir face aux séquences de ton passé. » Des paroles qui étaient sorties toutes seules de sa bouche, il avait été honnête, il ne gagnerait rien à la tourmenter davantage. Après tout, il connaissait son prénom maintenant, il avait remporté son défi, le reste ne l’importait peu.

Un silence pesant s’installa entre eux suite à l’évocation du surnom d’Ylenia, ça semblait produire un certain effet, attendu par Devon. Bien, il allait pouvoir en user au cours de leur conversation, il aimait bien la provoquer juste pour pouvoir découvrir chacune de ses réactions. Il ne perçut pas les sentiments de son interlocutrice, s’il s’était concentré, il aurait certainement réussi à percer son désir. Cependant, son esprit était encore quelque peu perturbé par ce qu’ils avaient pu voir, même s’il ne l’avouerait pas, c’était une faiblesse à ses yeux.  Lorsqu’elle évoqua les règles de courtoisie entre une princesse et un chevalier, ses yeux roulèrent dans leurs orbites. Parce qu’elle était sérieuse en plus, oui, elle l’était. Elle devait aimer qu’on ne lui résiste pas, que ses désirs soient des ordres. Souvent les individus, pourris et gâtés pendant leur enfance, aimaient qu’on accomplisse leurs quatre volontés. Et c’est  ce qu’elle espérait en cet instant. Comme si le chevalier obtempérerait si facilement, non, il avait une toute autre idée en tête :  «  Il est vrai que c’est dans les mœurs et coutumes. Mais avoues-le, princesse, c’est plus l’étape du baisemain qui t’intéresse, pas vrai ? »avait-il terminé dans une nouvelle provocation. Il aimait jouer avec elle. Devon saisit délicatement sa main, il fit mine de se pencher pour déposer un baiser sur le dos de la main d’Ylenia. C’est le moment précis qu’il choisit pour se redresser brusquement, en lâchant la main de la jeune femme. Il porta une main dans son dos, les traits de son visage étaient déformés par la douleur. « Outch ! Mon dernier entrainement se fait ressentir, j’aurais peut-être dû penser à faire quelques étirements après ma séance… » Balança-t-il comme excuse. Car oui, c’était de la comédie, il n’avait mal nulle part, il ne souhaitait pas lui donner raison, voilà tout.

Ils n’avaient plus rien à faire ici, c’était vrai. Devon avait obtenu ce qu’il était venu chercher, il s’était montré opportuniste en profitant du manque de vigilance de la jeune femme pour pénétrer dans son esprit. Si elle lui aurait opposée une quelconque résistance, cela aurait été une toute autre affaire, il en était certain. « J’ai eu presque tout ce que je voulais, presque… » Souligna-t-il. Son regard intéressé se perdit dans les yeux de la jeune femme, il ne perdait pas une occasion de flirter avec elle. En tout cas, il n’avait plus d'intérêt à les faire rester ici, mais rien ne pouvait affirmer qu’il ne reviendrait plus jamais. En faisant appel à un certain effort, il se retira de son esprit. Les courbes et les lignes du souvenir se déformèrent en des ondulations avant qu’ils soient ramenés à nouveau à la réalité.

Ses yeux se rouvrirent, ils étaient de nouveau dans la cantine, ils ne l’avaient jamais quitté à vrai dire. Devon jeta un coup d’œil autour d’eux, il y avait encore moins de monde que précédemment et personne ne semblait avoir remarqué ce qu’ils avaient entrepris. Tant mieux, il n’aurait pas aimé qu’on vienne lui poser trop de questions, du moins ce n’était pas le moment. Il avait juste envie d’une chose, maintenant…Manger. Et oui, ça demandait de la concentration, et donc de l’effort d’user de la Force. Et à cette heure de la journée, enfin de la nuit ça dépendait comment on voyait la chose, la fatigue se faisait doucement ressentir, en plus de la faim. Devon observa la réaction d’Ylenia, c’était la première fois que quelqu’un enfreignait son intimité spirituelle, il ne pouvait pas comprendre ce qu’elle pouvait ressentir, mais il essaya d’analyser son comportement et sa gestuelle pour se faire une idée. Elle semblait assez perturbée et ne tenait pas en place.

Elle se faisait se faire des films, oui ça devait être ça. Ylenia était déjà persuadé qu’il allait l’entraîner à fermer son esprit aux intrusions d’autres utilisateurs de la Force. Mais avait-il dis quelque chose en ce sens ? Non, il ne le pensait pas. S’il avait pénétré dans son esprit, c’était pour une information bien précise, et malgré toutes ses provocations depuis tout à l’heure, il n’avait pas de raison spécifique pour y retourner un jour. Du moins pas pour le moment. Quelque peu ébahi par ses propos, ses yeux ressemblèrent à des billes l’espace d’un instant, avant de se plisser, essayant de deviner toutes les ambitions cachées de la jeune femme. « Trop adorable, en effet. Mais malgré, le fait que tu sois des plus charmantes, je ne vois pas en quoi ça serait mon devoir de t’enseigner ceci. Après tout, j’ai obtenu, ce que je souhaitais, tu m’as mis au défi de trouver ton prénom, et c’est ce que j’ai fais, princesse. Maintenant, je ne vois pas ce que j’aurai à y gagner en t’apprenant à résister aux personnes voulant se jouer de ton esprit.   » Il n’y avait aucun sous-entendu dans ses propos, Devon ne demandait rien. Il voulait juste savoir ce qui pouvait amener l’agent à penser qu’il pouvait l’aider d’une quelconque manière et surtout pourquoi en ressentirait-il l’envie. Il voulait juste obtenir des réponses, sans aucune arrière-pensée.

Elle vint s’asseoir directement sur la table, à ses côtés. Elle allait vraiment vite en besogne. En effet, Ylenia avait déjà pensé à un plan A, à un plan B,etc… Son cerveau était bien actif, beaucoup trop oui, il y avait un bouton stop quelque part pour qu’elle arrête un peu de causer ? En tout cas, les deux idées de la jeune femme le firent bien sourire, car son esprit pensa automatiquement à autre chose dans un contexte différent. Cela l’amusa énormément et il n’hésita pas à partager son état d’esprit. « Hop, hop, hop ! Tu franchis beaucoup d’étapes là. Venir dans mes quartiers ? Se retrouver à l’hôtel ? Cela va un peu vite, tu ne nous trouves pas ? Tu ne me laisses même pas l’occasion de te payer un verre… » Sourire rêveur aux lèvres, l’occasion était vraiment trop belle, il n’avait pas pu résister à l’envie, sur le coup elle lui avait presque tendue la perche, il fallait le dire !  

Le chevalier fut quelque peu pris au dépourvu lorsqu’elle énonça le fait qu’il serait bien accompagné, pour une fois. Il crut apercevoir un sous-entendu derrière sa phrase. L’avait-elle déjà espionné au cours de ses sorties ? Est-ce que il y avait des informations de ce type dans son dossier ? Il l’ignorait, il ne prit pas la peine de répondre, pensif à ce qu’elle venait de dire et la soupçonnant de s’être renseigné sur sa personne avant leur rencontre. Ylenia tenta de l’amadouer avec des steaks, c’était un facteur non négligeable, surtout qu’il avait faim là, mais ce n’était pas forcément déterminant pour réussir à le faire changer d’avis. Devon pensait percevoir le jeu auquel elle était en train de jouer, mais quelles seront ses limites ? Il souhaitait le savoir et il le déterminerait dès maintenant. Prenant appui avec une main sur la table, il avala la distance qui les séparait en un rien de temps et s’arrêta à seulement trois centimètres de sa bouche. Le désir d’aller plus loin se fit ressentir, de goûter à ses lèvres charnues, juste un baiser. Mais non, il ne voulait pas prendre le risque de se prendre une claque en retour.

Il émit un rictus, sa tête bascula sur le côté, éraflant presque la joue d’Ylenia, il vint lui souffler quelques mots dans le creux de son oreille d’une voix suave « Je déteste les faiblesses, peut-être que je devrais te porter tout mon intérêt, alors princesse ?   » Devon se leva pleinement, rompant la proximité engagée avec Ylenia, fit demi-tour sur lui-même et s’écarta du banc. Il fit aller ses membres dans tous les sens, il ignorait combien de temps ils étaient restés dans l’esprit de l’agent, mais ses bras et ses jambes étaient engourdies. Il avait besoin de se dégourdir un peu et il fit donc quelques pas. « Oui, nous avons des numéros d’holonet, mais avant que je te le donne…   » Un gargouillis sourd retentit de son estomac, il en fut presque gêné et il enchaîna donc, pensant que ça passerait inaperçu. « Le gage, c’était un bon steak et un autre gage que je pouvais garder pour plus tard, c’est bien ça ? » demanda-t-il en pensant l’entourlouper.
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Souffrir est absurde et laid. Toute souffrance est un désordre... Mieux vaut s'accommoder des choses, ou les briser que de pleurer à la lune. ― David-Neel

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« Il est vrai que c’est dans les mœurs et coutumes. Mais avoues-le, princesse, c’est plus l’étape du baisemain qui t’intéresse, pas vrai ? » Elle ne répondit pas à cette remarque, ni même aux autres, le sourire espiègle en parure étincelante sur un visage encore un peu déboussolé. Devon n’avait pas si tord que ça et certains - certaines - reprocheraient sans doute à la jeune femme son gloss trop brillant et ses manières coquettes. Elle aurait pu le lui expliquer sans doute que son vocabulaire ou son rouge à lèvres étaient tout autant une armure que son sabre-laser et son pouvoir, qu’ils étaient en quelque sorte une extension de sa volonté. On pouvait tant obtenir d’un parfum bien choisit et d’une couleur parfaite : des baise-mains et des vérités, des faveurs et des secrets. Pour un chevalier de Ren, la chose semblerait probablement dérisoire mais eux naissaient avec une carte supplémentaire inespérée.
Ylenia lui fut presque reconnaissante de ne pas sentir la courbe de ses lèvres sur la peau. Elle obtiendrait tout ça se dit-elle, l’impression savoureuse de vaciller sur la pointe d’une aiguille, et ce fut avec espoir qu’elle laissa sa main glisser hors de la sienne. Elle était des plus déterminée quand elle le voulait aussi eut-elle un sourire dans les yeux lorsqu’il plaisanta, reculant pour mieux conquérir, la taquinerie aisée et le flirt trop facile, preuve intangible qu’il en usait bien souvent.

C’était de bonne guerre, Devon.

« Tu vas te contenter de mon prénom ? » Elle posa sa joue dans l’intérieur de sa paume. « Ce n’est pas très ambitieux. » Il avait dit qu’elle était adorable et c’était stupide vraiment mais elle eut un sourire. Ylenia se morigéna à peine quelques secondes, le plaisir de l’aveu comme un sucre sur la langue. Elle avait bien fait de le choquer délibérément de la sorte en le sortant de sa zone de confort. C’était presque rassurant de pouvoir encore surprendre un chevalier de Ren, tout vêtu de noir comme plongé dans des deuils constants. « Tu pourras me payer tout un tas de choses, c’est même plutôt recommandé. J’aime ce qui brille, figure-toi. » Elle eut un tremblement silencieux, le rire poché et la respiration un peu plus lente. Une seconde puis deux et elle cilla avant de froncer le nez. Il promettait pour mieux retirer et elle eut presque la tentation de lui demander s’il procédait toujours ainsi. « Je déteste les faiblesses, peut-être que je devrais te porter tout mon intérêt, alors princesse ? »  Un soupir argenté lui souilla la poitrine. Il la gourmandait beaucoup trop. « La prochaine fois je t’attache! » Fit-elle avec morgue en se levant à son tour, passant ses mains sous ses cheveux avant de rajuster sa veste cintrée d'un geste sec sous la frustration. « J’ai d’autres moyens d’obtenir ton holonet. » Elle dodelina de la tête, l’air de petit démon sage sur la frimousse. « Je demandais par politesse. » La provocation constella son visage mutin, avant d’éclater de rire. « Oh très bien ! Je ne voudrais pas avoir le décès de ton estomac sur la conscience. Moi qui pensait que vous étiez des robots chez les Ren, tout est chamboulé. » Elle se mit à compter sur ses doigts. « Mauvais caractère, impatient, langue de miel, gourmand oh… et entourloupeur avec ça ! » Le sourire s’étira jusqu’à creuser des fossettes. Il était positivement parfait. « Un gage. » rappela-t-elle aimablement. « Et j’ai bien spécifié que si tu réussissais j’irai voir en cuisine si un steak serait possible, pas que tu en aurais absolument un. »  Sur ces précieuses paroles, elle s’éclipsa un temps lui intimant d’un doigt qui se voulait sévère de rester précisément là où il était.

Se faufiler dans les cuisines du Premier Ordre pouvaient s’avérer compliqué, les droïdes de surveillance passant et repassant entre les fourneaux aux grands bras métalliques. L’heure était sans importance, un vaisseau de cette taille et de cette capacité se devait de servir à toute heure. Les pilotes rentraient parfois tard de mission – quand ils rentraient ; les dignitaires recevaient diplomates et sénateurs dans les deux salles de parades ; les agents tournaient au sein de l’immense cantine afin de ne pas créer de débordements. La machine était bien huilée, le concept efficace, comme tout ce qui filait entre les doigts gantés du Premier Ordre.

Ylenia profita du répit pour remettre ses idées en place. C’était dangereux de laisser à quiconque l’accès de ses souvenirs. Elle n’avait rien à cacher cependant – pas encore en tout cas. Les agents du Renseignement étaient formés en balayant toute autres traces, le canevas virginal sur lequel le pinceau rouge et noir de l’Ordre pouvait tracer à sa guise un nouveau portrait. Elle avait menti, l’imposture naturelle sur la langue : une demande d’un supérieur qui voulait son repas dans son bureau, il suffisait de mettre une pointe de panique dans sa voix, un regard innocent de bleusaille, des verbes transitifs qui ne souffraient aucune contestation. « Il faut » « je dois » « il demande ». Le plateau fut rapidement prêt, plein d’un steak juteux, d’allumettes croustillantes et de fruits synthétiques. Il fallu être rapide pour que la serviabilité suspicieuse du robot n’annihile pas l’illusion. « Je vais l’apporter. » « Oh non je vais le faire, je suis déjà sur la route. »

Lorsqu’elle revint prés de Devon, elle lui fit signe. Pas ici, certainement pas. Dans le couloir et encore. « Je t’accompagne jusque tes quartiers. » lui fit-elle d’un ton péremptoire, le plateau lourd dans ses bras, refusant de le lui céder puisque le mensonge devait rester réel le temps de s’éloigner au moins des cuisines et de disparaître vers la branche des chevaliers. « Peut-être que je vais garder ce plateau pour moi, c’est un plat de gradé. » Le sourire se fit discret avant de reprendre un air sérieux. « Je ne peux pas me permettre de venir trop souvent chez toi, même si c’est pour nous entraîner. C’est peut-être amusant pour une mécanicienne ou un de ces merveilleux pilote à la tête brûlé et aux mœurs dissolues mais les agents du renseignement font attention à qui ils parlent, quand et comment. Déformation professionnelle. » Les pas ralentirent légèrement, une simple hésitation en pénétrant dans l’aile propre aux chevaliers. Contrairement au reste du vaisseau, l’espace extérieur mangeait ici l’intérieur et le silence s’avérait presque inconvenant. « Tout fini toujours par se savoir… » Elle aurait pu ajouter cruellement qu’il serait sans doute judicieux d’en parler à son copain Vassian mais elle préféra passer la rainure fine et blanche de ses dents sur la pulpe de ses lèvres. « Voilà, nous sommes assez loin maintenant. Ton plateau. » Elle lui tendit son repas encore chaud, l’odeur délicieuse chatouillant les narines. « Tu vois ? Je paye mes dettes, ce n’est pas si mal pour une princesse et c’est très courageux de ta part d’avaler un plat qui n’a pas été fait sous tes yeux. Je te taquine… j’espère que tu aimes le piment. » Elle n’avait eu le temps de rien mettre ni même le loisir d’attraper des épices sous les scans robotiques des droïdes mais l’idée de l’embêter juste un peu lui était miel et elle fit quelques pas pour s’éloigner. « J’aime beaucoup le courage, ce serait triste que tu n’acceptes pas cet entrainement unique. » Elle s’arrêta, fort sérieuse. « Je ne ferai cette proposition qu’à toi tu sais. » Elle n’avait pas spécifiquement encore confiance mais des chevaliers Ren, il semblait être le seul à savoir où sa loyauté résidait en premier lieu. Peut-être qu’il y avait avantage à avoir mauvaise caractère finalement.

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